L’Afrique doit investir davantage dans le numérique pour stimuler sa croissance et favoriser la création d’emplois. C’est en substance le message lancé par la Banque mondiale dans son dernier rapport «Afrique numérique: Transformation technologique pour l’emploi», publié le 13 mars 2023. Et pour relever ce défi, les pays africains doivent régler certains préalables.
D’abord, la fracture numérique. «En moyenne, 84% de la population d’un pays donné de la région pouvait au minimum accéder à l’internet mobile 3G. Et sur 63% qui disposaient d’un certain niveau de services mobiles 4G à la fin de l’année 2021, seuls 22% les utilisaient, selon les données du Global System for Mobile Communications Associations (GSMA)», explique le rapport. Une inégalité d’accès aux outils numériques plus prononcée est notée dans des pays comme le Soudan du Sud, où le taux d’utilisation se limite à 6%, contre 53% en Afrique du Sud.
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Toujours d’après le rapport, la fracture numérique se creuse davantage entre les grandes entreprises formelles et les microentreprises informelles, mais aussi entre celles dirigées par de jeunes hommes et celles dirigées par des femmes plus âgées. La preuve: seules 2% des microentreprises détenues par des jeunes femmes et 8% de celles appartenant à de jeunes hommes utilisent un ordinateur.
«L’utilisation très limitée de l’internet mobile est une occasion manquée pour la croissance inclusive en Afrique. Combler ce retard renforcerait le potentiel du continent à créer des emplois pour sa population, qui augmente, et à stimuler la reprise économique dans un monde hautement numérisé», indique Andrew Dabalen, économiste en chef de la Banque mondiale pour l’Afrique.
Coûts élevés d’Internet
Des disparités sont également notées entre les familles plus riches, urbaines et éduquées et celles pauvres, rurales et moins instruites. Une réalité déjà confirmée par le rapport de l’Alliance for Affordable Internet (A4AI) en 2020, qui révélait que seuls 29% des Africains avaient accès à internet, contre 45% des Asiatiques. Pourtant, comme le suggère Christine Zhenwei Qiang, directrice du développement numérique à la Banque mondiale, «pour faire en sorte que la disponibilité d’Internet se transforme en un usage productif et une croissance de l’emploi, la région a besoin d’un accès abordable, de compétences et de technologies numériques qui répondent aux besoins des Africains».
Si les petites et moyennes entreprises (PME) africaines peinent à se connecter au digital, c’est parce qu’une bonne partie d’entre elles ne supportent pas les coûts onéreux de l’internet sur le continent. En 2020, le prix médian d’un giga de données mobiles en Afrique s’élevait à plus de 5 dollars, selon le rapport de l’A4AI. Un coût qui atteint 35 dollars en Guinée équatoriale, un pays qui est pourtant relié à trois câbles sous-marins de fibre optique. En réponse à cette problématique, les pouvoirs publics devraient promouvoir la concurrence dans la fourniture d’infrastructures numériques et réduire les coûts d’exploitation.
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D’après la Banque mondiale, l’investissement dans le numérique est plus qu’une nécessité pour l’Afrique, un continent qui accueille chaque année plus de 22 millions de jeunes sur le marché de l’emploi et qui devrait devenir, d’ici 2100, le plus grand marché de l’emploi au monde. «Pour absorber cette masse, les Etats doivent massivement recourir aux outils numériques afin de créer des emplois et stimuler la croissance», recommande l’institution de Bretton Woods.
Toujours selon cette dernière, des réformes sectorielles continues et des investissements publics ciblés qui soutiennent les fondements de l’économie numérique et l’adoption de ces technologies peuvent aider à réduire la fracture digitale et à libérer un potentiel énorme de création d’emplois plus nombreux et de meilleure qualité, surtout pour un continent qui connaît une forte croissance démographique.