Après plusieurs mois de discussions, le FMI a annoncé, mercredi 17 mai, son aval définitif pour une Facilité élargie de crédit (FEC) de 2,242 milliards de DTS (Droits de tirages spéciaux), soit 3 milliards de dollars, au Ghana. Ce montant sera décaissé sur une période de trois ans dont un premier décaissement immédiat de 600 millions de dollars.
Une véritable bouffée d’oxygène pour ce pays d’Afrique de l’Ouest peuplé de 30 millions d’habitants, seconde puissance économique de la Commission de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (Cedeao), qui à cause des impacts des crises sanitaire du Covid-19 et ukrainienne a vu sa trajectoire vertueuse de croissance se transformer en une crise économique d’une ampleur inquiétante.
La situation a été telle que le pays s’est déclaré en défaut de paiement en décembre 2022 et a entamé des négociations avec le FMI. Pire, les réserves du pays tombant sous le seuil des trois mois d’importation de biens et de services, les autorités ont été obligées d’annoncer le règlement des importations des carburants par l’or dont le pays est le premier producteur du continent, en se réservant l’achat de 20% du métal jaune produit localement.
Presque à défaut de paiement, le Ghana peut désormais envisager l’avenir avec un peu plus de sérénité. Ce prêt aura des retombées positives sur l’économie ghanéenne. D’abord, il permettra une entrée de devises et l’amélioration des conditions pour obtenir d’autres prêts internationaux auprès de prêteurs privés et donc de rehausser les réserves en devises du pays. Des réserves qui ont connu une légère hausse grâce aux achats d’or par le gouvernement. Les réserves de la Banque centrale ghanéenne en or ont ainsi dépassé les 14 tonnes.
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En outre, l’amélioration du matelas de devises du pays va impacter positivement la monnaie locale, le Cedi, qui s’est fortement dépréciée en 2022 dans le sillage de la crise économique que traverse le pays, perdant plus de la moitié de sa valeur vis-à-vis du dollar. Une situation qui a contribué au renchérissement des importations et donc à la flambée des prix des produits importés. L’amélioration des réserves de change du pays devrait ainsi avoir un impact sur l’inflation.
Le déblocage du prêt du FMI, obtenu après les négociations sur la restructuration de la dette du pays auprès des créanciers du G20, éloigne le spectre du défaut de paiement. Avec un taux d’endettement estimé à 105% du PIB, le pays est considéré comme surendetté, les autorités doivent gérer cet endettement afin de le ramener à un niveau acceptable, soit sous la barre des 70% du PIB.
Au delà du problème de gestion de la dette, le prêt de 3 milliards de dollars est une sorte de gage de réformes structurelles à même de remettre l’économie ghanéenne sur la voie d’une croissance durable et forte devrait réconcilier le Ghana et les prêteurs étrangers.
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Seulement, si cet apport aura des impacts économiques, il risque aussi de fragiliser les couches les plus vulnérables de la population. Et pour cause, le prêt du FMI est soumis à la mise en place de réformes structurelles. En premier lieu, figurent en bonne place celles concernant le budget de l’Etat, notamment la réduction des dépenses et l’amélioration des recettes.
Du côté de la réduction des dépenses, l’Etat doit baisser son train de vie, mais aussi réduire les subventions sur certains produits, notamment les carburants et certains produits alimentaires. Une situation qui risque d’entretenir le spectre inflationniste alors qu’on commençait à sentir le ralentissement de l’inflation.
Parallèlement, l’Etat doit accroitre ses recettes budgétaires, synonyme de hausse des taxes et impôts du fait de l’étroitesse de l’assiette fiscale due à la prédominance du secteur informel. Cette réforme budgétaire risque d’impacter négativement les populations.
En outre, la poursuite souhaitée de la politique restrictive de la Banque centrale du pays pour combattre l’inflation risque aussi d’avoir des répercussions négatives sur la croissance en augmentant dangereusement le taux directeur et par ricochet les loyers d’argent des banques commerciales.
Déjà, suite à une énième hausse en mars dernier de 150 points de base, le taux directeur de Bank of Ghana s’établit à 29,5%, avec un impact négatif sur les taux appliqués par les banques commerciales sur les particuliers et les entreprises. Dans le même sillage, la recommandation du FMI visant le renforcement de la flexibilité du taux de change en vue de reconstituer les réserves de devises du pays risque de fragiliser davantage la monnaie locale et entretenir l’inflation déjà très élevée, mais en recul depuis le début de l’année en cours en s’établissant à 45% en avril dernier, contre 43,6% en janvier 2022.
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En tout cas, cette bouffée d’oxygène vient à point nommé pour le président Nana Akufo-Addo qui achèvera, en 2024, son second et dernier mandat. Englué dans une crise économique aigüe, le président ghanéen, qui avait annoncé au début de son mandat sa volonté de ne pas faire appel au FMI, a fini par ravaler sa parole en demandant secours au pompier FMI. Une situation qui va certainement fragiliser son parti lors des prochaines joutes électorales et qui aura à en découdre avec l’ancien président et rival historique John Mahama, désigné candidat par le principal parti d’opposition, le Congrès national démocratique (NDC).