Réintroduction de 70 rhinocéros blancs au Rwanda: des cornes qui valent leur pesant d’or

Premiers pas au Rwanda. Un rhinocéros blanc hésitant, découvrant son nouvel habitat sécurisé.

Le 14/06/2025 à 14h10

VidéoLe Rwanda vient de réintroduire 70 rhinocéros blancs dans le Parc national de l’Akagera. Cette réserve, située au nord-est du pays, a accueilli environ 54.000 visiteurs en 2023, générant près de 4,8 millions de dollars de revenus.

Le grondement sourd des camions s’est fondu dans le paysage paisible de l’Akagera. À bord, 70 rhinocéros blancs venus d’Afrique du Sud. Ces géants paisibles, parmi les espèces les plus menacées du continent, ont trouvé un nouveau sanctuaire au Rwanda, dans le parc national de l’Akagera. Une opération d’envergure, symbole de l’engagement continu du pays en faveur de la biodiversité.

“Les 70 rhinos que nous avons accueillis font partie d’un programme de réintroduction des animaux dans leur milieu naturel”, explique Ladislas Ndahiriwe, directeur général de l’Akagera Management Company. “African Parks, avec qui nous travaillons, a racheté une ferme de 2000 rhinocéros blancs en Afrique du Sud avec l’objectif de les réintroduire sur dix ans. Grâce à notre expérience et surtout à notre sécurité, nous avons été le premier pays choisi.”

Dans un contexte où le braconnage fait toujours rage en Afrique australe, le choix du Rwanda ne doit rien au hasard. “Ici, leur sécurité est à 100% garantie”, insiste M. Ndahiriwe.

La population de rhinocéros blancs en Afrique est estimée à environ 18.000 individus répartis essentiellement en Afrique du Sud, au Kenya, en Namibie et au Zimbabwe.

Depuis 2015, le Rwanda a réintroduit progressivement les Big Five dans le parc de l’Akagera: lions, éléphants, buffles, léopards, et rhinocéros noirs. Cette dynamique a culminé en 2021 avec l’arrivée d’un premier groupe de 30 rhinocéros blancs, qui se sont multipliés pour devenir 41. L’ajout récent de 70 individus renforce encore l’image d’un pays résolument tourné vers la préservation de son patrimoine naturel.

Depuis la réintroduction progressive des Big Five, le parc connaît une croissance spectaculaire. En 2010, l’Akagera enregistrait seulement 8.800 visiteurs; en 2018, ce chiffre avait grimpé à 44.000, et en 2023, le parc a accueilli environ 54.000 visiteurs, générant près de 4,8 millions de dollars de revenus, couvrant ainsi 92% de ses coûts d’exploitation. 

Comparé à 2010, cela représente une multiplication par six des recettes touristiques, ce qui positionne l’Akagera parmi les parcs africains les plus performants en conservation génératrice de revenus, tout en maintenant un modèle de tourisme responsable.

“Le parc national de l’Akagera est véritablement devenu une destination de choix”, confirme Eugène Mutangana, expert en conservation au Rwanda Development Board. “Il est particulièrement gratifiant de constater que les Rwandais représentent désormais plus de 54% des visiteurs du parc. Le tourisme est un pilier de notre économie nationale, et cette réintroduction consolide notre statut de destination écotouristique de premier plan.”

Mais les bénéfices de cette stratégie ne s’arrêtent pas à la faune. Sur le terrain, les populations riveraines constatent les retombées positives. Pudence Rubingisa, gouverneur de la province de l’Est, le souligne: “Grâce à la redistribution des revenus touristiques, les communautés bénéficient d’infrastructures nécessaires comme des écoles, des centres de santé, des routes, de l’eau potable… Et cela transforme littéralement leur vie.”

Le parc de l’Akagera, autrefois en déclin après le génocide des tutsi en 1994, est aujourd’hui le théâtre d’une renaissance spectaculaire. Avec l’appui d’African Parks et l’implication constante des autorités rwandaises, il incarne une nouvelle philosophie: celle d’un développement durable au service de la nature et des hommes.

À l’avenir, les responsables du parc ambitionnent d’introduire d’autres espèces, d’élargir les circuits touristiques et de renforcer les programmes de sensibilisation auprès des jeunes. L’objectif est clair: faire de l’Akagera un modèle africain de conservation intégrée.

En réintroduisant les Big Five, en garantissant la sécurité des espèces, et en plaçant les communautés locales au cœur de la stratégie, le Rwanda fait bien plus que préserver des animaux. Il trace la voie d’un avenir où la nature, l’économie et l’humain cohabitent harmonieusement selon les analystes.

Établi en 1934 en tant que parc national, l’Akagera est l’une des plus grandes zones humides protégées d’Afrique centrale et le dernier refuge du Rwanda pour les espèces adaptées à la savane.

Par Fraterne Ndacyayisenga
Le 14/06/2025 à 14h10