Tunisie: 86% des PME n’emploient qu’une seule personne !

DR

Le 16/05/2023 à 16h45

Les Petites et moyennes entreprises (PME) tunisiennes traversent une situation difficile. Les obstacles ont été présentés en marge d’une conférence de presse au cours de laquelle des chiffres inquiétants sur la situation de cette catégorie d’entreprises ont été dévoilés. La problématique d’accès au financement est l’un des problèmes fondamentaux des PME avec des conséquences néfastes sur leurs propres dirigeants.

A l’instar de l’économie tunisienne, en crise depuis une douzaine d’année, les Petites et moyennes entreprises (PME) du pays souffrent autant. N’ayant pas les moyens de faire face à la morosité économique que le pays traverse depuis la révolution des jasmins, elles ont été également durement touchées la pandémie du Covid-19 et ses impacts sur l’économie tunisienne. A ces difficultés se sont greffés les effets de la crise Russie-Ukraine qui ont entrainé des déséquilibres macroéconomiques et exacerbé les difficultés rencontrées par cette catégorie d’entreprise en affaiblissant leurs performances et leur santé financière.

Ainsi, selon les données présentées lors d’une conférence de presse, le 15 mai à Tunis, la représentante de la Plateforme tunisienne des alternatives, Leila Riahi a avancé des chiffres terrifiants sur l’état des PME tunisiennes qui représentent de loin l’essentiel du tissu économique du pays.

Sur les 750.000 unités, selon les données avancées, 86% des PME n’emploient qu’un seul salarié en la personne du propriétaire, 8% emploient 2 personnes, 3% comptent plus de 10 employés, 0,5% comptent plus de 50 salariés et seulement 0,001% ont un effectif de plus de 200 collaborateurs, selon les données reprises par Tunisie Numérique. C’est dire que les PME tunisiennes sont essentiellement des Très petites entreprises (TPE).

Autant de fragilités attestées par une enquête menée auprès d’un échantillon de 1.500 PME. Il en ressort que ces entreprises souffrent de nombreux maux, particulièrement l’accès au financement. La situation de ces entreprises est telle qu’elles font face à des défis quotidiens pour survivre. Cela est encore plus vrai pour celles qui ne sont pas implantées dans la capitale, 94% des aides et des lignes de crédits revenant aux PME ayant élu domicile à Tunis.

Selon l’enquête menée auprès des PME, et révélée par Abderrazek Hous, porte-parole de l’Association tunisienne des petites et moyennes entreprises, cité par Tunisie Numérique, 27% des propriétaires de ces entreprises avancent que les procédures administratives pour l’ouverture d’un compte bancaire sont compliquées. Et une fois cette étape dépassée, l’accès au financement est un véritable parcours du combattant. En effet, les banquiers tunisiens, conscients de la fragilité structurelle des PME, dont le taux de mortalité est élevé, exigent de l’emprunteur une garantie pouvant représenter entre 200 et 400% du montant du crédit sollicité.

En plus, l’étude d’un dossier de crédit d’une PME tunisienne prend énormément du temps. Toujours selon l’enquête, les dossiers de crédit de 60,5% des PME ne sont étudiés qu’au bout de 3 mois après leur dépôt. Conséquence, ce délai s’avère trop long pour une PME qui doit supporter des charges fixes. Et malheureusement, d’après l’enquête, 99,6% des propriétaires de PME tunisiens se sentent dépendants des banques pour faire face aux problèmes de financement.

Conséquences, les nombreux patrons de PME qui émettent des chèques sans provision, à cause de ces lenteurs, se retrouvent souvent pris dans les filets de la justice. Ainsi, d’après les résultats de l’enquête, des poursuites judiciaires ont été engagées à l’encontre de 90,3% des propriétaires des PME pour émission se chèque sans provision.

Face à cette situation, les PME tunisiennes souhaitent une intervention urgente de la part des autorités pour les soutenir. Pour alléger les difficultés d’accès au financement, la Banque mondiale a accordé, en février dernier, un prêt de 120 millions de dollars, au titre du Projet d’appui au redressement économique des PME, visant à contribuer à remédier aux problèmes de liquidité auxquels est confrontée cette catégorie d’entreprises. Ces prêts seront rétrocédés par le ministère des Finances aux institutions financières qui acceptent d’octroyer de prêts aux PME.

Enfin, il faut souligner qu’en dépit de la taille et des difficultés que connaissent les PME tunisiennes, elles occupent une place centrale dans l’économie tunisienne. Les PME représentent 50% du PIB et sont à l’origine de 70% des emplois du secteur privé du pays.

Par Karim Zeidane
Le 16/05/2023 à 16h45