Guinée: la commission électorale nationale devient bicéphale

Bakary Fofana, président de la CENI Guinée.

Bakary Fofana, président de la CENI Guinée.. DR

Le 06/07/2017 à 10h28

La Commission électorale nationale indépendante (CENI) se retrouve avec deux présidents. En effet, Bakary Fofana, évincé de son poste au profit de Salif Kébé, ne reconnaît pas sa destitution. Jusqu’à quand durera le bicéphalisme de l’institution en charge de l’organisation des élections en Guinée?

Alors qu’il a toujours évité les médias, Bakary Fofana communique soudain. Et ce, depuis sa destitution mardi 4 juillet du bureau exécutif de la CENI. Quelques heures seulement après l’élection de Me Salif Kébé au poste de président de l’institution, Fofana s’est fendu d’un communiqué dans lequel il souligne que toute décision issue de la plénière extraordinaire du mardi 4 juillet est nulle et sans effet.

Bakary Fofana a indiqué que les motifs invoqués par les 2/3 des commissaires, "à savoir le refus du président de signer l’acte de création de la cellule de suivi", ne tiennent nullement et ne sauraient justifier la tenue de la réunion 4 juillet. A propos de cette cellule de suivi, Bakary indique qu’il a signé, le 29 juin dernier, la décision de sa création. Il dit l’avoir signé après une plénière d’apaisement tenue le 21 juin. Du coup, estime-t-il, cette cellule ne devrait plus faire l’objet d’une réunion.

Bakary indique que le fait de se réunir "sans respecter les conditions formelles relatives à la tenue de la plénière" constitue d’ores et déjà une violation de la loi. Par contre, au lieu d’une cellule de suivi, les 18 commissaires contestataires parlent plutôt d’un Comité de trésorerie mis en place pour gérer les ressources financières de l’institution. Eux qui, depuis des mois, dénoncent la gestion opaque du président élu en 2012.

Ce mercredi, le président destitué a été conforté par un soutien de certains membres de la société civile. "Les commissaires ont profité consciemment de la faiblesse de l’article 17 de la loi 016 sur la CENI -qui permet aux 2/3 des membres de renouveler totalement ou partiellement le bureau- pour remplacer Bakary Fofana, sans motif valable", estime Mohamed Kaba, président de l’Observatoire citoyen de défense des droits des citoyens. Kaba parle de conspiration et de rébellion contre leur collègue– Bakary est issu de la société civile. Par conséquent, les organisations de la société civile qui ont manifesté mercredi devant la CENI, trouvent qu’il serait mieux de dissoudre l’institution. Cependant, les frondeurs n’abdiquent pas, et ils croient en avoir bien en finir avec Bakary Fofana à la tête de la CENI. Pour Etienne Soropogui, directeur des opérations de l’institution, la page Bakary est même déjà tournée. "Cette CENI dirigée désormais par Me Salif Kébé à toutes les capacités pour organiser les élections locales avant 2018", a indiqué Soropogui alors qu’il intervenait mercredi matin sur une radio de la place.

Mercredi, chacun des deux présidents a dirigé à partir de son bureau habituel. Mais dans ce bras de fer, le poids de Bakary ne se mesure pas avec celui de son rival. Puisque 18 des 22 membres actifs de l’institution sont avec Salif Kébé. "Il peut continuer à occuper son bureau. Ce n’est pas le bureau qui fait le président, mais les hommes", estime Charles André Soumah, chargé de la communication de la CENI. A la question à savoir comment se fera la passation de service, le chargé de la communication indique "qu’elle sera faite si nécessaire".

Par Mamourou Sonomou (Conakry, correspondance)
Le 06/07/2017 à 10h28