Miss Guinée: jugé trop dénudé, le concours 2017 choque une Guinée puritaine

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Le 14/02/2017 à 07h56, mis à jour le 14/02/2017 à 09h23

La dernière élection de Miss Guinée a fait suspendre l'organisation de tout concours national de beauté dans le pays. Tout est partie de la miss élue que certains Guinéens n'ont pas trouvé à leur goût. De fil en aiguille, on en est arrivé à l'indignation face à la "tenue de vérité".

Cette "tenue de vérité" n'a pas fini de faire parler d'elle. C'est en effet la dénomination choisie par le comité d'organisation pour désigner le défilé en maillot de bain de Miss Guinée. Mais c'était sans tenir compte de la réalité d'un pays visiblement plus puritain que ses voisins ivoirien et sénégalais. 

Un jour après l'élection d'Asmaou Diallo comme Miss Guinée 2017, les autorités guinéennes dénoncent une atteinte à l'image " sacrée "de la femme guinéenne. Une "faille regrettable" que le ministre de la Culture n'a pas voulu pardonner. En conséquence, il a suspendu le contrat liant son ministère au COMIGUI (Comité Miss Guinée), le comité d'organisation des concours de beauté en Guinée.

Le ministre de la Culture a aussi suspendu toute organisation de concours Miss à dimension nationale. Siaka Barry, a annoncé l'élaboration d'un nouveau cahier de charges qui va désormais définir les conditions d'organisation des concours de beauté en Guinée. Un nouveau code d'éthique et de déontologie est aussi annoncé.

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Organisé samedi dernier, la cérémonie d'élection de la "plus belle femme" de Guinée a provoqué l'émoi de nombreux Guinéens. Dans les cafés comme sur les réseaux sociaux, des Guinéens ont dénoncé une atteinte aux bonnes moeurs du pays. Les internautes guinéens ont publié des images de jeunes filles dénudées qu'ils ont accompagnées de commentaires virulents. Le Premier ministre et certains membres du gouvernement présents à la cérémonie ont été vivement critiqués. " Ils n'accepteront jamais que leurs propres filles soient dans ce groupe. Quel dirigeant ! ", s'exclame Touré, sur Facebook. " Où va-t-on, Guinéennes ? ", interroge Safiana Camara, une autre utilisatrice de Facebook.

Dans les cafés, c'est l'angle islamique qui motive la plupart des réactions contre le port de la tenue de vérité par les candidates à l'élection miss en Guinée. D'ailleurs, dans ce pays à majorité musulmane, l'élection miss est souvent assimilée à de la prostitution par beaucoup de familles.

La société civile s'apprêtait à se prononcer sur l'élection Miss Guinée 2017 quand le gouvernement a rendu public sa décision. "Pour nous, les valeurs culturelles de la Guinée ne se retrouvent pas dans la nudité de la femme. Dans notre culture, il y a des façons de montrer le caractère sexy de la femme qui ne s'accommodent pas avec cette nudité à ciel ouvert ", s'indigne Hassane Hilal Sylla, coordinateur national du Mouvement jeunesse active de Guinée. "Nous ne souhaitons pas une suppression du concours Miss Guinée, mais nous demandons juste de revoir la façon de présenter la femme", précise Sylla pour qui l'on ne doit pas prendre le beau sexe pour un vulgaire objet. 

Cependant, même s'ils sont largement majoritaires, à côté des indignés, il y a ceux qui relativisent. "Je n'approuve pas la décision de Siaka Barry, parce que la Guinée ne vit pas sur une autre planète. C'est comme cela que l'élection miss se passe partout ailleurs", contre-attaque Sékou Sanoh. Au Sénégal voisin, pays à 95% de musulmans, l'élection Miss n'est jamais envisagé sans le fameux défilé de maillots de bain. 

"Cette décision veut nous faire comprendre qu'on ne va plus voir des Guinéennes assister à l'élection miss monde... Le débat est vraiment inutile ", estime Morlaye Soumah. "Dans les quartiers chauds de Conakry, on voit plus que ça... Les filles se promènent aujourd'hui seins nus et avec des robes transparentes ", dénonce, de son côté, Almamy Camara.

" Miss gorille "

Tout le débat est parti des premières images de la cérémonie montrant aux internautes la Miss 2017. Asmaou Diallo, mannequin de 24 ans, n'a pas du tout suscité des réactions positives sur les réseaux sociaux. "Comment nous présenter un tel gorille dans un pays de beautés comme la Guinée", dénigre Alpha Sylla, qui met en doute le professionnalisme du COMIGUI. 

Pourtant, samedi 11 février, la présidente du comité d'organisation s'était réjouie d'une "édition 2017 réussie"... Dans le camp du Comité d'organisation, on croit tout simplement être victime d'un règlement de comptes.

Par Mamourou Sonomou (Conakry, correspondance)
Le 14/02/2017 à 07h56, mis à jour le 14/02/2017 à 09h23