Dans cette localité de moins de 200.000 âmes, nombreux sont ces bars dédiés exclusivement à la consommation de ce vin. Sur place, nous rencontrons Fodé Amadou Soumah, qui confie prendre «chaque matin» le bandji, «parce qu'il est très important pour la santé». Entre autres vertus qu'il prête à ce breuvage produit dans la majorité des pays au sud du Sahara, il y a notamment son caractère orexigène, c'est-à-dire un stimulateur de l'appétit. Il permettrait également de «se débarrasser de certaines affections de l'estomac et de l'appareil digestif». Mais par dessus tout, le bandji règlerait, chez ceux qui savent en prendre avec modération, les problèmes d'impuissance sexuelle. C'est en tout cas ce que soutiennent ses adeptes.
Cette boisson alcoolisée, obtenue par fermentation naturelle de la sève de palmier à huile ou de cocotier, est aujourd’hui installée dans les habitudes culturelles de plusieurs ethnies guinéennes, informe Richard Léno, producteur et vendeur de vin de palme. «C'est notre propre coutume, depuis nos grands-parents, les Bagas, les Lélés, les Kissis (des ethnies de la Guinée, ndlr), nous sommes tous concernés par le bandji. C'est vraiment regrettable de voir les jeunes se livrer à l'alcool et d'autres stupéfiants. Sinon le bandji, c'est à base naturelle, tu peux le consommer sans constipation.»
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Quand il parle d'alcool, Léno exclut implicitement le bandji et ne fait allusion qu'à la bière ou aux liqueurs importées des autres continents. Pour lui, comme pour tant d'autres, le bandji n'est pas de l'alcool. C'est pourtant bel et bien le cas, car cette boisson contient en moyenne 5% d'alcool, soit un taux identique à celui de la bière et moindre que celui du vin de raisin qui est de 12%. C'est pourquoi, n'en déplaise aux amateurs du brevage, il faut en souligner le danger d'en surconsommer.
Le danger est aussi pour ceux qui récoltent la sève destinée à être transformée. Grimper sur ces cocotiers hauts de plusieurs mètres comporte des risques, mais Léno a appris à les maîtriser, malgré les souvenirs violents: «Dans ces palmiers, c'est Dieu qui m'a sauvé, parce que je suis tombé de l'arbre à quatre reprises, mais heureusement sans fracture. Toujours, je m'en sortais très bien.»
Aujourd’hui pour l’exploitant et revendeur de vin de palme, aussi appelé vin blanc en Guinée, cette activité rapporte assez d’argent. «Au moment où j'ai commencé à récolter, les 20 litres étaient vendus à 75 sily, c'était au temps de Sekou Touré. Ensuite au temps de Lansana Conté, le bidon est passé à 2.500 francs guinéens. Actuellement, les prix en gros, c'est 25.000 francs guinéens, pour les détails 60.000 francs guinéens», explique-t-il.