Mali: un journal se demande si l'Etat est encore souverain

DR

Le 29/09/2019 à 14h13

Le Mali, plongé dans une crise multidimensionnelle, politique, militaire et sécuritaire, sur fond de violence identitaire, qui s’est propagée du Nord vers le Centre «est il encore un Etat souverain»? Cette interrogation lancinante est celle de l’éditorialiste de «Carrefour» un journal de Bamako.

Elle découle d’une grosse peur nourrie par une série d’événements dans l’évolution de la situation de la «Nation» malienne enregistrés ces dernières années.

Le journal relève ainsi « trop d’impairs » de nature à donner du crédit à la thèse d’une souveraineté sous contrôle étranger depuis l’invasion des trois (3) régions du Nord par une rébellion réclamant l’indépendance de l’Azawad, supplantée par des groupuscules terroristes, chassés à leur tour par l’intervention de la France à travers l’opération « Serval ».

Parmi les faits inquiétants de nature à hypothéquer à l’indépendance du pays, l’éditorialiste de Bamako relève «la loi d’entente nationale votée en catimini par l’Assemblée Nationale le 19 juillet 2019.

Le nouveau texte accorde une immunité totale à ceux qui se sont retournés contre la main nourricière qui est la Nation malienne, soutenus dans ces multiples rébellions par la France, la Suisse, la Mauritanie, l’Espagne et l’Algérie.

Un accord signé le 20 mai 2015 à Bamako, dit Accord pour la Paix et la Réconciliation, imposé au président Ibrahim Boubacar Keita (IBK), qui semble sonner le glas de la République proclamée en 1960 par les pères de l’indépendance.

C’est la France qui nous dicte, désormais la conduite politique à tenir, car IBK lors de la campagne électorale pour la présidentielle de 2013, avait promis la large autonomie de Kidal à François Hollande (président français à l’époque), sans en référer au peuple. Notre armée nationale est phagocytée par un accord de défense qui l’a met sous la coupe réglée des forces françaises installées à Tessalit (Nord), cette autre base militaire occupée par la France, comme à Gao (Nord), Kidal(Nord), Sévaré (Centre) et Bamako (Sud).

Tout se dicte à partir de l’Elysée, à Paris, que ce soit la loi d’entente nationale, la révision constitutionnelle pour libérer Kidal du giron malien, la signature de l’accord d’Alger.

Voilà qu’un avant projet de loi pour introduire la justice musulmane dans notre arsenal judiciaire vient de voir le jour, sur ordre de la France.

L’ancienne puissance coloniale a fini d’imposer à IBK la réintégration de 74.000 combattants touaregs au sein des Forces Armées Maliennes. Un nombre exorbitant 5 fois supérieur aux effectifs de l’armée nationale.

Une tactique voilée afin de séparer Kidal du Mali, même au prix d’une guerre sans merci, entre deux (2) forces dont l’une va immédiatement bénéficier de l’aide de la France pour lui assurer la victoire totale dans la zone dite de l’Azawad».

En définitive « 59 ans après la déclaration d’indépendance par le président Modibo Keita, nous voilà retombés dans l’escarcelle des colonialistes français par la faute d’un homme qui est tout sauf un patriote».

Dans l’histoire, le Mali est la terre des grands empires ayant conquis de vastes territoires de l’Afrique de l’Ouest. Pour l’imaginaire populaire, l’empire dont le pays porte le nom, qui a prospéré au 14e et 15e siècle, est une grande fierté. Un passé glorieux aux antipodes de la situation actuel d’une République devenue le grand malade de l’Afrique de l’Ouest et du Sahel.

Par Cheikh Sidya (Nouakchott, correspondance)
Le 29/09/2019 à 14h13