Union africaine: Nasser Bourita en marathon diplomatique à Addis Abeba

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Le 02/07/2017 à 09h20, mis à jour le 02/07/2017 à 19h09

Grâce à un intense speed-dating diplomatique, Nasser Bourita a profité de la grand-messe des ministres des Affaires étrangères pour rencontrer plusieurs de ses homologues. Visiblement, il veut avancer ses pions afin d'être prêt le moment opportun pour le contrôle du Conseil Paix et Sécurité de l'UA.

A Addis Abeba, les diplomates n'ont pas le temps de se tourner les pouces. Nasser Bourita non plus. Le ministre des Affaires étrangères marocain, qui est à la tête d'une forte délégation, a provoqué plusieurs rencontres avec ses homologues africains afin de renforcer les relations bilatérales et confirmer leur soutien sur la question du Sahara. Tout cela s'inscrit dans une stratégie claire.

Le diplomate marocain sait que, malgré la réintégration du Maroc dans l'Union africaine, certains pays ne le portent pas dans leur coeur. L'Algérie et ses partenaires, soutiens des rebelles du Polisario, attendent la première occasion pour s'attaquer aux deux-tiers des membres de l'UA qui ne veulent pas entendre parler de la RASD. Par conséquent, il faut le rappeler aux partenaires en leur réaffirmant que le Maroc n'a pas l'intention de perturber la quiétude qui règne au sein de l'organisation continentale. Il n'est pas non plus naïf pour penser que la partie adverse ne lui mettra pas les bâtons dans les roues. 

On sent que la diplomatie marocaine avance ses pions à la manière d'un joueur d'échecs afin de remporter de petites victoires, pour faire échecs et mat le moment opportun. Pourquoi ne pas arracher dans quatre ans le puissant Conseil Paix et sécurité des mains de l'Algérie qui s'y accroche depuis la création de cet organe. 

Les rendez-vous avec ses homologues égyptien, zambien, nigérian ou comorien ont particulièrement occupé l'agenda du chef de la diplomatie marocaine, en marge de la session du Conseil exécutif de l'Union africaine. 

Avec le Nigeria et l'Egypte, l'heure est au renforcement des relations bilatérales à tous les niveaux, mais avec un accent sur certains points. Par exemple, avec Geoffrey Onyeama du Nigeria, c'est surtout le gazoduc qui a été au centre des discussions, les deux parties évitant soigneusement la question du Sahara marocain. L'heure est surtout "aux études de faisabilité", selon la partie nigériane. Ces études s'inscrivent justement dans le cadre de l'accord signé le 15 mai entre les deux pays. Le tout devant être suivi par l'ONHYM marocain et le NNPC nigérian, les deux organismes ou compagnies en charge des hydrocarbures. Bientôt, "une équipe marocaine dédiée à ce projet se rendra au Nigeria", a précisé Nasser Bourita. 

Avant d'en avoir terminé avec son homologue, il a insisté sur l'organisation d'une visite officielle à Rabat du ministre nigérian des Affaires étrangères, ce qui permettrait d'afficher au grand jour l'excellence des relations entre les deux pays. 

Il faut dire que tout est au beau fixe entre le Maroc et le géant ouest-africain, dont le soutien a été déterminant pour obtenir l'accord de principe de la conférence des chefs d'Etat de la CEDEAO en vue accepter le Maroc en tant que membre. Nasser Bourita ne s'est pas gêné de le rappeler dès le début de sa rencontre avec Onyeama. 

Avec Sameh Choukry d'Egypte, qu'il a tenu à rencontrer en pleine crise du Golfe, neutralité du Maroc oblige, les parties semblent avoir focalisé sur les questions concernant leurs intérêts directs comme l'accord d'Agadir sur le libre-échange. Ce dernier regroupe l'Egypte, le Maroc, la Tunisie et la Jordanie. Selon la presse égyptienne, Bourita aurait exprimé le souhait d'organiser une visite royale en Egypte pour aborder plusieurs sujets en profondeur. 

Le marathon diplomatique s'est poursuivi avec l'Union des Comores dont les relations avec le Maroc sont plus que chaleureuses. Une ambassade des Comores à Rabat devrait être ouverte bientôt. La construction des locaux est déjà prête, il ne reste plus que le choix du chef de la représentation à Rabat. Mais, avec ce pays dont une bonne partie des dirigeants sont formés au Maroc, la question du Sahara peut être abordée de façon frontale.

C'est sans embages que Bourita aborde le sujet exprimant le souhait qu'un jour l'Union africaine reflète la position des deux tiers des membres qui ne reconnaissent pas la RASD. Comme il l'a dit à plusieurs reprises, il est temps de mettre fin à une situation ubuesque qui fait qu'un organisme non reconnu par la majorié des membres s'assoie à la même table qu'eux. 

Enfin, Nasser Bourita a également eu un entretien assez long avec Harry Kalaba, ministre des Affaires étrangères de la Zambie. Ici, c'est le mémorandum d'entente signé lors de la visite du roi du Maroc en Zambie qui a été au centre des échanges. Le chef de la diplomatie zambienne a exprimé son souhait de renforcer les relations avec le Maroc dans tous les domaines de la coopération, notamment dans de nouveaux secteurs. Kalaba a insisté sur l'attachement de son pays à oeuvrer pour la "paix" et la "sécurité". Il faut s'habituer au fait qu'au niveau de l'Union africaine quand ces deux termes sont évoqués en présence du Maroc, l'Algérie n'est jamais loin. 

Par Mar Bassine Ndiaye
Le 02/07/2017 à 09h20, mis à jour le 02/07/2017 à 19h09