Bilan exceptionnel des 3 derniers périples du roi Mohammed VI en Afrique

Mohammed VI, roi du Maroc.

Mohammed VI, roi du Maroc. . DR

Le 14/03/2017 à 15h11, mis à jour le 14/03/2017 à 18h04

Visites historiques, discours de Dakar et d’Addis-Abeba qui font date, lancement de méga-projets structurants pour le continent, multiplication de partenariats multidimensionnels: autant d’actes qui donnent un sens à la coopération Sud-Sud dont le roi a fait un credo.

Les chiffres parlent d’eux-mêmes. Le roi Mohammed VI vient de boucler trois périples sur le continent africain. Entamés le 18 octobre 2016 à Kigali, ils se sont achevés ce mardi 14 mars à Abidjan, en terre ivoirienne. Ils ont été entrecoupés par la tenue de la COP22 à Marrakech avec à la clé le «Sommet africain de l’action», initié par le roi et qui a réuni une cinquantaine de chefs d’Etat, de gouvernement et de représentants des pays du continent à Marrakech, d'une part. Et d'autre part, par un séjour à Addis-Abeba pour assister au 28e Sommet de l’Union africaine marquant la réintégration du Maroc au sein de la famille africaine. C'est à cette occasion que Mohammed VI a prononcé un discours historique traçant la vision de la politique africaine du Maroc, après celui non moins historique prononcé à Dakar, au Sénégal, à l'occasion de la fête de la Marche Verte. Enfin, n'oublions pas une escale à Juba au Soudan du Sud. 

Mohammed VI, roi du Maroc, et Muhammadu Buhari, président du Nigeria.

Le bilan de ces périples est plus qu’exceptionnel du point de vue du nombre de pays visités, de la durée des séjours, du nombre de conventions et accords signés, du lancement des mégaprojets structurants et de la mise en chantier de projets à impact social.

En tout, ce sont plus de 51.000 kilomètres -à vol d’oiseau en reliant les capitales des pays visités-, soit plus de 1,25 fois le tour de la terre, que le souverain marocain a parcourus. Durant ces périples, il a rallié 12 capitales africaines: Kigali (Rwanda), Dar Es Salam (Tanzanie), Libreville (Gabon), Dakar (Sénégal), Addis-Abeba (Ethiopie), Juba (Soudan du Sud), Antananarivo (Madagascar), Abuja (Nigeria), Accra (Ghana), Lusaka (Zambie), Conakry (Guinée) et Abidjan (Côte d’Ivoire). Il a également effectué des visites privées à Zanzibar en Tanzanie et surtout à Antsirabe au Madagascar, la ville qui avait accueilli la famille royale durant son exil entre janvier 1954 et novembre 1955. Et comme l’a bien expliqué le roi, dans un entretien accordé à la presse malgache (Les Nouvelles), «chaque visite en Afrique est (pour moi) l’occasion de renouer avec les populations africaines que j’admire et respecte: elles m’enseignent la vraie richesse, celle du cœur».

Toutes ces visites revêtent des caractères multidimensionnels (politique, économique, solidaire, humanitaire, religieux, culturel, etc.).

Au niveau politique, ces périples sont intervenus après la décision prise par le royaume de réintégrer l’Union africaine lors du 27e Sommet de l’UA qui s’est déroulé à Kigali et durant lequel 28 pays africains avaient apporté leur soutien à l’initiative marocaine. En démarrant son périple en Afrique de l’Est, le roi s’est attaqué à une région jusqu’alors proche des thèses des séparatistes. Mais c’est surtout lors du second périple que le roi assena un sérieux coup aux soutiens du Polisario avec sa visite historique à Abuja, au Nigeria, ébranlant ainsi l’axe Alger-Abuja-Pretoria (Afrique du Sud), jusque-là très hostile à l’intégrité du royaume.

Il s’ensuivra, lors du troisième périple, une visite aussi historique à Lusaka en Zambie, la première du souverain dans cette région d’Afrique australe, jusqu’à présent acquise à la thèse séparatiste à cause de l’influence et des pressions algériennes et sud-africaines. Le retrait de la reconnaissance de la RASD par ce pays marque une rupture dans cette région.

Deux de ces trois périples ont précédé la réintégration du royaume au sein de la famille africaine qui s’est concrétisée le 30 janvier à Addis-Abeba, en terre éthiopienne. Occasion pour le roi du Maroc de prononcer un nouveau discours historique devant les dirigeants africains. «Il est beau, le jour où l’on rentre chez soi, après une trop longue absence! Il est beau, le jour où l’on porte son cœur vers le foyer aimé! L’Afrique est mon continent, et ma maison. Je rentre enfin chez Moi, et vous retrouve avec bonheur. Vous M’avez tous manqué», soulignera-t-il en guise d’introduction à son discours. Un discours qui intervient après celui tout aussi symbolique prononcé à Dakar à l’occasion de la célébration du 41e anniversaire de la Marche Verte.

Grâce à ces visites, le Maroc a consolidé son enracinement africain, réduit le camp des adversaires de l’intégrité du royaume et surtout permis d’étendre à d’autres régions du continent le modèle de coopération Sud-Sud prôné par Mohammed VI depuis son accession au trône. Un modèle de partenariat gagnant-gagnant salué aujourd’hui sur l'ensemble du continent et que d’autres essayent de copier, mais en vain.

A ce titre, au niveau économique, ou plus exactement de la diplomatie économique, ces trois périples ont été marqués par la signature de 168 conventions, accords et mémorandums entre le Maroc et les pays africains visités. Des accords portant sur des domaines variés pour lesquels le Maroc dispose d'expertises avérées: agriculture, tourisme, formation professionnelle, habitat, énergies renouvelables, logistique, transport aérien, nouvelles technologies de l’information, etc. Le dernier en date est celui du mémorandum d’entente pour la valorisation de la Baie de Cocody qui sera la vitrine d’Abidjan à l’horizon 2020 dans le cadre d’un projet piloté par le Marocain Marchica Med.

Depuis l’accession du roi Mohammed VI au trône, ce sont 1.024 accords et conventions dans différents domaines qui ont été signés entre le Maroc et les pays africains, contre 515 accords entre les deux parties sur la période 1956-1999. Preuve s’il en faut de l’intérêt que le roi porte au continent.

Ces accords ont facilité la multiplication des échanges commerciaux entre le Maroc et le reste du continent et ont contribué grandement à l’implantation des entreprises marocaines (Attijariwafa bank, BMCE Bank of Arica, Banque populaire, Maroc Telecom, Wafa Assurance, Saham Assurance, Holmarcom, Groupe OCP, Palmeraie Développement, Alliances Addoha, Lafarge Holcim Maroc Afrique, etc.) dans de nombreux pays africains où elles jouent des rôles clés dans un certain nombre de pays, notamment dans le domaine de financement des économies.

C’est dire qu’au niveau économique, le pragmatisme est la règle. Ainsi, ces visites ont été marquées par le lancement de mégaprojets structurants qui ne manqueront pas d’impacter positivement les pays et les régions est et ouest du continent africain. Ainsi, en Ethiopie, le Groupe OCP, leader mondial des phosphates, a lancé la construction d’une méga-unité de production d’engrais d’un coût de 2,5 milliards de dollars sur une aire de 100 hectares, avec la possibilité d’étendre, à terme, ce projet pour un investissement global pouvant atteindre 3,7 milliards de dollars. Ce qui permettra d’accompagner le développement agricole de l’Ethiopie dont l’économie repose grandement sur l’agriculture et l’élevage.

Outre l’Ethiopie, le groupe OCP et le Nigérian Dangote Industrie limited, du milliardaire Aliko Dangote, l’homme le plus riche d’Afrique, vont investir 2,5 milliards de dollars pour la production d’engrais au Nigeria et au Maroc. De même, le Groupe OCP fournira annuellement au Nigeria 2 millions de tonnes d’engrais par an durant 3 ans. Ce qui va contribuer au développement agricole de la première économie africaine qui cherche à diversifier son économie en développant son agriculture et réduire sa dépendance vis-à-vis des importations des produits agricoles.

D’autres projets ont été lancés durant ce périple dont l’implantation d’une unité pharmaceutique par Cooper Maroc au Rwanda et le projet de valorisation du canal des Pangalanes à Madagascar. Il s’agit du plus grand canal au monde d’une longueur de 700 km et qui longe l’est de la grande ile. Le projet sera piloté également par Marchica Med.

Toutefois, le projet le plus ambitieux et dont l’impact régional est considérable reste celui de la mise en place du gazoduc «Trans african pipeline». Celui-ci traversera toute la côte ouest-africaine pour relier le Nigeria et l’Europe via le Maroc. Il permettra au Nigeria, grand producteur de gaz, et les futurs producteurs de gaz de la côte ouest-africaine (Côte d’Ivoire, Ghana, Sénégal Mauritanie, etc.) d’exporter plus facilement leur production vers le continent européen.

Ces projets structurants répondent à la vision du roi pour le continent. «Au cours de mes visites en Afrique ou à travers les projets que j’y initie, il ne s’agit nullement de donner des leçons; je propose plutôt que nous partagions nos expériences», a t-il expliqué (Les Nouvelles -Madagascar).

C’est dans cette optique que s’inscrit d’ailleurs l’engagement d’arrimer l’économie marocaine à celle des économies ouest-africaines en sollicitant une adhésion à part entière du Maroc à la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO), une communauté de 15 Etats, quelques semaines après la réintégration dans l’Union africaine. Elle s’inscrit aussi dans l’optique de raffermir les relations économiques entre l’Afrique de l’Ouest et l’Afrique du Nord avec l’initiative annoncée au Nigeria et visant à la création d’un forum Afrique du Nord-Afrique de l’Ouest.

Outre les volets politique et économique, le volet religieux aussi a occupé une place importante dans les visites du roi en Afrique, un continent touché par l’extrémisme religieux contre lequel l’islam modéré du Maroc est aujourd’hui cité comme un rempart. Outre la formation des imams de nombreux pays africains, les périples du roi ont été aussi l’occasion du lancement de construction de mosquées. C’est le cas en Tanzanie, à Madagascar et en Côte d’Ivoire. Mais aussi la distribution de plusieurs dizaines de milliers d’exemplaires du saint Coran aux mosquées des pays visités.

Au niveau social, outre la réalisation des centres de formation professionnels au profit des jeunes, les visites royales ont aussi été ponctuées par les lancements d’hôpitaux mère-enfants dans un certain nombre de pays (Madagascar, Côte d’Ivoire, etc.), l'installation d'un hôpital de campagne au Soudan du Sud, la distribution de lots de médicaments, etc.

Bref, à travers ces périples entamés avant la réintégration du Maroc à l’Union africaine, et poursuivis depuis jusqu'à l'achèvement du dernier, aujourd'hui, le roi montre une fois de plus que son engagement africain n’est pas opportuniste, mais témoigne d'une volonté réelle de construire un partenariat gagnant-gagnant entre le Maroc et le reste du continent.

Pour preuve de l’intérêt que porte le roi au continent, depuis son ascension au trône, l'étape ivoirienne (la dernière de ce périple) est la 51e du souverain en Afrique pour 28 pays visités.

Par Moussa Diop
Le 14/03/2017 à 15h11, mis à jour le 14/03/2017 à 18h04