Mauritanie: inquiétude du leader des FPC face à la montée des périls

Samba Thiam, président des Forces progressistes pour le changement (FCP).

Samba Thiam, président des Forces progressistes pour le changement (FCP).. DR

Le 06/03/2017 à 18h01, mis à jour le 06/03/2017 à 18h14

La Mauritanie traverse une période critique. Le président des Forces progressistes pour le changement (FCP) a tenu à en informer les parlementaires de l’Union européenne via une lettre dans laquelle il revient sur les grands maux du pays.

Montée de l’intolérance et du péril islamiste violent, 3e mandat présidentiel et diplomatie incohérente dans le cadre des rapports avec les voisins: la Mauritanie accumule les problèmes qui concourent à son instabilité.

D'où la vive inquiétude qui transparaît dans une lettre du président des Forces progressistes pour le changement (FPC) -ex Forces de libération africaine de Mauritanie (FLAM), adressée à une délégation du Parlement de l’Union Européenne (UE), qui a séjourné récemment à Nouakchott, dans le cadre des consultations au titre des accords de Cotonou (UE/ACP).

Dans sa correspondance, Samba Thiam souligne «une montée de l’islamisme radical, devenu un véritable défi. Depuis l’avènement du régime actuel, les médias relaient des discours religieux à caractère violent et intolérant qui circulent dans les mosquées qui se multiplient. Tous les 100 mètres on entend des prêches faisant le lit du salafisme. Des associations des «Amis du Prophètes» multiplient les marches appelant à l’exécution de M’Kheitir, un jeune blogueur, et profèrent des menaces ouvertes d’assassinat à l’encontre de son avocat. Une sorte de terrorisme intellectuel s’installe, les penseurs libres sont harcelés, pris de peur».

La lettre cite en exemple les cas d’Aminetou Mint Moctar et de Mint Brahim, deux dames actives dans la société civile, refusant le conformisme «ouvertement attaquées au su et au vu des pouvoirs publics qui laissent faire.

La lutte contre le terrorisme est plus proche du faire-semblant que de la réalité. Si en surface, le régime déclare se battre contre le terrorisme, dans les faits il semble plutôt flirter avec les forces qui le nourrissent».

Le 3e mandat, un autre point explosif

La correspondance du leader des FPC aborde également la question d’un éventuel troisième mandat du président Mohamed Ould Abdel Aziz qui malgré des déclarations publiques allant dans le sens contraire, ne semble pas avoir totalement renoncé au projet de se représenter.

«Il avait procédé par ballon d’essai, puis tenté d’en imposer l'idée à travers le dialogue national de septembre/octobre 2016. Pour l'heure, le président chercherait à négocier un troisième mandat par l’achat des consciences».

En Mauritanie, le nombre de mandats au poste de président de la République est limité à deux et cette limitation est garantie par trois clauses d’éternité, gravées dans le marbre: les articles 28,29 et 99 de la Constitution du 20 juillet 1991, modifiée par voie référendaire le 19 juin 2006.

Diplomatie brouillonne

La lettre destinée aux députés européens, pose également la difficile équation des relations entre la Mauritanie et les Etats voisins, caractérisées par «une diplomatie ambivalente, suffisante et pleine de maladresses, qui se veut participative aux missions onusiennes de maintien de la paix (Côte d’Ivoire et Centre Afrique), mais entretient un climat de suspicion et de tension dans le voisinage immédiat. Avec le Mali, il y a un déficit de confiance, à juste raison. Même cas de figure avec le Maroc. La tension larvée et permanente avec le Sénégal est sciemment entretenue. Problème de leadership avec l’Algérie». 

Bref, dirigé par un homme «qui n’a jamais pu se départir de ses réflexes de général», le pouvoir de Nouakchott est accusé de fouler aux pieds les libertés fondamentales et d’être un véritable obstacle «à l’émergence d’un Etat de droit», avance Samba Thiam.

Par Cheikh Sidya (Nouakchott, correspondance)
Le 06/03/2017 à 18h01, mis à jour le 06/03/2017 à 18h14