Fatimata Mbaye, lauréate du prix «Femmes courageuses 2016» se livre

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Le 20/04/2016 à 12h26, mis à jour le 20/04/2016 à 13h35

La célèbre avocate mauritanienne, Fatimata Mbaye, nouvellement lauréate du prix «Femmes courageuses 2016» du Département d’Etat américain, s’est livrée à la presse mauritanienne. L’occasion de revenir sur son combat contre toutes les injustices et son refus de faire la politique politicienne.

Distinguée récemment par le prix «Femmes courageuses 2016» du Département d’Etat qui lui a été remis lors d’une cérémonie officielle par John Kerry à Washington, pour rendre hommage au combat des Femmes du monde qui se sont illustrées en faveur des droits humains, maître Fatimata M’Baye s’est ouverte à la presse nationale le mardi 19 avril courant.Lors de cette rencontre, l’avocate, présidente de l’Association mauritanienne des droits de l’Homme (ADMH) et ancienne vice-présidente de la Fédération internationale des ligues des droits de l’Homme (FIDH), a d’abord révélé avoir dédié son prix «à toutes les femmes mauritaniennes et aux défenseurs des droits humains».Il faut dire que le parcours de cette combattante n’a pas été toujours facile. Arrêtée en 1986 dans le cadre d’une répression féroce contre des cadres issus de la communauté négro-mauritanienne, composante ethnique non arabe de la Mauritanie, pendant qu’elle n’était encore qu’avocat stagiaire dans l’un des plus importants cabinets de Nouakchott à l’époque, maître Fatimata M’Baye a subi des tortures et autres privations qui ont marqué sa personnalité et son combat contre toutes les formes d’injustice.Revenant longuement sur son combat pour la promotion des droits humains, Me Mbaye a d’emblée voulue être claire. «Nous ne sommes pas des opposants au pouvoir et à la puissance de l’Etat. Notre vocation est de constituer un contre pouvoir pour exiger de ceux qui nous gouvernent le respect des libertés fondamentales à la fois sur le plan collectif et individuel».Elle s’est ensuite livrée à une vibrante plaidoirie pour une société ouverte, démocratique et basée sur le droit. «Nous continuerons à défendre la liberté et l’égale dignité de tous les mauritaniens dans l’intégralité des composantes nationales et la diversité du pays. L’Etat a un devoir de protection de tous les êtres humains vivant sur le territoire national».Indépendante depuis prés de 56 ans, la Mauritanie reste encore en proie à des problèmes politiques, économiques, sociaux ethniques et tribaux offrant souvent un terreau fertile pour des écarts avec les droits de l’homme. Une réalité qui a donné au combat de la brillante avocate une dimension régionale et mondiale.Certains confrères n’ont pas manqué de demander si Me Mbaye, après son prix n’est pas intéressée à occuper un portefeuille dans le gouvernement. La réponse est claire et limpide. «A ma sortie de la prison en 1988, ould Taya m’a proposé à trois reprises de devenir ministre et j’ai refusé. Et aujourd’hui, je suis toujours au point de départ. Je ne veux pas m’impliquer dans la politique politicienne. Je suis défenseur des droits de l’homme et pour cela je suis prête à me faire pendre», a souligné la présidente de l’AMDH.Et concernant son refus de la distinction que le président Mohamed Ould Abdel Aziz voulait porter à son honneur, elle explique qu’«en ce qui concerne un prix, je pense que je suis libre de recevoir le prix de telle ou telle autre personne en fonction du jugement que je fais à ce prix là. Quelle est la valeur de ce prix ? La valeur de la personne qui m’accorde le prix et pourquoi ce prix est accordé ? Ainsi, elle juge que si le prix «Femmes courageuses» est accordé à travers sa personne à toutes les femmes mauritaniennes, celui que voulait lui accorder le président mauritanien n’est porté qu’à sa personne.En plus, le problème du passif humanitaire et les libertés qui se détériorent avec l’emprisonnement des militants anti-esclavagistes –Birame Dah ould Abeid et Brahim Bilal Ramdane de l’IRA –Initiative pour la résurgence du mouvement abolitionniste. D’où son refus du prix.Enfin, rappelons que le prix «Femmes courageuses» est décerné tous les 2 ans par le Département d’Etat américain pour récompenser toutes les amazones du monde, attachées à un idéal, et engagées dans un combat pour changer la culture et la perception des droits humains dans leur environnement.

Par Cheikh Sidya (Nouakchott, correspondance)
Le 20/04/2016 à 12h26, mis à jour le 20/04/2016 à 13h35