Vidéo. Mauritanie: une manifestation à double enjeu prévue à Paris samedi

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Le 21/04/2017 à 18h19, mis à jour le 21/04/2017 à 18h27

VidéoLe Collectif des Mauritaniens de France (CMAF) appelle à une manifestation à Paris samedi 22 avril, pour perpétuer commémorer les victimes des déportations de 1989, mais aussi pour dénoncer l'exclusion des noirs par le recensement biométrique des populations, actuellement à l'oeuvre en Mauritanie.

Visiblement, la contestation des Mauritaniens noirs originaires de la région du fleuve gagne du terrain. Cette fois, c'est à Paris qu'ils ont décidé de sensibiliser l'opinion publique internationale. Ainsi, le Collectif des Mauritaniens de France (CMAF) appelle «tous les compatriotes et amis de la Mauritanie» à se joindre à un cortège prévu samedi après-midi à Paris, de la place du Trocadéro au Quai d’Orsay, dans une déclaration rendue publique vendredi 21 avril. 

Cette manifestation a deux buts, le premier étant axé sur le devoir de mémoire par rapport à l'injustice vécue par la population noire mauritanienne dans l'histoire récente. En effet, une grave crise s'était déclenchée entre la Mauritanie et le Sénégal, intervenue fin avril 1989, avec des affrontements ethniques ayant fait plusieurs centaines de victimes surtout du côté de la rive nord du fleuve Sénégal servant de frontière naturelle de ces 2 Etats. Elle avait déclenché de vastes opérations d’expulsions des ressortissants de chacun de ces pays.

Le régime de Nouakchott de l'époque a profité du contexte trouble de l’époque pour procéder à la déportation de plusieurs dizaines de milliers de négro-mauritaniens.

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Posted by Ousmane Dia on Thursday, April 20, 2017

Cette action avait été menée à l'aide de "hordes bien encadrées par les services de police, de gendarmerie et les forces armées". Les déportés étaient triés sur une base strictement raciale. Les Mauritaniens d'origine arabo-berbères "s’adonnaient à une chasse à l’homme bien particulière, celle des franges importantes de la composante noire", rappelle la déclaration du CMAF, qui ajoute qu’en deux mois "200.000 mauritaniens ont été chassés de leur pays vers le Sénégal et le Mali", sur une population qui ne dépassait pas 1,5 million d'habitants à l'époque.

Le préjudice causé à ces Mauritaniens noirs a été reconnu sous le régime civil du président Sidi Mohamed Ould Cheikh Abdallahi, qui a entamé une opération de rapatriement de ces populations fin janvier 2008, sur la base d’un accord tripartite signé par la Mauritanie avec le gouvernement du Sénégal et le Haut Commissariat aux réfugiés des Nations unies (UNHCR).

Poursuivie sous le magistère de Mohamed Ould Abdel Aziz, cette opération de rapatriement a permis le retour en Mauritanie de près de 25.000 déportés, selon des chiffres officiels.

Cependant, le CMAF soutient "qu’aujourd’hui, l’ignominie est en train d’être rééditée, à travers un enrôlement (recensement) à vocation d’état civil mais dont le déroulement et la nature montrent bien les vraies intentions de l’Etat mauritanien dirigé par le général Mohamed Ould Abdel Aziz, à savoir de perpétuer une nouvelle forme de génocide, cette fois par des moyens biométriques, à l’égard des mêmes populations". 

Ces opérations d’enrôlement ont officiellemment pour objectif de créer les conditions nécessaires à la délivrance de pièces d'identité sécurisées grâce à la biométrie, dans un contexte de lutte contre le terrorisme et le crime transnational.

Elles sont réalisées par l’Agence nationale du registre des populations et des titres sécurisés (ANRPTS), dirigée par un proche du président Mohamed Ould Abdel Aziz.

Par Cheikh Sidya (Nouakchott, correspondance)
Le 21/04/2017 à 18h19, mis à jour le 21/04/2017 à 18h27