Mauritanie: un mouvement lance le débat sur la laïcité

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Le 05/10/2019 à 13h12, mis à jour le 06/10/2019 à 13h15

Une organisation mauritanienne vient de lancer le débat pour une «Mauritanie laïque». Il s’agit d’un discours inédit dans une société largement traditionnelle, conformiste et attachée à la religion.

«Pour une Mauritanie laïque» est un mouvement lancé par des jeunes «désireux de fédérer tous les Mauritaniens» dans l’objectif «de déconstruire l’image d’une société tribale, ethnique et de caste», selon Mohamed El Moctar, responsable au sein de la nouvelle organisation, dont la vidéo diffusée sur «le Blog du Griot» est relayée par le forum «cridem.org».

Ces différents maux «sont source d’inégalités, discrimination et racisme. L’instrumentalisation de la religion est un moyen ayant permis de construire cette hiérarchisation injuste de la société. Ainsi, il faut commencer par sortir le culte religieux de la sphère politique, pour permettre l’ouverture d’un dialogue sensé et libre».

La Mauritanie est une République Islamique et la constitution confère à l’Islam le statut de religion de l’Etat et du peuple. Un principe immuable en dépit de toutes les modifications de la loi fondamentale opérées depuis 1961.

Dans ce contexte historique, le débat sur la laïcité n’a jamais été une préoccupation de la classe politique toutes mouvances confondues, et encore moins d’une opinion fortement attachée à la religion, considérée à travers ses dimensions spirituelle, politique, économique et sociale, indissociables.

Jusque-là, seule Conscience et Résistance (CR), une organisation de la diaspora, considérait la laïcité comme «indispensable» à l’instauration d’une véritable démocratie en Mauritanie.

Mais les lignes de la pensée semblent désormais bouger.

Ainsi, au moment où la vidéo revendiquant une Mauritanie laïque passe sur «cridem.org», la presse parisienne reprise par des organes nationaux, diffuse une interview du blogueur Mohamed ould M’Kheitir, un ancien condamné à mort pour «apostasie», réfugié en France.

Un entretien à travers lequel il déplore la situation d’une société mauritanienne «qui vit la talibanisation, avec des concepts tels que la flagellation, l’amputation, la peine de mort, toujours inscrites dans le Code Pénal (CP)».

L’ex-condamné à mort enfonce le clou en ajoutant, au pays «pas de mélange entre différentes castes. Dans la rue, chacun sait si quelqu’un est Beidane (caste des hommes libres: dirigeants, guerriers et marabouts), Maalimine ou Haratine….». Des propos qui renvoient l’image d’une société fortement cloisonnée.

Par Cheikh Sidya (Nouakchott, correspondance)
Le 05/10/2019 à 13h12, mis à jour le 06/10/2019 à 13h15