Le Congrès national africain (ANC) devrait renouveler sa confiance à M. Ramaphosa, 70 ans, gêné ces derniers mois par une affaire impliquant la découverte de liasses de dollars dissimulées dans un canapé de l’une de ses luxueuses propriétés.
Le président, qui reste très populaire, a échappé mardi au Parlement à un vote de destitution quand l’ANC majoritaire a fait corps autour de lui, imposant à ses élus de le protéger.
« On est à fond derrière Ramaphosa pour un second mandat. Il a réussi à limiter les dégâts dans un contexte difficile », estime auprès de l’AFP Elton Bantam, venu du pays xhosa (sud-est) au congrès de l’ANC, dans un centre de conférence près de Soweto.
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Même ses plus virulents détracteurs reconnaissent que Ramaphosa reste grand favori. Pas de quoi décourager Thami Chamane, 30 ans, un « camarade » zoulou, de donner sa voix au seul rival du président, son ancien ministre de la Santé Zweli Mkhize, un médecin zoulou de 66 ans, écarté en 2021 en raison d’accusations de corruption.
Salué pour son action contre la pandémie, Mkhize est mis en cause dans une affaire de détournement de millions d’euros, dans le cadre d’un contrat avec une société de communication chargée d’une campagne de sensibilisation sur le Covid. Selon les enquêteurs, l’argent aurait bénéficié notamment à M. Mkhize et à son fils.
Samedi soir, certains délégués de provinces acquises à M. Ramaphosa ont annoncé avoir basculé dans le camp Mkhize, levant des questions sur l’ampleur réelle de l’avance du président.
Il existe « un risque important » pour M. Ramaphosa, relève auprès de l’AFP la politologue Pearl Mncube. Il passe d’une situation où il était largement devant « à avoir Mkhize juste derrière lui, les jeux ne sont pas faits », estime-t-elle.
- « Cyril » talonné-
Plus de 4.000 délégués devaient voter en fin d’après-midi pour les sept plus hauts postes de l’ANC.
« On espère un processus fluide » pour pouvoir annoncer des résultats dans la soirée, a souhaité le porte-parole de l’ANC Pule Mabe devant la presse, précisant que le décompte des voix se ferait manuellement.
Plusieurs délégués, interrogés par l’AFP, tablaient plutôt pour des résultats lundi matin, voire à la mi-journée.
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Le profil du prochain vice-président est très attendu aussi, ce poste servant traditionnellement de rampe de lancement aux futurs présidents. Et si Ramaphosa était rattrapé par le scandale de Phala Phala --du nom de sa propriété où un cambriolage en 2020 a révélé les liasses embarrassantes--, la Constitution prévoit que ce soit son vice-président qui lui succède.
Pour l’heure, comme l’a rappelé à l’AFP Derek Hanekom, vieux routier de l’ANC, appeler Ramaphosa à se retirer en raison de la polémique alors qu’il n’est pas inculpé n’a pas de sens: « On n’a jamais fait ça à l’ANC ».
De récents sondages montrent que « Cyril », perçu comme un dirigeant affable et posé, reste apprécié des Sud-Africains. Bien plus que le parti historique, déchiré par des factions rivales et en perte de terrain dans les urnes depuis dix ans sur fond de chômage, d’inégalités vertigineuses, de criminalité et de crise énergétique.
En vue des élections générales de 2024, l’ANC n’a pas d’alternative crédible à Cyril Ramaphosa, qui reste son meilleur atout, relèvent de nombreux analystes.
Mais les tensions entre factions sont palpables, les rappels à l’ordre se sont multipliés au congrès.
Lors du discours de M. Ramaphosa vendredi soir, des dizaines de délégués l’ont interrompu, chantant, tapant sur les tables, mimant une moulinette avec leurs mains pour appeler au changement.
Ses partisans leur opposent un index et majeur levés, pour réclamer un deuxième mandat pour celui que Nelson Mandela avait désigné comme le plus doué de sa génération.