Afrique du Sud: le président Ramaphosa sera-t-il reconduit par l’ANC?

Cyril Ramaphosa, président de l'Afrique du Sud.

South Africa's President Cyril Ramaphosa laughs as he addresses Africa natinal Congress (ANC) delegates at the National Recreation Center (Nasrec) in Johannesburg on July 29, 2022 during the first day of the party's National Policy Conference. (Photo by PHILL MAGAKOE / AFP). AFP or licensors

Le 26/10/2022 à 08h26

A deux mois d’une conférence décisive de l’ANC, parti historique au pouvoir en Afrique du Sud, aujourd’hui divisé, le président Cyril Ramaphosa paraît affaibli alors qu’il veut être investi pour briguer un deuxième mandat lors des élections de 2024.

Un scandale lié à des liasses de billets retrouvées dans l’une de ses propriétés, lors d’un cambriolage en 2020, ternit l’image de celui qui se présentait comme un champion « mains propres » lorsqu’il a succédé à Jacob Zuma, lui-même tombé pour corruption, et le place sur la défensive.

Des experts sud-africains examinent les scénarios possibles:

Q: Ramaphosa peut-il encore être investi par l’ANC?

R: «Il reste le candidat le mieux placé», estime la politologue Susan Booysen. «Ramaphosa s’en sortira probablement mais le degré de certitude a baissé. Il reste clairement le favori mais sa crédibilité a été ébranlée comme jamais auparavant», nuance Eusebius McKaiser, commentateur politique.

«Il n’est pas dans la position la plus solide mais reste le plus à même de l’emporter», face à l’absence d’opposant bien positionné et grâce aux soutiens dont il continue à bénéficier au sein du parti, confirme Pearl Mncube, politologue au Frontline Africa Advisory.

Ramaphosa, ex-protégé de Nelson Mandela devenu un homme d’affaires richissime avant de revenir à la politique, est tombé de son piédestal.

«Avant, c’était une icône du combat pour nettoyer» le pays de la corruption, «un parangon de vertu, même s’il était issu du monde des affaires», souligne Mme Booysen. Le scandale lié à sa propriété de Phala Phala (nord-est) fait «douter de sa probité et rappelle qu’il n’est pas un surhomme».

Mais «malgré toutes les faiblesses de l’actuel président, si l’on compare aux autres candidats, il reste la meilleure chance» pour l’ANC de se maintenir au pouvoir, estime McKaiser.

De récents sondages montrent que l’ANC, qui est passé pour la première fois de son histoire sous la barre des 50% lors des élections locales en 2021, pourrait réitérer cette contre-performance en 2024.

Q: Qui sont ses opposants au sein de l’ANC?

R: Ils sont multiples mais pour l’instant, aucun nom ne fédère les oppositions à Ramaphosa.

L’ancien ministre de la Santé Zweli Mkhize, démissionnaire en août 2021 après avoir été accusé d’avoir détourné des budgets alloués aux campagnes de prévention du Covid, «a des chances», il reste populaire, estime Mme Booysen.

Les autres candidates connues, Lindiwe Sisulu et Nkosazana Dlamini-Zuma, «n’ont pas engrangé les soutiens dans les provinces, alors que Ramaphosa et Mkhize le font».

«Tous les autres candidats sont imparfaits, il n’y a donc pas de réelle menace» pour Ramaphosa, estime Eusebius McKaiser.

Beaucoup de délégués qui votent «sont conscients que leur propre carrière est liée à la réussite de l’ANC aux élections», souligne-t-il. Dès lors, «quelle que soit leur inclination, ils réfléchiront aussi, égoïstement, au candidat qui leur garantit les meilleures chances de conserver leur poste».

L’ANC n’a jamais été aussi contesté dans le pays et Ramaphosa étant «le moins mauvais des candidats», certains délégués pourraient «le soutenir», poussés par ce contexte, insiste-t-il.

Q: L’ex-président Zuma a récemment traité Ramaphosa de traître et de corrompu. Quelle influence peut-il avoir sur le vote ?

R: Elle est «moins importante que ce qu’il croit», estime McKaiser. La conférence de presse de Zuma samedi était «la diatribe d’un type cherchant désespérément à se poser en influenceur, pas la communication calme et persuasive d’un homme convaincu de son pouvoir», juge le commentateur expérimenté.

S’il avait une vraie influence, sa candidate, son ex-femme Nkosazana Dlamini-Zuma, aurait reçu le soutien de sa région, le pays zoulou, ce qui n’est même pas le cas, soulignent plusieurs experts.

Par Le360 Afrique (avec AFP)
Le 26/10/2022 à 08h26