La cérémonie est habituellement conduite en grande pompe au Parlement: tapis rouge, costumes chics et robes de stylistes, photographes. Puis le défilé de la garde présidentielle et 21 coups de canon saluent l’arrivée du chef de l’Etat. Mais le bâtiment historique du Cap ayant été en partie ravagé par un incendie criminel l’an dernier, le président s’exprimera dans la soirée depuis l’Hôtel de Ville.
Et dans une contexte économique et social en berne, des appels à la sobriété pour la réception facturée plus de 424.000 euros (8 millions de rands) ont essaimé sur les réseaux sociaux, «en signe de solidarité avec l’état réel de la nation».
Dans une Afrique du Sud rongée par un des taux de chômage parmi les plus élevés de la planète (32,9%), une prévision de croissance du PIB pour l’année quasi nulle (0,3%) et des familles écrasées par la hausse constante des prix des produits de base, la colère contre les pénuries de courant a gagné la rue.
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Ces dernières semaines, des manifestations ont éclaté dans plusieurs villes dont Johannesburg, à l’appel de l’opposition et des syndicats.
Mauvaise gestion et corruption
Depuis l’année dernière, la crise de l’énergie s’est aggravée dans la première puissance industrielle du continent, à la traîne dans la transition vers les énergies propres.
La compagnie publique Eskom, plombée par des années de mauvaise gestion et de corruption endémique sous la présidence de Jacob Zuma (2009-2018), est incapable de produire suffisamment d’électricité dans ses centrales au charbon vieillissantes et régulièrement touchées par des pannes.
Seul remède pour l’instant, des délestages programmés plusieurs fois par jour, forçant le pays tout entier à cuisiner, laver son linge et recharger son téléphone à certaines heures seulement.
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Les entreprises perdent chaque jour des centaines de millions de dollars, selon le premier parti d’opposition (DA, Alliance démocratique) qui fustige l’inefficacité du gouvernement à résoudre la crise.
Le Congrès national africain (ANC) au pouvoir a annoncé la semaine dernière avoir donné « des consignes claires » et sommé le gouvernement de déclarer l’état de catastrophe afin de débloquer des moyens.
Mais selon Dieter von Fintel, économiste à l’Université de Stellenbosch, cette mesure purement « symbolique » n’aurait pour seule vertu que de calmer une opinion déjà en perte de confiance, le réel problème résidant dans le fait que «la crise de l’énergie court-circuite toute tentative de relever l’économie et représente désormais une menace à la stabilité» sociale.
Le parti radical de gauche, l’EFF (Combattants pour la liberté économique), a notamment promis de perturber la prise de parole du président «délinquant». Embourbé dans un scandale au parfum d’argent sale, Cyril Ramaphosa a échappé à une procédure de destitution en décembre, soutenu par l’ANC. Une enquête de police est toujours en cours.
Le parti historique l’a réélu dans la foulée à sa tête, assurant le président de 70 ans, toujours populaire et qui reste son meilleur atout, d’un second mandat en cas de victoire de l’ANC aux élections générales de 2024.