Le gouvernement de Mogadiscio annonce avoir demandé à son ministère des Affaires étrangères «d’informer l’ambassadeur du gouvernement éthiopien en République fédérale de Somalie de retourner dans son pays pour des consultations».
Ce départ doit s’opérer «dans les 72 heures», a précisé le ministre des Affaires étrangères, Ali Omar Ali, dans un message sur X.
Le gouvernement ordonne également que les représentations éthiopiennes dans les régions du Puntland et du Somaliland ferment «d’ici deux semaines» et que leurs personnels éthiopiens quittent le pays «d’ici une semaine».
Ces décisions ont été prises «après avoir réalisé que le gouvernement éthiopien interfère ouvertement dans les affaires intérieures de la Somalie et viole la souveraineté de la Somalie», explique-t-il.
Elles interviennent au lendemain de la réception au ministère éthiopien des Affaires étrangères d’une délégation de la région semi-autonome du Puntland, qui a annoncé dimanche ne plus reconnaître «les institutions de l’Etat fédéral» somalien après que le parlement a adopté le passage à un régime présidentiel.
Les relations historiquement houleuses entre les deux pays se sont tendues depuis l’annonce le 1er janvier de la signature d’un « protocole d’accord » entre Addis Abeba et la région somalienne séparatiste du Somaliland prévoyant la location pour 50 ans à l’Ethiopie de 20 km de côtes somalilandaises.
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Mogadiscio a dénoncé un accord «illégal», une «violation de sa souveraineté» équivalente à une «agression».
Le gouvernement éthiopien n’avait pas répondu dans l’immédiat aux sollicitations de l’AFP.
Reconnaissance
Le contenu exact du «protocole d’accord» n’a jamais été rendu public.
Addis Abeba, qui a progressivement perdu son accès à la mer après l’indépendance en 1993 de l’Erythrée, a déclaré qu’il lui permettra de bénéficier d’une base navale et de «services maritimes commerciaux» sur le golfe d’Aden.
Les autorités somalilandaises ont affirmé qu’en échange de cet accès à la mer, l’Ethiopie allait devenir le premier pays à les reconnaître officiellement, ce qu’aucun n’a fait depuis que ce petit territoire de 4,5 millions d’habitants a unilatéralement proclamé son indépendance de la Somalie en 1991.
Le gouvernement éthiopien s’est jusqu’à présent contenté d’affirmer qu’il allait «procéder à une évaluation approfondie en vue de prendre position concernant les efforts du Somaliland pour obtenir sa reconnaissance».
Mogadiscio a exclu toute possibilité de médiation avec l’Ethiopie tant que cette dernière ne se sera pas retirée de son accord avec le Somaliland.
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Le regain de tensions entre les deux pays depuis le début d’année, dans une région en proie à l’instabilité chronique, a suscité l’inquiétude de nombreux pays et organisations internationales (Etats-Unis, Chine, Union européenne, Union africaine, Ligue arabe...) qui ont appelé au respect de la souveraineté somalienne.
Le président somalien Hassan Cheikh Mohamoud a également accusé Addis Abeba de déstabiliser le pays en donnant «une chance de renaître» aux islamistes radicaux shebab, que les autorités de Mogadiscio combattent depuis 2007.
Ce groupe affilié à al-Qaïda est un farouche ennemi de l’Ethiopie, qui a mené plusieurs interventions militaires anti-shebab en Somalie, et certains observateurs redoutent que le réveil d’un sentiment anti-éthiopien en Somalie ne leur bénéficie.
L’accord a également ravivé les crispations régionales.
L’Egypte, en conflit ouvert avec l’Ethiopie autour du Grand barrage de la Renaissance construit par Addis Abeba sur le Nil, a notamment multiplié les déclarations de soutien au gouvernement somalien.