Lors d’une déclaration devant le Parlement fin octobre, le Premier ministre Abiy Ahmed, qui n’a pas encore annoncé qu’il était à nouveau candidat, avait déclaré que «le gouvernement a la capacité et la volonté nécessaires pour mener à bien ces élections», assurant qu’elles seront les «mieux organisées» de l’histoire de l’Éthiopie.
Mais l’organisation du scrutin dans ce vaste pays, deuxième le plus peuplé d’Afrique avec 130 millions d’habitants, pose de nombreux défis.
Le nord connaît un regain de tensions entre le Tigré et la région voisine de l’Afar, avec le gouvernement fédéral en arrière-plan, qui met en péril un fragile accord de paix.
Une guerre civile avait ravagé de novembre 2020 à novembre 2022 le Tigré, opposant des rebelles du Front de libération du peuple du Tigré (TPLF) aux forces fédérales, appuyées par des milices locales et par l’armée érythréenne.
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Le conflit a fait, selon des chiffres de l’Union africaine que certains analystes estiment sous-évalués, 600.000 morts. Selon l’ONU, un million de personnes sont toujours déplacées.
Dans l’Oromia, vaste région qui enserre la capitale Addis Abeba et abrite environ un tiers des habitants du pays, les forces fédérales affrontent également depuis 2018 l’Armée de libération oromo (OLA), classée «organisation terroriste» par Addis Abeba.
Et en Amhara (nord), des Fano, milices populaires traditionnelles « d’autodéfense » de l’ethnie Amhara, ont pris les armes en avril 2023 contre le gouvernement pour protester contre la volonté des autorités fédérales de les désarmer.
Des pans du territoire échappent au contrôle des autorités fédérales, notamment dans les zones rurales de ces deux régions.
Finances et recensement
Mais pour Jonah Wedekind, de l’institut allemand Arnold Bergstraesser, «il est important pour le Premier ministre que ces élections aient bien lieu, aussi bien d’un point de vue de politique intérieure que pour la communauté internationale».
Pour le chercheur, il y a « déjà eu un précédent en 2021», lorsque les élections n’avaient pas pu se tenir sur tout le territoire, notamment au Tigré. «Cela peut se reproduire», affirme-t-il à l’AFP.
L’un des autres enjeux est la question du financement, dans un pays qui est sorti exsangue de la guerre au Tigré, et qui reçoit des aides du Fonds monétaire international (FMI) et de la Banque mondiale.
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Selon un diplomate en poste à Addis Abeba qui a requis l’anonymat, la commission électorale (Nebe) avait initialement prévu un budget de 150 millions de dollars (environ 130 millions d’euros), avec 50% provenant du gouvernement fédéral, et 50% de la part de bailleurs internationaux. «Mais très peu de partenaires sont prêts à s’engager», et le budget a été «revu à la baisse», à 100 millions de dollars, a-t-il ajouté.
Pour Jonah Wedekind se pose également la question de la représentativité, dans un pays où le dernier recensement remonte à 2007. «Le recensement est très important car il détermine le nombre de sièges pour chaque région», explique-t-il.




