La nature a horreur du vide. Le départ des forces françaises du Sahel est une aubaine pour les Russes, qui continuent à pousser leurs pions en Afrique, particulièrement en Afrique de l’Ouest. À ce titre, l’aide précieuse des paramilitaires russes de Wagner lors de la reprise de Kidal, la ville du nord du Mali dont l’armée avait perdu le contrôle depuis 2012, confirme cette dynamique.
Les deux autres pays de l’Alliance des États du Sahel (AES), le Burkina Faso et le Niger, semblent eux aussi décidés à jouer à fond la carte russe dans leur combat contre les jihadistes.
C’est dans cette optique que s’inscrit la visite du vice-ministre russe de la Défense, Iounous-Bek Evkourov, à la tête d’une délégation d’officiels russes dans les trois pays sahéliens. Celui-ci a visité, tour à tour, le Mali, le Burkina Faso et le Niger.
À noter que cette visite est la seconde entreprise par le haut gradé russe dans la région. En septembre dernier, il s’était rendu au Mali et au Burkina Faso.
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Au Mali, pays stratégique de la présence russe au Sahel, les échanges ont, en plus du volet militaire, concerné des projets de développement, notamment dans le domaine énergétique (renouvelable et nucléaire), les approvisionnements en engrais, blé et produits pétroliers, la mise en place d’un réseau de tramway ou encore l’exploitation minière.
Mais au Niger, où il s’agit de la première visite officielle d’un membre du gouvernement russe depuis le coup d’État du 26 juillet dernier, les deux parties ont procédé «à la signature de documents dans le cadre du renforcement de la coopération militaire» bilatérale.
Dans les trois pays, les entretiens ont surtout porté sur la coopération bilatérale et les questions de sécurité. Dans cette optique, la Russie va continuer à fournir des armes (avions, hélicoptères, radars, véhicules d’artillerie, munitions…) aux pays de la région afin de faire face à la menace terroriste.
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Comme en septembre dernier, Iounous-Bek Evkourov est accompagné du très redouté général Andreï Averianov, patron du GRU, le renseignement militaire russe. Selon de nombreux spécialistes, les deux hommes jouent à la perfection la carte de la continuité en apparaissant comme les successeurs du patron de Wagner en Afrique.
Les pays de l’Alliance des États du Sahel bénéficient donc de l’expertise du vice-ministre de la Défense russe, un général décoré qui a «une bonne réputation de stratège militaire à Moscou» et qui a fait ses preuves en Ingouchie (sud-ouest de la Russie). Sa finesse diplomatique fait de lui «le nouveau visage des relations entre le Kremlin et les régimes africains», d’où la multiplication de ses visites dans la sous-région, en Libye et en Centrafrique.
Quant à Andreï Averianov, en tant que chef du renseignement militaire russe, il joue le rôle de garant d’une certaine forme de sécurité des régimes africains soutenus par Moscou.
Ainsi, avec les armes et les paramilitaires, la Russie renforce davantage sa présence dans les pays de l’Alliances des États du Sahel au moment où la France s’apprête à quitter définitivement la région avec le départ effectif de ses derniers soldats du Niger d’ici fin décembre.