Des échéances électorales cruciales en Afrique au second semestre 2017

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Le 09/07/2017 à 19h44, mis à jour le 09/07/2017 à 19h50

Le second semestre qui vient de démarrer sera rythmé par des élections (présidentielles, législatives, etc.) cruciales au niveau du continent (Sénégal, Afrique du Sud, Rwanda, Kenya, Angola,…). Les résultats et les conséquences de ces élections seront très scrutés sur le reste du continent.

Le second semestre de l’année en cours sera rythmé par de nombreuses élections en Afrique subsaharienne. Aux élections présidentielles (Angola, Rwanda, etc.), s’ajoutent des élections législatives et des élections à la tête de partis politiques (Afrique du Sud). Certaines de ces élections ne manqueront pas d’avoir des impacts au niveau du continent.

Sénégal: l’opposition va-t-elle pousser Macky Sall à une cohabitation?

Macky Sall entouré de ses camarades de la coalition Benno Bok Yaakar

C’est aujourd’hui que la campagne électorale pour les élections législatives a été lancée au Sénégal et ce jusqu’au 28 juillet. Des élections particulières marquées par une pléthore de listes électorales et surtout par l’incertitude sur les résultats. En tout, 47 listes ont été actées par la Commission électorale nationale autonome (Cena), contre 24 lors de la précédente consultation de 2012.

Toutefois, ce sont surtout trois listes qui vont en découdre entre elles lors de ces élections. D’abord, il y a celle de la mouvance présidentielle de Macky Sall, sous la bannière de Benno Bokk Yakaar, qui essayera de garder sa majorité au sein du parlement. Toutefois, celle-ci doit faire face à deux importantes coalitions : Wattu Senegaal dirigée par l’ex-président Abdoulaye Wade (2000-2012) qui, du haut de ses 92 ans, s’accroche toujours à la politique, et Manko taxawu Senegaal de Khalifa Sall, maire de Dakar, actuellement en prison pour détournement présumé de fonds publics.

Le scrutin qui aura lieu le 30 juillet courant permettra de renouveler l’Assemblée nationale sénégalaise dont le nombre de députés est passé de 150 à 165 parlementaires avec l'ajout de 15 députés devant représenter la diaspora.

C’est certainement l’élection législative la plus indécise depuis l’indépendance du Sénégal. Pour l’opposition, l’enjeu fondamental de cette élection est de pousser le président Macky Sall à la cohabitation. Si jamais l’opposition gagne ces élections, ce sera une première cohabitation au Sénégal mais aussi en Afrique de l’ouest.

En plus, le résultat de cette élection constitue un test grandeur nature pour les parties présentes qui ont des yeux rivés sur la présidentielle de 2019.

Rwanda: la boite au Pandore s’ouvre pour les présidents adeptes du 3e mandat

Paul Kagamé, président du Rwanda.

L’élection présidentielle rwandaise du 4 août prochain, dont l’issue est sans suspense, sera très suivie au niveau du continent. En effet, pour tous les observateurs, la réélection du président Paul Kagame, au pouvoir depuis 2003, pour un nouveau mandat de 7 ans ne fait l’ombre d’aucun doute. Au delà de son charisme, de son bilan économique à la tête du pays, Paul Kagame fait face à deux candidats d’opposition quasi inconnus: Frank Habinesa et Philippe Mpayimana. Les autres candidats indépendants (Gilbert Mwenedata, Fred Barafinda Skikubo et Diane Rwigar) ont été recalés par la Commission électorale rwandaise (NEC).

Les résultats de cette élection ne font aucun doute car le scrutin ne réserve pas de surprise. Toutefois, au niveau du continent, cette élection sera très scrutée.

En effet, après les tentatives de modifications des constitutions pour un 3e mandat dans un certain nombre de pays, tentative qui a emporté le président burkinabé Blaise Compaoré, l’acceptation d’une victoire de Kagame, qui a lui aussi modifié la constitution, risque de sonner le glas de l’opposition aux modifications des constitutions dans de nombreux pays du continent. A commencer par le Burundi dont le président souhaite disposer d’un 3e mandat, ce qui risque de plonger son pays dans la violence. De même, Joseph Kabila qui a prolongé son règne de plusieurs mois est désormais tenté par une modification de la constitution pour pouvoir se présenter pour un 3e mandat.

D’autres dirigeants, comme les présidents mauritaniens et guinéen, sont aussi accusés d’entretenir le flou sur un éventuel 3e mandat. La question sera alors de savoir pourquoi on accepte à Kagame un 3e mandat qu’on refuse à d’autres dirigeants? La boîte au Pandore est désormais ouverte.

Angola: enfin, un dinosaure quitte la politique

José Eduardo dos Santos, président de l'Angola.

Des bruits courent sur l’état de santé du président Jose Eduardo Dos Santos, âgé de 74 ans et au pouvoir depuis 38 ans. Une chose est toutefois sûre: il a décidé de céder le pouvoir cette année à son dauphin.

Au pouvoir depuis 1979, Dos Santos passera le témoin à Joao Lourenco, vice-président du parti au pouvoir –Mouvement populaire pour la libération de l’Angola (MPLA)- et ministre de la Défense, à l’issue des élections générales fixées le 23 août prochain.

Il faut savoir que la Constitution angolaise ne prévoit pas de scrutin présidentiel, mais précise que le poste de chef de l’Etat revient au chef du parti qui remporte les élections législatives. En février dernier, le parti au pouvoir a désigné Lourenço en tant que nouveau chef du MPLA.

Obiang Nguema et Robert Mugabe, deux autres dinosaures au pouvoir depuis 38 et 37 ans, vont-ils emboîter le pas à Dos Santos? Pas si sûr. Mugabe est à nouveau candidat à l’élection présidentielle zimbabwéenne de 2018 à l’âge de 94 ans!

Afrique du Sud: un Zuma cache t-il une Zuma?

Le président sud-africain Jacob Zuma et Nkosazana Dlamini-Zuma, présidente sortante de la commission de l’Union africaine (UA).

L’élection du nouveau président du Congrès national africain (ANC) aura lieu en décembre prochain. Mais, déjà, la tension est à son comble au sein du parti de Nelson Mandela. Et pour cause, l’heureux élu sera le candidat du parti aux élections présidentielles sud-africaines de 2019, et donc fort probablement le prochain président du pays arc-en-ciel.

Deux prétendants sérieux son actuellement connus : l’actuel vice-président Cyril Ramaphosa, compagnon de lutte de Mandela, considéré comme un modéré et proche du milieu des affaires, et Nkosazana Dlamini-Zuma, ex-présidente du Conseil de l’Union africaine et ex-épouse de l’actuel président Jacob Zuma.

L’actuel président fait tout son possible pour que Ramaphosa ne prenne pas les rênes de l’ANC préférant Dlamini qui pourrait éventuellement assurer, autant que possible, sa protection après son départ du pouvoir en 2019. Zuma étant impliqué dans de nombreux scandales de corruption.

Des élections de décembre risquent ainsi d’accentuer les divisions au sein de l’ANC et fragiliser un peu plus le parti lors des prochaines élections après le cinglant revers électoral lors des élections locales d’août 2016 durant lesquelles le parti a cédé des municipalités emblématiques : Johannesburg, Pretoria, etc.

Kenya : l’Afrique va t-elle finir avec les violences post-électorales?

Uhuru Kenyatta, président du Kenya.

Huit candidats s’affronteront lors des prochaines élections présidentielles kenyanes prévues pour le 8 août prochain. Toutefois, il ne fait aucun doute que l’élection se jouera entre le président en exercice, Uhuru Kenyatta, et le chef de file de l’opposition Raila Odinga.

Les sondages donnent le président sortant vainqueur dès le premier tour avec près de la moitié des suffrages, avec une légère avance sur son principale chalenger.

Au Kenya, comme dans beaucoup de pays africains, les élections se jouent rarement sur des programmes mais beaucoup plus sur des sentiments d’appartenance ethnique et géographique.

Du coup, la grande question que tout le monde se pose est de savoir si le Kenya va connaître des élections apaisées. Les craintes de violences post-électorales sont omniprésentes. Pour rappel, lors des élections présidentielles qui avaient opposé les deux candidats actuels, ces violences avaient fait plus de 1.100 morts.

Tout doit être fait afin que le Kenya ne connaisse pas de violences, surtout quand on sait que le pays a un rôle géo-économique et géostratégique majeur dans l’Afrique de l’Est. C’est la porte d’entrée des pays des Grands Lacs et joue un rôle majeur dans la stabilité régionale.

Ainsi, les élections présidentielles prochaines constituent un véritable test pour savoir si les pays africains gagnent en maturité démocratique et abandonnent les violences post-électorales.

Par Moussa Diop
Le 09/07/2017 à 19h44, mis à jour le 09/07/2017 à 19h50