Sénégal: le juge va-t-il maintenir le député-maire de Dakar en prison malgré son immunité?

Khalifa Sall, maire de Dakar

Khalifa Sall, maire de Dakar. DR/

Le 19/08/2017 à 08h50, mis à jour le 19/08/2017 à 08h55

Au risque de violer l’immunité parlementaire de Khalifa Sall, nouvellement élu député, «le juge d’instruction ne peut plus le maintenir en détention». Maitre Ciré Clédor Ly et les avocats du député, exigent la liberté d’office du député-maire de Dakar.

Khalifa Sall est officiellement devenu député depuis la publication par le Conseil Constitutionnel, des résultats définitifs des élections législatives du 30 juillet 2017.

Ce nouveau statut du maire de Dakar emprisonné dans l’affaire de la caisse d’avance de la mairie centrale de la capitale constitue un argument supplémentaire pour maitre Ciré Clédor Ly et ses collègues qui ont introduit une demande de liberté d’office de Khalifa Sall. Dans la même veine, maitre Khoureychi Ba, lui aussi avocat du maire de Dakar en appelle à la clairvoyance de maitre Abdoulaye qui selon lui, « détient une carte pour faire libérer Khalifa Sall.

Une justice mise en face de ses responsabilités

«Le juge d’instruction ne peut plus maintenir Khalifa Sall en détention sous-peine de violer son immunité parlementaire», ont soutenu maitre Ciré Clédor Ly et ses collègues défenseurs du maire de Dakar. Dans leur argumentaire, les avocats du maire de Dakar ont sévèrement critiqué le pouvoir judiciaire sénégalais qui, selon eux, «est sous les ordres du pouvoir exécutif dirigé par le président Macky Sall». Ils se sont également insurgés contre le fait que les présidents de la Cour suprême et de la Cour d’Appel se soient entêtés à ne pas accorder la liberté provisoire à Khalifa Sall.

Pour rappel, les deux précédentes demandes de liberté provisoire pour le maire de Dakar ont été tour à tour rejetées par ces deux juridictions. «Nous avons toujours dit que la détention de Khalifa Sall relève d’une volonté politique. Ce n’est pas un cas judiciaire (…) Cette séparation de pouvoir n’existe pas au Sénégal», a aussi dénoncé maître Ciré Clédor Ly. Selon lui, «les autorité judiciaire ont sciemment piétiné les droits de leur client».

Il a par ailleurs fustigé le mode de fonctionnement du parlement sénégalais qui est prêt à satisfaire le moindre désir de l’Exécutif sénégalais. «L’Assemblée nationale aussi, on voit comment elle a toujours marché. Donc qu’on ne se leurre pas», a-t-il ajouté. Toutefois, les avocats de Khalifa entendent pleinement jouer leur rôle de citoyen et de défenseur d’un compatriote qui «subit l’injustice» des autorités étatiques. «Cela ne nous empêche pas, en tant que citoyen, de les mettre face à leur responsabilités», ont précisé les avocats de Khalifa Sall.

Cependant, maître Ciré Clédor ly et ses collègues défenseurs du premier magistrat de la ville de Dakar n’excluent pas d’internationaliser leur combat pour le respect des droits de leur client. Ainsi ont-t-ils conclu en précisant que, «tous ces manquement et violations, relèvent de la compétence des nations Unies sur les Droits de l’Homme». Par conséquent, si Khalifa Sall ne s’y oppose pas, «ils vont saisir ledit Comité».

Maitre Abdoulaye Wade, le samaritain de Khalifa Sall?

Le pool d’avocats de Khalifa Sall s’active depuis le début de l’affaire de la caisse d’avance de la mairie de Dakar pour faire libérer le premier magistrat de la ville. Mais maître Ciré Clédor ly et ses collègues ont toujours buté sur le niet des autorités judiciaires. Toutefois, si le juge d’instruction refuse d’accorder une liberté d’office au député leader de la coalition «Manko Taxawu Senegaal», une autre alternative pourrait s’offrir à lui.

De l’avis de maitre Khoureychi Ba, un des avocats de Khalifa Sall, l’ancien président de la République, nouvellement réélu député à l’Assemblée national pourrait être un bon samaritain pour Khalifa Sall. Selon lui, «Abdoulaye Wade, le doyen des députés, qui va présider la séance inaugurale de la 13e législature, peut décider de suspendre celle-ci et exiger la libération du maire de Dakar pour procéder au vote qui devra désigner le nouveau président de l’Assemblée nationale».

Il évoque ainsi, l’article 61 de la constitution qui protège les députés. En tant qu’élu du peuple, Khalifa Sall doit bénéficier, au même titre que les autres députés, de l’inviolabilité parlementaire qui protège non pas la personne mais le mandat du député. «Les poursuites doivent être alors suspendues jusqu’à la fin de son mandat», a soutenu maître Khoureychi Ba.

Une telle situation pourrait ainsi se présenter. En effet, en tant que leader de l’opposition, chantre de la démocratie et fervent défenseur des libertés individuelles, maitre Abdoulaye Wade pourrait bien exiger la présence de Khalifa Sall au sein de l’Assemblée nationale. Ainsi, serait-t-ont tenté de dire qu’en se référant à l’article 61 de la constitution, l’avenir de Khalifa Sall est entre les mains du «Pape du Sopi» dont l’alliance avec la coalition «Manko Taxawu Senegaal» pour une meilleure démocratie au Sénégal, ne fait plus l’ombre d’un doute.

Par Moustapha Cissé (Dakar, correspondance)
Le 19/08/2017 à 08h50, mis à jour le 19/08/2017 à 08h55