Sénégal. Covid-19: un manque à gagner de plus de 500 millions d’euros pour les hôtels

une chambre d'hôtel vide au Sénégal

une chambre d'hôtel vide au Sénégal. Dr

Le 23/09/2020 à 16h14, mis à jour le 23/09/2020 à 16h15

Au Sénégal, les acteurs du secteur du tourisme ont rappelé que les effets du Covid-19 n’avaient pas encore cessé de les tourmenter et de menacer l’existence de certaines de leurs structures. Reconnaissant les efforts de l’Etat, ils demandent néanmoins encore plus d’efforts de la part du pouvoir.

Les bons résultats de la gestion de la pandémie de Covid-19 au Sénégal, loués partout dans le monde, ne se reflètent pas dans le domaine économique. Et l’un des secteurs qui continuent d’en pâtir le plus est celui du tourisme dans sa globalité. Les hôteliers, restaurateurs, tour-opérateurs, guides touristiques et toutes les activités connexes continuent de tirer la langue face à une situation financière préoccupante et à des perspectives sombres.

Ce sont environ 350 milliards de pertes sèches qu’a enregistrées le secteur depuis le début de la pandémie au Sénégal, à savoir depuis le mois de mars 2020. Les membres de la Fédération des organisations patronales de l’industrie touristique du Sénégal (Fopits) se sont retrouvés hier à l'hôtel King Fahd Palace, sous la présidence de Mamadou Racine Sy, président du Fopits, pour échanger sur leur situation et sur certaines mesures à prendre.

Dès l’entame de son propos, le président du Fopits a insisté sur la rapidité de la réaction du gouvernement qui, «dès l’annonce de cette pandémie, a demandé que notre secteur, qui était lourdement impacté, fasse l’objet de mesures, qui nous ont permis de nous maintenir la tête hors de l’eau». Ainsi, le crédit hôtelier, qui a été rapidement débloqué, est venu soutenir plus de 1.300 entreprises du secteur. Mamadou Racine Sy a précisé que l’argent débloqué avait permis «de financer les besoins en fonds de roulement et de prendre en charge des coûts de facteurs comme les salaires, l’eau et l’électricité, pour une période de 3 mois».

Ce crédit n’est pourtant pas un don, mais juste un prêt qu’il faudra rembourser, alors que la pandémie ne semble pas disposée à quitter le monde en ce moment. Ce qui indique que pour cette année, l’activité pourra être considérée comme «morte». Certains hôtels n’affichent pas plus de 20% de taux de remplissage, au mieux, alors que les restaurateurs n’ont encore aucune visibilité. D’où le spectre des fermetures de masse, ou pour d’autres encore, de licenciements pour motif économique. D’ailleurs, des hôteliers de Saly Portudal, sur la Petite côte à 90 km de Dakar, ont annoncé le licenciement imminent de 1.137 em­ployés permanents, du fait du marasme économique. Quant aux saisonniers, on les a déjà oubliés.

Néanmoins, et il le répètera plusieurs fois, le patron du King Fahd hôtel et du Fopits salue les efforts des autorités sénégalaises envers le secteur. C’est ainsi, dira-t-il, que le ministre Abdoulaye Diouf Sarr, en charge de la Santé, a débloqué 4 milliards de FCFA, pour payer les factures des hôtels occupés par des personnes en quarantaine, durant l’état d’urgence. Un reliquat de 3,5 milliards a été transmis aux services du ministère des Finances et du budget pour règlement.

Cependant, la crainte des opérateurs économiques du secteur touristique est que toutes les charges, qui avaient été suspendues par la volonté de l’Etat, ne reviennent les étouffer encore plus. Ainsi, a-t-il fallu une réaction énergique pour que les services des impôts lèvent les Avis à tiers détenteurs (Atd) qu’ils avaient placés sur certaines entreprises. Et les banques qui avaient fait des reports de créance risquent de redemander leurs dus.

D’où l’idée lancée par certains collègues de Mamadou Racine Sy, présents à la rencontre, de solliciter «une exonération fiscale». Pour ne pas dire, amnistie. Car avec le manque à gagner sur leurs chiffres d’affaires, il faudra à certaines structures, et non des moindres, plusieurs années pour retrouver l’équilibre financier. Le patron de l'hôtel Terrou-Bi a annoncé un manque à gagner sur son chiffre d’affaires de 9 milliards. Equivalent quasiment à celui déclaré par Racine Sy pour le King Fahd. Dans ces conditions, si les impôts venaient à s’ajouter aux créances bancaires, la situation pourrait vite devenir intenable.

Par Moustapha Cissé (Dakar, correspondance)
Le 23/09/2020 à 16h14, mis à jour le 23/09/2020 à 16h15