Pour la société civile sénégalaise, qui a régulièrement dénoncé la Cour de répression contre l’enrichissement illicite (CREI), il est temps que Karim Meïssa Wade, le fils de l’ex-président sénégalais Abdoulaye Wade, soit rétabli dans ses droits.
Si les ONG de défense des droits de l’homme reparlent du dossier, c’est parce qu’il y a eu récemment un imbroglio au sommet de l’Etat. En effet, la semaine dernière, alors que le pays se dirigeait vers la célébration du Grand Magal de Touba, deux hauts fonctionnaires sénégalais, devant la représentation diplomatique sénégalaise au Comité des droits de l’homme des Nations Unies à Genève, ont laissé entendre que Karim Wade pouvait être rétabli dans ses droits.
Pour rappel, Karim Wade est la seule personne jugée et condamnée par la Cour de répression de l'enrichissement illicite (CREI). Après avoir passé plus de 3 ans en prison, entre 2013 et 2016, il a finalement été exfiltré par le procureur du Qatar. Il réside à Doha depuis cette date et n'a pas pu prendre part à l'élection présidentielle , à cause d'une dette de l'ordre de 138 milliards de francs Fcfa, soit près de 200 millions d'euros, vis-à-vis de l'Etat du Sénégal.
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L’expert et juriste tunisien Yadh Ben Achour a, pour le compte des Nations Unies, interpellé l’Etat du Sénégal sur le cas de Karim Wade en rappelant les conclusions du comité en novembre. "La déclaration de culpabilité et de condamnation contre l’auteur doit être réexaminée. La question que je vous pose est la suivante : qu’en est-il de l’exécution de ces constatations ? Où en sommes-nous ?", a-t-il dit.
La réponse de Moustapha Kâ, directeur des Droits humains au ministère de la Justice laissait croire que l’Etat du Sénégal n’est pas fermé à une indemnisation de Karim Wade.
"Le Sénégal ne refuse pas d’indemniser, mais pourvu que l’intéressé puisse venir se présenter afin que les juges compétents puissent déterminer l’ampleur du préjudice. On est prêts.Si l’intéressé saisit les juridictions compétentes en vue de sa réparation, il n’y a aucun obstacle à ce que cette réparation soit allouée par l’État du Sénégal", a affirmé Moustapha Kâ.
Mais jeudi 17 octobre, jour férié au Sénégal pour cause de Magal, le ministère des Affaires étrangères est venu dire le contraire dans un communiqué.
"Dans sa réponse (celle de Moustapha Kâ, Ndlr), et contrairement aux allégations relayées par la presse en ligne, la délégation sénégalaise n’a, en aucun cas, et sous quelque forme que ce soit, pris des engagements allant dans le sens d'une «réhabilitation» de Monsieur Karim Wade ou d'une «réparation» d’un «préjudice» qu’il aurait subi".
Evidemment, la déclaration a bel et bien été tenue par Moustapha Kâ et la presse sénégalaise ne s’est pas privée de diffuser des extraits de l’audition devant le Comité des droits de l’homme des Nations unies.
Ce cafouillage intervient dans un contexte particulier, puisque, lors de l'inauguration de la Mosquée Masslikul Djinane, le président Macky Sall s'est retrouvé, fin septembre avec, Abdoulaye Wade, après une dizaine d'années de brouilles entre les deux hommes.