Sénégal. Université Gaston Berger: le risque d'une année blanche plane toujours

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Le 06/07/2018 à 10h59, mis à jour le 06/07/2018 à 10h59

Les multiples grèves des étudiants et des enseignants au cours de l'année ont provoqué un important retard dans les programmes et rendent impossibles les évaluations à l’université Gaston Berger (UGB). Certains proposent de suspendre les activités pédagogiques jusqu’au mois d’octobre.

La menace d’une année blanche est réelle à l’université Gaston Berger (UGB) de Saint-Louis. Le souvenir de la mort par balle de Fallou Sène est encore frais dans la tête des étudiants et déjà de nouveaux obstacles se dressent devant eux. Le plus difficile est maintenant de trouver les moyens de sauver l’année académique 2017-2018 alors que des examens de session précédente n’ont pas encore eu lieu. Face au chevauchement des deux années académiques, et dans l’incapacité de programmer des évaluations, certaines UFR envisagent le report des activités pédagogiques jusqu’en octobre 2018. Une assemblée de l’université avait été prévue, mercredi 4 juillet, mais elle a été reportée.

Les enseignants de l’UGB sont pratiquement dans l’impossibilité de terminer le programme pour qu’à terme, les étudiants puissent être évalués. Il faut dire que les différentes grèves des deux côtés y sont pour beaucoup. Et pour ne rien arranger, l’état de délabrement des blocs administratifs qui ont été saccagés par les étudiants les rend impraticables. Une telle situation met aujourd’hui la nouvelle administration de l’UGB devant un dilemme. A savoir: finir l’année académique en cours ou tout suspendre pour reprendre sur de nouvelles bases en 2018. Certains optimistes pensent toujours que des solutions sont possibles.

Patrice Corréa, secrétaire général de la section locale du Syndicat autonome de l’enseignement supérieur (SAES), suggère un «Plan Marshall» pour l’UGB. D’après sa déclaration sur Sud FM, «l’université est à terre. Le campus dégradé. Le rectorat, réduit en cendres, est mort. Le service pédagogique et autres UFR sont complètement saccagés». C’est ce triste tableau qui se dresse devant les étudiants qui commencent à regagner l’université.

Notons que, les étudiants avaient suspendu leur mot d’ordre de grève illimitée le lundi 25 juin dernier. Mais la fin de leur grève n’est pas synonyme de reprise normale des cours.

En effet, le redémarrage effectif des cours dépendra de la décision des équipes pédagogiques de l’université. Or, celle de l’Unité de formation et de recherche de la faculté des Sciences juridiques politiques (UFR-SJP) n’est pas prête.

«Le Conseil d’UFR SJP s’est réuni pour proposer une suspension des activités pédagogiques à l’assemblée de l’université jusqu’au mois d’octobre 2018. C’est-à'dire mettre entre parenthèses l’année 2017-2018 pour reprendre les activités normales», souligne Mbissane Ngom, directeur de l’UFR-SJP. D’après lui, «cette décision est motivée sur la base d’une analyse objective de la situation pédagogique au niveau des différentes sections de l’UFR». «Nous étions en moyenne autour de 5 semaines d’enseignement. Ce qui veut dire que si nous mettons en œuvre les projections de calendrier. En tenant compte des grèves des étudiants, nous sommes censés terminer l’année académique 2017-2018 en mai 2019. Cela n’a aucun sens», explique-t-il.

Les autres UFR prennent le pas de l’UFR-SJP

Comme il a été décidé de suspendre les activités pédagogiques jusqu’au mois d’octobre 2018 à l’Unité de formation et de recherche des Sciences juridiques et politiques (UFR-SJP), d’autres UFR semblent suivre cette mouvance. A l’UFR des Sciences de l’éducation, de la formation et du Sport (SEFS) et à l’UFR des Sciences appliquées et technologies (SAT), on propose aussi de recommencer l’année académique 2017-2018 en octobre prochain. «Le Conseil a proposé de revenir en octobre et de commencer une année normale. La meilleure décision est de reprendre tout en octobre. L’assemblée de l’université décidera», soutient Nalla Socé Fall, enseignant à l’UFS-SEFS. «L’université accuse un retard depuis 2014. C’est problématique. Nous sommes en train de terminer les examens de 2016-2017. Nous avons perdu 8 semaines de cours. Dans le cadre de notre section, ce sera très court pour organiser des évaluations et des examens de rattrapage», a-t-il ajouté.

Les étudiants veulent la poursuite de l’année académique

Les étudiants de l’UGB réclament toute la lumière sur la mort de leur camarade Fallou Sène. Ils veulent également la continuation des activités pédagogiques dans les Unités de formation et de recherche. Plus de deux semaines après la suspension de leur mot d’ordre de grève illimitée, la reprise ne s’est pas encore généralisée. « La reprise n’est pas effective dans certaines UFR. Nous voulons une reprise des cours. Nous suggérons un réaménagement du calendrier dans ce sens», a dit Alexandre Mapal Sambou, président de la Coordination des étudiants de Saint-Louis. Selon lui, les étudiants ne partagent pas la position du Conseil des UFR. «Le Conseil des UFR propose le gel des activités pédagogiques. En d’autres termes, il envisage une année blanche. Nous ne partageons pas cette position», a-t-il confié.

Par Moustapha Cissé (Dakar, correspondance)
Le 06/07/2018 à 10h59, mis à jour le 06/07/2018 à 10h59