Sénégal. Covid-19: déni et discrimination, deux maux qui profitent au virus

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Le 24/07/2020 à 16h07, mis à jour le 25/07/2020 à 10h58

C’est à peine croyable, ce qui se passe au Sénégal: certaines personnes ne croient toujours pas en l’existence du Covid-19 et d’autres tournent simplement le dos aux malades, même guéris.

Le défi actuel des autorités sanitaires du Sénégal est de combattre le déni et la stigmatisation, deux comportements qui permettront au coronavirus de s’enraciner dans le pays. Le Conseil national de lutte contre le sida (Cnls) et le Comité de lutte contre le Covid-19, lors d’un atelier organisé le jeudi 23 juillet 2020, et qui portait sur «Le Covid-19: le déni, la stigmatisation et la discrimination», ont trouvé des similitudes dans la perception que les citoyens avaient du VIH et du Sars-CoV-2. Au début ils n’y croient pas, mais se mettent à fuir une personne dès qu’ils apprennent qu’elle est ou a été malade.

Selon ces professionnels de santé, l’objectif général est aujourd’hui de contribuer à la lutte contre le Covid-19, par la diffusion d’une bonne information sur la pandémie. Mais également de soutenir les journalistes sur l’évolution du coronavirus. «Le déni, la stigmatisation et la discrimination constituent un frein à la lutte contre la pandémie. C’est dans ce contexte que l’Association des Journalistes en Santé continue de renforcer les capacités de ses membres pour un meilleur traitement de l’information sur la Covid-19».

«Au Sénégal, le nombre de cas augmente chaque jour, avec son cortège de morts»

Le représentant de la secrétaire exécutive du Cnls, la docteure Safiétou Thiam, d’expliquer: «Au Sénégal, le nombre de cas augmente chaque jour, avec son cortège de morts. Cette tendance risque de continuer, surtout avec l’augmentation des cas de transmission communautaire, facteurs par excellence de la propagation rapide de la pandémie.»

Selon elle, «les efforts fournis par le gouvernement pour limiter la propagation du Covid-19 risquent d’être annihilés à cause d’un certain nombre de comportements et d’attitudes au sein des communautés dont certains membres semblent ne pas mesurer la gravité de la situation.»

Il s’agit, notamment, rappelle-t-elle, de la discrimination dont sont victimes le plus souvent les personnes infectées par le coronavirus ainsi que le déni de l’existence même de la maladie. Toutefois, elle a laissé entendre que ces deux phénomènes, qui prennent leur source dans la communauté, doivent être combattus par une approche communautaire.

Toutefois, cette version des autorités, qui semblent désigner la responsabilité des citoyens, n’est pas partagée par plusieurs Sénégalais. Ces derniers ne comprennent toujours pas les décisions prises par leur président dans le cadre de la lutte contre le coronavirus. En effet au mois de mars, alors que le pays n’était qu’à près de 100 cas de contamination, le président Macky Sall avait décrété l’état d’urgence assorti d’un couvre-feu sur toute l’étendue du territoire national. Une mesure sur laquelle il est pourtant revenu, à peine deux mois plus tard, alors que le pays dépassait les 5.000 cas de contamination avec déjà plus de 100 morts.

Un tâtonnement qui serait, pour ces voix sénégalaises, la cause de ce qui arrive aujourd’hui. Cela ferait croire à certains que la maladie n’existe pas ou n’est pas aussi grave que le prétendent les officiels. S’y ajoutent des activistes qui ne cessent de dénoncer un «corona business», signifiant que les autorités tireraient profit de la situation.

Par Moustapha Cissé (Dakar, correspondance)
Le 24/07/2020 à 16h07, mis à jour le 25/07/2020 à 10h58