La quiétude n’est pas au rendez-vous chez les habitants de la capitale abidjanaise ces derniers jours. la raison est à chercher dans les ravages causés par les pluies diluviennes. Les précipitations exceptionnelles ont engendré des inondations dans plusieurs quartiers de la ville, notamment à Cocody, Yopougon, Abobo et Bingerville, Treichville...
Les rues et les routes se sont transformées en rivières, rendant la circulation quasiment impossible. Les autorités dénombrent d’énormes dégâts et plusieurs morts, tandis que des milliers de personnes se retrouvent sans abri du fait des effondrements des maisons.
Inondations et dégâts à Abidjan.. le360 Afrique/Djidja
Ces drames, qui ne sont malheureusement pas nouveaux, viennent rappeler la nécessité d’une action urgente pour limiter les risques d’inondations dans le pays.
Selon les experts, les innombrables inondations à Abidjan sont la conséquence d’une combinaison de facteurs, dont l’urbanisation galopante et anarchique, la destruction des zones humides naturelles et l’insuffisance des infrastructures d’assainissement. «Nous avons à faire un gros travail d’éducation de la population. Si on arrive à des grandes situations de désastre, il y a une part qui incombe à notre mode de vie, à notre mode de gestion de notre environnement ; et nous devons déjà corriger cela», explique Joseph Amon, président de l’ordre des architectes de Côte d’Ivoire.
Et d’ajouter que «on peut avoir une meilleure gestion des inondations, si les citées sont conçues raisonnablement. Mais lorsqu’on occupe tous les espaces, lorsqu’on ferme les caniveaux, on rejette dans les réseaux publics toute sorte de déchets, qui deviennent encombrés, vous avez beau faire les plus grands caniveaux, il y aura toujours des problèmes qui vont apparaître».
Lire aussi : Vidéo. Côte d’Ivoire: témoignages et colère après les inondations à Abidjan
La responsabilité de la population est donc engagée. Mais celle des pouvoirs publics aussi. En effet, de nombreuses constructions à Abidjan n’ont pas été faites en suivant un schéma directeur sur les notions d’urbanisme. Les constructions se sont faites donc de manière anarchique, ce qui n’était pas le cas dans les années 1980.
«Certaines cités ayant été construites sur des caniveaux ou sur des canalisations, ce qui empêche le ruissellement des eaux lorsqu’il pleut en abondance et provoque ces dégâts déplorables», déplore Traoré Mohamed, opérateur économique dans la commune de Cocody.
La gestion des eaux pluviales est essentielle pour la résilience des villes face aux aléas climatiques. À Abidjan, plusieurs projets ont été entrepris pour améliorer l’assainissement et réduire les inondations. Notamment depuis 2021, 31,6 kilomètres de canalisations des eaux pluviales ont été réalisées à Cocody (3,5 km) et Yopougon (27,1 km) pour faciliter l’évacuation des eaux pluviales.
Des projets d’assainissement sont également en cours comme le projet de gestion intégrée du Bassin Versant du Gourou qui devrait permettre de mieux réguler l’évacuation des eaux pluviales et de réduire les inondations. Le programme d’amélioration durable de la situation d’assainissement et du drainage (Padsad) couvre plusieurs zones, dont Cocody, Yopougon et Abobo. Le projet PAACA vise à renforcer le réseau d’évacuation des eaux usées dans six quartiers d’Abidjan, contribuant ainsi à un assainissement plus durable.
Lire aussi : Côte d’Ivoire: au moins dix morts après de fortes pluies à Abidjan
En somme, la planification à long terme et l’innovation sont essentielles pour une gestion efficace des eaux pluviales à Abidjan.
Les services de secours, travaillent pour venir en aide aux sinistrés. L’Office National de la Protection Civile (ONPC) est fortement mobilisé en ces périodes pour intervenir et évacuer les habitants des zones les plus touchées. Malgré ces efforts, la situation reste critique, et les habitants appellent à une intervention plus massive et coordonnée.
Les autorités ivoiriennes ont donc décidé de détruire les maisons situées sur les zones à risques, ce qui a créé un sentiment de frustration au sein de la population. Malgré cette initiative de l’Etat, la ville subit des inondations lors des saisons pluvieuses. Et les raisons sont plutôt simples selon les experts.
«Les démolitions ne doivent pas s’arrêter. Mais qu’est-ce qu’on fait après la démolition, qu’est qu’on fait de tous ces espaces qui ont été mis à nus? Si on ne fait rien, on risque d’avoir d’autres phénomènes qui vont apparaître, la nature a horreur du vide. Si on ne fait pas d’aménagement, les risques d’inondations vont être multipliés par quatre et plus», prévient l’expert.
Lire aussi : Inondations en Afrique de l’Ouest: outre le changement climatique, autorités et citoyens sont aussi responsables
Les pluies torrentielles suivies d’inondations dévastatrices sont récurrentes dans la plus grande ville ivoirienne où vivent près de six millions d’habitants. L’an dernier, au moins 30 personnes sont mortes dans des incidents liés aux fortes pluies.
Le triste bilan dressé par les autorités à ce jour, fait état d’une dizaine de perte en vies humaines et plusieurs dégâts matériels dont des effondrements de bâtisses, des véhicules endommagés.
La lutte contre les inondations en Côte d’Ivoire nécessite une mobilisation collective. Les autorités doivent mettre en place des politiques d’urbanisme rigoureuses et investir dans la construction d’infrastructures d’assainissement adéquates.
La population, quant à elle, doit adopter des comportements plus responsables en matière d’occupation des sols et de gestion des déchets. Seul un effort conjoint permettra de briser le cycle des inondations meurtrières et de bâtir un avenir plus sûr pour les populations ivoiriennes.
En attendant la fin de la saison des pluies avec ses corolaires d’inondation, les populations espèrent davantage d’interventions des autorités afin de sauver les habitants en danger.