Dans une petite salle de cours, des jeunes s’initient à la pâtisserie. Concentrés, passionnés, certains d’entre eux reviennent de très loin. Parmi eux, Moh Sylla, récemment rentré de Tunisie, attire tous les regards. Star des réseaux sociaux, Moh Sylla s’est fait connaître en racontant son parcours migratoire avec humour, autodérision et surtout beaucoup de lucidité «beaucoup de personnes m’ont connu grâce aux réseaux sociaux. J’étais au champs où je travaillais avec un Tunisien. Et tout le temps, je faisais des vidéos comiques. Et aussi, je conseillais de rester dans nos pays. Pas seulement les Guinéens, mais tous les Africains».
Son aventure débute comme celle de milliers d’autres jeunes Africains, l’espoir d’un avenir meilleur ailleurs. Mais la réalité, Moh la trouve rapidement différente.
En Tunisie, entre travaux champêtres, précarité et désillusion, Moh Sylla fait face à un quotidien rude. Pourtant, plutôt que de sombrer, il choisit de raconter. Sur TikTok, Instagram, ses vidéos touchent et inspirent. Il parle vrai, avec humour, et ça plaît, rappelle son ami Ibrahima Sory Bamba «il n’est pas facile de quitter son pays, partir à l’aventure, souffrir et se dire, après 15 tentatives de traversées, je veux rentrer et retrouver ma famille. Je veux vivre du métier que j’ai aimé apprendre. Il a été vraiment courageux de pouvoir prendre une pareille décision».
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Puis vient la décision de rentrer au pays. Un choix fort, radical. Aujourd’hui, lui Moh Sylla, dit ne rien regretter «je suis en train de suivre une formation en pâtisserie et cuisine. Mais cela ne va pas m’empêcher de continuer à faire des vidéos. Les réseaux sociaux, c’est un endroit de divertissement qui donne beaucoup de visibilité. Tous ceux qui trouvent du sens dans ma vie et dans ce que je dis dans mes vidéos s’intéressent à mes productions». À travers son témoignage et son engagement, Moh Sylla symbolise cette jeunesse africaine qui choisit de redéfinir la réussite. Pour lui, elle ne se trouve plus à l’étranger, mais bien ici, chez lui, en Guinée. Là où tout reste possible.
En attendant que d’autres prennent le même chemin que lui, le Centre d’études stratégiques de l’Afrique rapportait, en février dernier, que «les restrictions accrues imposées aux passages frontaliers intercontinentaux vers l’Europe et la péninsule arabique au cours de l’année écoulée ont entraîné une baisse spectaculaire de la migration irrégulière africaine hors du continent. Les 146.000 interceptions d’Africains en situation irrégulière qui ont atteint l’Europe et les pays du Golfe en 2024 représentent environ la moitié des 282.000 interceptions enregistrées en 2023.»