Libreville: sur la terre fertile du foncier, poussent des conflits à n’en plus finir

Les conflits fonciers se multiplient à Libreville.

Le 05/10/2024 à 10h42

VidéoÀ Libreville, la capitale qui compte près d’un million d’habitants, les tensions autour du foncier se multiplient en raison de l’absence d’un véritable plan cadastral, l’occupation anarchique des parcelles, la corruption qui gangrène les services de l’urbanisme... L’acquisition d’un lot de terrain devient alors problèmatique.

D’Akanda, à Malibé au nord de Libreville, en passant par Bikélé sur la route nationale, ou encore à Owendo, une commune du sud de la ville, les querelles de terrains sont légion. Cependant, la nature et l’ampleur de ces conflits varient d’une situation à une autre. À l’avenue de Cointet, quartier du troisième arrondissement de Libreville, une bataille de succession foncière oppose deux familles depuis trois mois.

L’affaire portée devant les juridictions compétentes s’enlise avec de lourdes conséquences sur une partie des expulsés de la propriété. Ils passent leurs nuits à la belle étoile et sont désormais exposés aux intempéries habituelles en cette saison des pluies. «J’ai 60 ans mais je n’ai pas de lit où dormir. Nos enfants ne peuvent pas aller à l’école... À la suite de cette expulsion, nous nous retrouvons avec des dépenses excessives. Il s’agit des honoraires d’avocats, même pour se nourrir nous avons des problèmes. De l’eau, il faut en acheter, heureusement que nous avons le soutien de quelques bonnes volontés. Ce que nous souhaitons c’est que le Président puisse monter une commission d’enquête pour vérifier les situations des Gabonais qui ont des problèmes. Et c’est bien notre cas», lance, Charlotte Boutoundou Anguilet, une des victimes d’expropriation foncière de l’avenue de Cointet à Libreville.

Cette dispute autour des droits à la succession foncière est révélatrice d’une kyrielle de dossiers en instance devant les tribunaux gabonais. Ils portent entre-autres, sur la vente illicite des terrains par des tiers comme l’affirme Hervé Arthur. Ce jeune étudiant se rappelle d’une douloureuse arnaque dont sa famille aurait été victime dans la commune de Ntoum, à une quarantaine de kilomètres de Libreville.

«À chaque fois qu’on venait pour l’entretien de notre terrain, il y avait toujours quelques bornes qui étaient démontées. Mais le vendeur nous rassurerait sur la sécurité du site. Au fil du temps, notre terrain perdait des hectares avec la pression immobilière autour. Très vite, nous nous sommes rendus compte que ce terrain avait été vendu à d’autres personnes. Nous avons engagé une procédure judiciaire pour que le nouvel acquéreur nous rembourse l’investissement. C’est pour dire que ce phénomène est vraiment récurrent ces dernières années au point ou plusieurs familles sont condamnées à la location», s’alarme-t-il.

Face à l’enchaînement des cas d’arnaque supposée ou avérée sur le marché de vente de terrain et pour prévenir des conflits fonciers, la maîtrise des procédures législatives est de rigueur, selon Léandre, juriste. «L’État étant propriétaire des terres selon nos textes, il devrait aménager des espaces et les rendre disponibles afin que les usagers puissent s’en procurer. Et avant tout achat, les justiciables doivent s’imprégner des procédures de cession et d’acquisition. Cela permet d’asseoir les règles de transparence conformément à la loi», conseille-t-il.

La problématique foncière s’avère être l’un des défis majeurs pour les autorités de la transition. Elles qui ont promis dès leur prise de pouvoir en août 2023 de restaurer, outre les institutions, mais aussi, la dignité des Gabonais.

Pour éviter les controverses et les imbroglios judiciaires sur les conditions d’acquisition de terrains au Gabon, le gouvernement a lancé un projet dénommé «un Gabonais, une parcelle». Selon le récent communiqué du comité de transition au pouvoir cette réforme prévoit la livraison de 500 parcelles de 500 m² à 2,5 millions de francs CFA, environ 3.800 euros

Par Ismael Obiang Nze (Libreville, correspondance)
Le 05/10/2024 à 10h42