Ils s’enduisent le corps de poudre blanche, portent de grotesques fausses barbes surmontées d’oreilles démesurées et sont volontairement vêtus de loques... A partir de la première décade de ramadan, lors du tobey tobey tout est conçu pour que l’excentrique la dispute au bonheur de voir défiler dans les rues des villes du Niger ces jeunes gens.
«Ils ont l’apparence de figurines fantasmagoriques, ils se tatouent le corps avec du calcaire et collent sur leurs oreilles de vieilles chaussures pour prendre l’apparence d’un animal ou d’un fantôme. En chantant et en se déhanchant, ces jeunes hommes forment des processions et exécutent un spectacles apprécié de tous», explique Amadou Saley Sounnale, chef de quartier à Kalley Sud à Niamey.
Nul besoin de tenter une quelconque recherche pour situer dans le temps l’origine de ces déguisements animaliers et de cette tradition qui a traversé les siècles. Le tobey tobey se pratique toujours et participe à la cohésion sociale, et c’est là le plus important.
«Le tobey tobey rappelle aux gens la nécessité d’être solidaires et de s’éloigner de certaines pratiques dommageables. Les jeunes qui animent les processions reçoivent des dons en espèces et en nature, cela peut être des céréales, du sucre.... A la fin du mois de ramadan, les gains sont partagés entre les membres des groupes», souligne Alou Aye, sociologue-communicateur. Avec cet argent, certains peuvent même s’offrir des habits pour l’Aîd.
Lire aussi : Niger: le tandem ramadan-inflation sévit toujours
Et si tobey tobey incite à la solidarité, le mois de ramadan constitue l’occasion idéale pour essaimer de telles vertus. «Ceux qui animent les processions, comme ceux qui leur offrent un peu de ce qu’ils ont appliquent en réalité les recommandations de l’islam qui exhorte la communauté des croyants à la bonté, à la charité, à la cordialité», professe Cheick Haladou Yahaya, prédicateur.
C’est également un carnaval festif resté populaire au sein de la société nigérienne. Oumou Saley, femme au foyer, se remémore du temps où la jeune fille qu’elle était faisait partie de la procession et animait les rues de sa voix juvénile en quête de joie et de quelques offrandes.
«Le tobey tobey est un spectacle amusant et intéressant pendant le ramadan. J’en avais fait pendant ma tendre enfance. c’est une pratique ancestrale, qui traverse les générations, et je suis fière de voir aujourd’hui les jeunes s’accrocher à cette tradition. Les jeunes retournent généralement avec des cadeaux en nature et en espèce mais de plus en plus, ils préfèrent l’argent aux vivres», témoigne Oumou Saley.
Débutant à partir de la première décade du mois béni de ramadan, la pratique du tobey tobey diffère selon les régions du Niger, tout autant que son appellation, que sa durée.