Gabon. Stade Omnisport Président Bongo, l’histoire d’une infrastructure en ruine

Le stade Stade Omnisport Omar Bongo dans un état de délabrement avancé.
Le 16/05/2025 à 10h18

VidéoLe Stade Omnisport Président Bongo qui a accompagné les jours fastes du football gabonais n’est plus que l’ombre de lui-même. Sinistré depuis plus d’une décennie, l’infrastructure survit grâce à la détermination d’une poignée de bénévoles face au laisser-aller des autorités.

Ce 30 mars 1986, Libreville retenait son souffle. Sur la pelouse impeccable du Stade Omnisport Président Bongo, l’Azingo national affrontait les Ghanéens de Sekondi Hasaacas dans le cadre de la Coupe d’Afrique des vainqueurs de coupe. Le public gabonais, venu en masse, vibrait à chaque ballon touché, à chaque offensive, à chaque espoir. Ce jour-là, le football gabonais écrivait l’une de ses plus belles pages dans une enceinte flamboyante, livrée seize ans plus tôt, en 1970, avec une capacité de 40.000 places.

Aujourd’hui, cette arène n’est plus qu’un souvenir fané, un colosse aux jambes d’argile abandonné depuis 13 ans.

Malgré les nombreuses annonces de réhabilitation, les projets sont restés lettre morte. Le dernier en date, prévu pour les CAN 2012 et 2017, n’a jamais été mené à terme, malgré une enveloppe de 37,4 milliards de francs CFA.

Entre les gradins fissurés, les vestiaires délabrés et une pelouse devenue terrain vague, le stade est désormais un lieu de non-droit, livré à des bandes armées et à la violence. Fleuri Etaka Ngoma, responsable de la sécurité, témoigne: «Sans notre présence ici, les usagers qui font le footing dans ce stade se feraient de plus en plus agressés. Parce que le site est devenu un refuge de bandits de grands chemins».

Et pourtant, malgré le danger, certains Gabonais continuent de fréquenter les lieux, pour le sport ou par nostalgie. C’est le cas du jeune Abel Ndoume, 13 ans, crampons aux pieds et espoir plein le cœur: «Ça me fait un grand honneur de venir jouer sur ce terrain qui a vu les grands footballeurs disputer les plus grandes rencontres du Gabon» Il rêve de voir le chantier de réhabilitation enfin relancé.

Un site pour la grande Histoire

Mais à défaut d’un véritable plan de rénovation, ce sont d’anciens employés d’une société de nettoyage – aujourd’hui bénévoles – qui assurent aujourd’hui la maigre survie du site. «Nous sommes arrivés ici à la suite d’un appel d’offre de nettoyage du stade remporté par notre société en 2018. Mais faute de financement, notre employeur a résilié son contrat avec le ministère des Sports. Et depuis, nous avons pris les choses en main», explique Gauïs Mbadinga, un des surveillants du site. Ils sont douze, à veiller jour et nuit, à maintenir un semblant d’ordre et de propreté.

En dépit de multiples sollicitations, aucune autorité ne souhaite s’exprimer sur l’avenir de ce haut lieu du sport gabonais. Un silence assourdissant qui contraste avec l’attachement profond de la population à ce symbole national. Pourtant, selon les férus du ballon rond, le Stade Omnisport Président Bongo n’est pas qu’un tas de béton fissuré. C’ est un pan entier de la mémoire sportive du Gabon. À l’heure où le pays s’interroge sur la transmission de ses valeurs, l’abandon de ce patrimoine interroge. Réhabiliter cette infrastructure, ce serait redonner espoir à toute une jeunesse et honorer les générations passées. Ne pas le faire, c’est laisser le temps achever ce que l’oubli a commencé.

Par Ismael Obiang Nze (Libreville, correspondance)
Le 16/05/2025 à 10h18