Tunisie: opération "Mains propres", Chahed met des milliardaires en prison

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Le 25/05/2017 à 15h34, mis à jour le 25/05/2017 à 15h49

Le gouvernement du Premier ministre Youssef Chahed a lancé l’opération «Mains propres» pour lutter contre la corruption et la contrebande. Une vague d’arrestations a touché de nombreux milliardaires et homme d’affaires tunisiens.

Est-ce une réponse aux manifestations qui secouent le pays? Les observateurs de la scène politique tunisienne se posent la question à juste titre. Pourquoi cette opération de lutte contre la corruption et la contrebande intervient à ce moment précis. D’ailleurs certains des barons arrêtés sont soupçonnés d’avoir soutenu les récentes émeutes à Tataouine.

En tout cas, quel que soit le timing, le gouvernement tunisien affiche clairement sa volonté d’aller jusqu’au bout de son entreprise. C'est ce qu'a confirmé le Premier ministre. «Dans la guerre la corruption, il n’y a pas d’alternatives: soit la corruption, soit l’Etat. Soit la corruption, soit la Tunisie, et moi j’ai choisi la Tunisie, comme tous les Tunisiens», a-t-il déclaré.

En témoigne l’arrestation dans la nuit du mercredi 24 au jeudi 25 mai de Lassaad Neji, au large des îles de Kerkenah, par les gardes-côtes tunisiens, alors qu’il tentait de s’enfuir à bord de son yacht. Ce milliardaire tunisien qui a fait fortune dans l’immobilier et l’import/export est considéré comme l’un des barons de la corruption et de la contrebande. Il connaît ainsi le même sort que Chafik Jarraya, homme affaires et ami de Hafedh Caïd Essebsi de Nidaa Tounes, arrêté et puis mis en résidence surveillée, Chafik Jarraya, Yassine Chennoufi, Nejib Ben Ismail, Khaireddine Meddeb, Ridha Ayadi, etc.

Le nom de Lassaad Neii rejoint en effet une longue liste de barons de la contrebande déjà interpellés, tel le milliardaire Ali Griri. De même, le domicile d’un autre milliardaire, Abdelhamid Ben Abdallah, propriétaire de la chaine de télévision privée Tounessna, de la boite de nuit «El Guitoune» à Hammamet et d’autres biens immobiliers, a-t-il été perquisitionné.

Outre ces hommes d’affaires, plusieurs cadres de la douane tunisienne ont été mis en état d'arrestation. 

Par ailleurs, plusieurs sous-préfets ont été limogés le mercredi 24 mai par le gouvernement pour leurs liens avec des milliardaires impliqués dans des opérations de contrebande et de corruption.

Ces arrestations sont effectuées conformément à la loi sur l’état d’urgence, en vigueur en Tunisie. Les personnes visées devront comparaitre devant la justice pour corruption, atteinte à la sécurité publique et à la sureté de l’Etat.

Dans cette lutte, le Premier ministre a obtenu le soutien de certains députés et des membres de la société civile qui souhaitent que le gouvernement s'attaque à ces deux fléaux qui gangrènent l’économie tunisienne.

Toutefois, il y a des voies discordantes. Ainsi, le juge Ahmed Rahmouni, président de l’Observatoire tunisien de l’indépendance de la justice (OTij) critique-t-il les arrestations des milliardaires et hommes d’affaires. Il a émis des doutes sur les véritables motivations de cette opération et s’inquiète de l’absence de garantie judiciaire pour les personnes arrêtées, sachant que ces arrestations sont effectuées dans le cadre de la loi d’urgence en vigueur dans le pays, et qui permet au ministre de l’Intérieur de mettre en résidence surveillée les personnes susceptibles de constituer une menace pour la sécurité publique et la sûreté de l’Etat.

Par Karim Zeidane
Le 25/05/2017 à 15h34, mis à jour le 25/05/2017 à 15h49