Algérie. Réserves en devises: les prédictions inquiétantes du ministre des Finances

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Le 12/11/2018 à 15h32, mis à jour le 12/11/2018 à 15h53

Le ministre des Finances, Abderrahmane Raouia, n'est pas rassurant quant aux perspectives de l’économie algérienne. Ses prédictions sur les perspectives financières de l’Algérie sur la période 2019-2021 laissent prévoir une forte et inquiétante chute des réserves en devises du pays. Explications.

En marge de la présentation du projet de Loi de finances 2019, le ministre des Finances algérien, Abderrahmane Raouia, a présenté les perspectives financières de l’Algérie pour la période 2019-2021. Et ce que l’on peut dire, c’est qu’elles sont loin d’être rassurantes.

Au delà des évolutions prévues en matière de croissance du PIB, de l’évolution de l’inflation, l’argentier algérien reste très prudent sur l’évolution des principaux indicateurs économiques du pays. Et pour cause, le gouvernement, sans une vision claire, est totalement désarmé pour l’orientation économique du pays durant les 3 prochaines années. De l’aveu même du ministre, la situation ne pourra être sauvée que par la hausse du cours du baril de pétrole.

Preuve de la gravité de la situation, les réserves en devises du pays, selon le ministre, vont gravement chuter sur la période 2019-2021.

Ainsi, selon ses projections, celles-ci vont passer de 88,61 milliards de dollars en juin dernier à 62 milliards de dollars en fin 2019, soit une chute de 30%. Puis, poursuivant ce trend baissier, ces réserves devraient à nouveau baisser de 30% pour s’établir à 47,8 milliards à fin 2020 avant de reculer à nouveau de 30% à pour finir à 33,8 milliards de dollars en fin 2021.

Quand on sait que ces réserves avaient atteint 193 milliards de dollars en mai 2014, on comprend vraiment la mauvaise gestion des dirigeants algériens, qui n‘ont rien fait pour bâtir une économie forte et la diversifier, à partir de cette manne qui fond aujourd’hui comme neige au soleil.

Preuve de ce manque de vision, les gouvernements algériens de ces dernières années ont tous rejeté la faute sur les importations et ont mis en place des mesures draconiennes de limitation et d’interdiction d’importations.

Ces politiques protectionnistes mal pensées ont logiquement échoué, en ne parvenant pas à réduire la facture des importations.

Preuve supplémentaire de l’échec de ces politiques si décriées par les partenaires économiques de l’Algérie, au terme des 9 premiers mois de l’année, le volume des importations n’a enregistré qu’une baisse de 1,5%, comparativement à la même période de l’année dernière, et le ministre prévoit le maintient de la facture des importations algériennes à 44 milliards de dollars en 2019, 43 milliards de dollars en 2020 et 42 milliards en 2021.

Ainsi, après avoir pompé entièrement le Fonds de régulation des recettes (FRR), l’Algérie s’apprête à connaître des jours encore plus difficiles.

Rappelons que le FRR, un fonds souverain créé en 2000 et dont le but était de gérer les excédents budgétaires liés aux exportations d’hydrocarbures, avait vu son compte atteindre 32,5 milliards de dollars d’actifs sous gestion à fin juin 2015.

Toutefois, à cause de la crise financière, les réserves engrangées durant la flambée des cours du baril de pétrole ont été totalement pompées par les gouvernements successifs pour faire face au déficit budgétaire. Résultat des comptes, ce fonds est désormais une coquille vide.

Cette situation qui a poussé le gouvernement d’Ahmed Ouyahia a trouvé ce qu'il a cru être la «panacée»,en ayant recours à la planche à billets, c'est à dire financer le déficit. Mais ce mécanisme commence à inquiéter, du fait de ses effets négatifs –inflation, liquidité abondante, dépréciation de la monnaie locale, etc.

Toutefois, d’après le Premier ministre algérien, le gouvernement est contraint de recourir au financement non conventionnel pour réduire le déficit budgétaire. Ahmed Ouyahia prévoit ainsi de recourir à nouveau à la planche à billets pour des montants de 1.874 milliards de dinars en 2019, 746 milliards en 2020 et 796 milliards en 2021... 

Bref, la situation économique algérienne est très inquiétante, et elle est certainement bien plus inquiétante qu’on cherche à nous le faire croire... 

Par Karim Zeidane
Le 12/11/2018 à 15h32, mis à jour le 12/11/2018 à 15h53