Les grands projets ferroviaires structurants d'Afrique

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Le 27/11/2016 à 18h03, mis à jour le 27/11/2016 à 18h16

TGV, train rapide, chemin de fer régional, presque tous les pays africains sont engagés dans des projets de développement des réseaux de chemins de fer. Des projets évalués à quelque 500 milliards de dollars. Voici quelques-uns des ces projets structurants.

En effet, d’après Africa Rail, une conférence annuelle des professionnels du secteur, les projets d’investissement dans le ferroviaire au niveau du continent représentent environ 500 milliards de dollars d’investissement. Des investissements qui pourront combler une partie du déficit important des chemins de fer en Afrique. A titre d’illustration, le continent ne compte que 51.000 km de voies ferrées, en grande majorité héritées de la colonisation, contre 348.500 km en Europe, continent beaucoup moins vaste pourtant.

Le nouvel attrait du rail s’explique par la capacité du secteur à transporter d’énormes volumes de marchandises et un nombre important de voyageurs à un coût globalement meilleur, comparativement à l’aérien et à la route. 

1390 milliards de FCFA pour développer le réseau ferroviaire sénégalais

Aujourd’hui, de nombreux pays du continent africain font face à l’augmentation des flux de marchandises et de la circulation des personnes, dans le sillage de leur développement économique. Toutefois, le fret ferroviaire africain ne représente qu’environ 7% du volume global alors que le transport de passagers via le rail ne pèse que 2% du trafic de passager mondial. Or, si l’Afrique affiche des taux de croissance globalement favorable, il est certain que sans train, point d’industrialisation, ni d’échanges commerciaux. D’ailleurs, l’une des principales explications de la faiblesse du commerce intra-africain reste l’absence des chemins de fer pour le transport de marchandises.

Cette situation pousse presque tous les pays africains à investir dans le rail.

Maroc: le premier TGV africain circulera en 2018

Le Maroc, dans le cadre du contrat programme 2010-2015, signé entre l’Etat et l’ONCF, prévoit de réaliser un important programme d’investissement de 2,87 milliards d’euros pour le réseau ferroviaire. La principale composante de ce projet est la réalisation de la Ligne à grande vitesse (LGV) d’une longueur de 350 km devant relier Tanger à Casablanca. Celle-ci va nécessiter un investissement de 1,8 milliard d’euros.

Cette LGV sera exploitée à raison de 320 km/h entre Tanger et Kenitra et à 200 km/h entre Kenitra et Casablanca. Ce train à grande vitesse permettra ainsi de relier Tanger et Casablanca en 2h10, contre 4h45mn actuellement, avec un trafic attendu de 6 millions de passagers contre 2 millions actuellement.

L’état d’avancement de la LGV dépasse actuellement les 85% et les essais techniques des rames fournies par le français Alstom sur les voies démarreront à fin 2017. La mise en service est prévue pour début 2018. Le Maroc sera ainsi le premier pays africain à faire circuler un TGV.

Au delà du TGV, le Maroc détient le second réseau ferroviaire du continent africain, après celui de l’Afrique du Sud. Celui-ci est composé de 2.200 km de lignes dont 30% à double voie et plus de 1.000 km de lignes électrifiées à courant continu et reliant toutes les grandes villes du royaume, à l’exception d’Agadir. Ce réseau permet actuellement le transport d’environ 50 millions de passagers et 50 millions de tonnes de marchandises.

Ethiopie : le corridor Ethiopie-Djibouti en attendant un maillage régional

L’Ethiopie, l’un des pays à économies des plus dynamiques du continent à la particularité d’être totalement enclavée. Ainsi, la quasi-totalité des importations et des exportations du pays passe par le port de Djibouti. Le ravitaillement du pays était ainsi assuré par un flot continu de camions qui relier les capitales des deux pays en plusieurs jours.

Depuis quelques mois, une ligne ferroviaire longue de 760 km relie Addis Abeba à Djibouti.

Ethiopie: inauguration d'un train chinois pour relier Addis Abeba au port de Djibouti

Cette ligne Addis-Abeba–Djibouti a nécessité un investissement de 3,4 milliards de dollars, couvert à hauteur de 70% par la Chine, le reliquat étant assuré par l’Etat éthiopien. Cette ligne permet désormais de relier les deux capitales en seulement 9 heures de temps, alors qu’il fallait 2 à 3 jours pour les camions lourdement chargés pour parcourir cette distance avec des pistes difficiles. 

Au-delà de la réalisation de ce chemin de fer dédié principalement au fret, l’Ethiopie en plein boum économique projette de construire 5000 km de voies ferrées d’ici 2020. L’objectif étant de relier cette ligne Addis Abeba- aux capitales des pays limitrophes : Kenya, Soudan et Soudan du Sud.

La boucle du Niger pour relier les pays d’Afrique de l’ouest

Presqu'un siècle qu’on en parle mais sa réalisation pose problème. La Boucle du Niger, baptisée «BlueLine» devrait relier par les rails la Côte d’Ivoire, le Burkina Faso, le Niger, le Bénin et le Togo, soit 2.700 km à travers l’Afrique de l’ouest.

Cameroun: Bolloré promet de co-investir 224 milliards de F Cfa dans le rail

Après plusieurs tergiversations, le groupe Bolloré Africa Logistics, très présent au niveau de la région via les ports de la région, avait envisagé un investissement de 2,5 milliards d’euros dans ce projet. Cet investissement devrait permettre la réhabilitation des tronçons existants mais qui datent de la période coloniale et la construction d’autres tronçons. Avec ce chemin de fer, le groupe Bolloré souhaite profiter des synergies entre le rail et les terminaux à conteneurs qu’il gère dans différents ports de la région, notamment en Côte d’Ivoire, au Bénin et au Togo.

Reste que la Boucle du Niger a du mal à se concrétiser à cause actuellement de multiples obstacles légaux, judiciaires et/ou politique. Les travaux sont à l’arrêt au Bénin du fait que l’homme d’affaires Samuel Dossou conteste l’octroi du marché au groupe français. Il avait signé une convention portant sur la construction et l’exploitation du tronçon Cotonou-Niamey, d’environ 1.000 km.

Le East Africa Railway, le projet ferroviaire est-africain

C’est incontestablement l’un des projets ferroviaires les plus importants du continent africain. Le East Africa Railway vise à relier le port kenyan de Mombassa à Nairobi aux capitales des pays riverains : Kampala (Ouganda), Kigali (Rwanda) et Juba (Sud-Soudan). Il est même question de relier ce réseau au Burundi. Il s’agit d’un projet global portant sur une longueur de 2935 km à écartement standard. Il vise notamment à donner une nouvelle impulsion aux échanges commerciaux au niveau de la région et surtout de contribuer au désenclavement du Rwanda.

Le coût global de ce projet est estimé à 10 milliards d’euros. Il est financé par la China Exim bank et construit par China road and bridge corporation (CRBC). Le premier tronçon de ce projet lancé en novembre 2013 va relier Mombassa à Nairobi, la capitale du Kenya, sur une distance de 609 km pour un investissement de 4 milliards de dollars. Cet investissement est financé à hauteur de 90% par EximBank Chine. La réalisation de ce tronçon permettra de renforcer la position de hub logistique en Afrique de l’Est.

Accord avec le chinois CCCC pour l'extension du chemin de fer Nairobi-Malaba

Cette première tranche du projet East Africa Railway devrait être opérationnelle d’ici juin 2017. Ce qui permettra de multiplier par 10 le trafic de marchandises de l’actuelle ligne. Quant aux liaisons Mombassa-Kampala et Mombassa-Kigali, leurs achèvements sont attendus pour 2018.

Nigeria : le plus gros projet ferroviaire du continent

3.200 kilomètres, c’est la longueur du réseau à «grande vitesse» (jusqu’à 150 km/h) qui doit relier les grandes villes nigérianes -Lagos, Kano, Kaduna, Bauchi, Abuja et Port Harcourt- et qui comptera 45 gares. Il s’agit de la construction et de la réhabilitation de lignes existantes. La première tranche de ce réseau reliant Lagos à Kaduna a été inaugurée en juillet dernier.

Dans le cadre de ce projet, il est prévu la réalisation d’une ligne ferroviaire longeant les côtes du pays sur plus de 1.400 km. Pour réaliser cet important projet, le gouvernement nigérian et China railway construction corporation ont signé en novembre 2014 un contrat de 12 milliards de dollars devant relier Lagos à Calabar, à l’est du pays, à la frontière camerounaise, en traversant le Delta du Niger. C’est le plus gros contrat signé par une entreprise chinoise avec un pays africain.

En Afrique de l’ouest, l’autre projet important reste la réhabilitation de la ligne Dakar-Bamako qui relie le Sénégal au Mali et qui a été inaugurée en 1923. Les deux pays ont signé avec le chinois China Railway construction corporation international (CRCCI) pour reconstruire entièrement la ligne Dakar-Bamako. Cette ligne devrait, une fois réhabilité, permettre le transport de 6 millions de tonnes de marchandises et 2 millions de passagers par an. En attendant, ce sont plus de 254 camions de transport de marchandises qui relient quotidiennement les deux pays pour désenclaver le Mali.

Sénégal-BID: 300 millions d’euros en faveur du Train express régional

La réhabilitation de cette ligne va nécessiter 4 ans de travaux et un investissement global de 2,6 milliards d’euros.

Au niveau de l’Afrique australe, les gouvernements du Botswana, du Mozambique et du Zimbabwe ont aussi signé un accord visant la réhabilitation et la construction d’une ligne de chemin de fer longue de 1.500 km. Avec ce projet, les trois pays espèrent faire passer le trafic de marchandises de 2 millions de tonnes actuellement à 12 millions de tonnes. Le Botswana, pays enclavé, sera le grand bénéficiaire de cette ligne ferroviaire. D’ailleurs, afin d’atténuer son enclavement, ce pays est engagé sur un autre projet avec la Namibie, le Trans Kalahari Railway visant à relier la capitale Gaberone au port namibien Walvis Bay.

Par Moussa Diop
Le 27/11/2016 à 18h03, mis à jour le 27/11/2016 à 18h16