Le moins que le puisse dire, c’est que la Journée mondiale du conte revêt un cachet particulier cette année au campus universitaire de Libreville. L’événement est baptisé L’arbre à livres. Il s’agit d’un rassemblement de professionnels du conte dont l’objectif est de promouvoir la diversité culturelle et la sauvegarde du riche patrimoine oral du Gabon. Au programme de cette manifestation, des expositions d’œuvres d’auteurs connus, la lecture des textes et les jeux de société tels que le scrabble, le ludo et le songo.
Pour les ethnologues et les linguistes, le conte reste un puissant vecteur de formation et d’enseignement. «La vulgarisation du conte doit passer par la vulgarisation de la lecture. Or, nous sommes dans un pays où les gens ne lisent pas beaucoup. En plus, on a coupé les liens avec le village. Parce que les contes étaient déclamés où? au village, pas en ville. Or, aujourd’hui combien d’enfants écoutent-ils encore ces contes de leur grand-mère, de leur grand-père? Plus personne», regrette De Charlie Mapangou, enseignant au département des lettres modernes à l’Université Omar Bongo (UOB).
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C’est en rappelant l’importance du conte dans une société que les organisateurs de l’événement insistent sur le retour aux fondamentaux de la culture. Car comme on peut le voir à travers la douzaine de textes déclamés par les étudiants sur scène, les contes demeurent des trésors immatériels et autant de témoignages du passé. Clarisse Mabiti, une jeune étudiante en littératures africaines, a présenté un texte tiré d’un différend entre une belle-mère et sa bru autour d’une calebasse malencontreusement brisée. Il lui fallut aller au pays des morts, solliciter l’aide de sa défunte mère pour réparer le dommage causé.
«Durant cette aventure, elle fera des rencontres extraordinaires avec des êtres étranges, voire bizarres. Le tout sera couronné de succès. La bru sera bénie», raconte-t-elle.
Plusieurs observateurs estiment, cependant, qu’avec les nouvelles technologies et l’émergence des réseaux sociaux comme Facebook, les contes et légendes ont tendance à disparaître dans les sociétés africaines. Même dans les villages où les contes étaient dits au clair de lune, ils se raréfient ou n’existent tout simplement plus. Cette situation désole l’organisatrice de la première édition de L’arbre à livres.
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«Avec les mutations sociales, on se rend compte que les dépositaires de ce patrimoine oral ne les disent plus ou les ont oubliés. Et vous voyez que les jeunes d’aujourd’hui préfèrent les réseaux sociaux et dans ces réseaux sociaux ils s’intéressent à tout sauf aux contes...Cette manifestation en directe ligne avec la promotion du néo conte. Parce que ces néo conteurs s’inspirent des contes traditionnels et en créent de nouveaux. Parce qu’effectivement, ils parlent de questions qui nous préoccupent aujourd’hui», affirme Pr. Léa Zame Avezo’o, présidente du club Littérature verte.
De génération en génération, un grand nombre de contes ont été recueillis, transcrits et traduits dans une volonté de fixer l’héritage de la tradition orale menacée de disparition. Le conte contribue à renforcer le dialogue entre les civilisations, car c’est en découvrant l’autre que l’on parvient à le connaître et par là, à respecter son identité culturelle.