Dans le sillage de la reprise de l’économie mondiale, parallèlement à la décrue des contagions de la pandémie du Covid-19, le cours du baril de pétrole, à l’instar de nombreuses matières premières, connaît une certaine envolée. Ainsi, à la clôture de la journée du 23 juin 2021, le cours du Brent de la mer du Nord s’est établi à 75,54 dollars, soit son plus haut prix depuis octobre 2018. A ce niveau, il est plus de trois fois supérieur à celui du cours du baril de début mars 2020.
Après avoir subi de plein fouet les effets négatifs de cette chute du cours de l’or noir, qui a fortement contribué à la récession économique de tous les producteurs de pétrole africains, sans exception, et à l’explosion de leurs déficits budgétaires, entrainant pour certain un recours massif à l’endettement extérieur, l’heure est aujourd’hui à l’optimisme.
En effet, les cours du baril ont dépassé les espérances des producteurs africains en se situant au-delà des hypothèses dans les lois de Finances des pays producteurs de pétrole: Nigéria, Angola, Algérie, Libye, Guinée équatoriale, Congo, Gabon, Tchad,…
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Seulement, au lieu d’investir dans la diversification de leurs économies, les dirigeants oublient rapidement la crise avec les rentrées de devises et s’engagent dans des dépenses non productives, notamment les subventions pour acheter la paix sociale et surtout les achats d’armes permettant aux dirigeants et généraux de l’armée de tirer d’importantes commissions au passage. C’est le cas en l’Algérie qui, en dépit des déficits budgétaires abyssaux, n’a pas réduit ses achats d’armes auprès de son principal fournisseur, la Russie.
Ainsi, le niveau du cours du baril ne signifie pas la fin des problèmes des producteurs africains qui affichent des déficits budgétaires colossaux et qui ont besoin de cours de pétrole beaucoup plus élevés pour retrouver l’équilibre budgétaire.
A titre d’illustration, l’Algérie a besoin, selon le FMI, d’un cours moyen du baril de pétrole de 169 dollars le baril pour renouer avec l’équilibre budgétaire.
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Pire, à chaque crise pétrolière, les pays rentiers africains mettent en avant la nécessité de diversifier leurs économies et de sortir du tout pétrole. Toutefois, ces politiques de diversification sont rapidement mises en sourdine à chaque flambée des cours, alors que c’est la période faste pour rediriger une bonne partie de revenus engranger vers d’autres secteurs productifs. En 2014, le prix du baril avait atteint 140 dollars, permettant aux pays africains d’amasser de conséquents revenus. Un pays comme l’Algérie avait vu ses réserves en devises franchir les 194 milliards de dollars.
Seulement, les revenus ont été rapidement engloutis dans des dépenses improductives, notamment des achats d’armes et d’autres dépenses non essentielles (subventions et investissement de prestige) sans se soucier de la diversification économique et de la réduction de leur dépendance vis-à-vis du pétrole.
La mise en place de fonds souverains devait faciliter les politiques de diversification des Etats africains et constituer des amortisseurs face aux chocs grâce à des placements bien étudiés et une gestion rigoureuse.
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Pourtant, l’absence de sérieux dans leur gestion fait qu’aucun fonds souverain n’a réellement fonctionné au niveau du continent. Le seul fonds souverain du continent qui était relativement bien géré était le Libyan Investment authority (LIA) fondé en 2006 et dont les actifs avaient atteint 67 milliards de dollars à la veille de la révolution, avant qu’ils ne soient gelés par les Nations unies en 2011. Les Etats-Unis, le Royaume-Uni, la France et l’Allemagne avaient en effet bloqué respectivement 23,8, 13,6, 7,7 et 7 milliards de dollars du LIA. Ce fonds détient des participations dans près de 550 sociétés (Siemens, UniCredit, Royal Dutch Shell, Eni, Vodafone, Pearson, etc.)
Tous les revenus des autres fonds des pays pétroliers africains ont été dilapidé ou détournés par leurs gérants. C’est le cas du Fonds de régulation des recettes (FFR) de l’Algérie, créé en 2000, alimenté par l’excédent des revenus des hydrocarbures. Il avait atteint 4.400 milliards de dinars, soit 40 milliards de dollars à l’époque, et a été liquidé en 2017. L’Etat s’était servi pour financer le déficit budgétaire et acheter la paix sociale à coup de subventions. Idem pour le Fonds souverain angolais qui était géré par le fils de l’ancien président Dos Santos et dont une partie des fonds a été détournée.
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A part le Libyan Investment authority, les pays africains producteurs de pétrole n’ont donc pas été en mesure de développer de fonds souverains. Et en conséquence, ils sont désarmés face aux fluctuations des cours du pétrole.
La mise en place de ces fonds souverains est d'autant plus essentielle que plusieurs pays africains sont dans une situation de déclin pétrolier.
En outre, les pays pétroliers du continent devraient engager des réformes structurelles afin de réduire les dépendances de leurs budgets aux recettes pétrolières. A titre d’exemple, les recettes budgétaires de l’Algérie et du Nigéria dépendent respectivement à hauteur de 55-60% et 50% des recettes pétrolières. par conséquence, à chaque chute du cours du baril, le déficit se creuse poussant les pays à recourir à l’emprunt international ou à geler leurs projets de développement. De même, la gouvernance des pays pétroliers africains doit évoluer afin de permettre la transparence dans la gestion de la rente pétrolière, qui reste opaque.
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En tout cas, le cours du baril pourrait se maintenir encore à un niveau relativement élevé grâce à une conjonction de deux facteurs. D’abord, il y a l’effet de la reprise économique qui concerne presque tous les pays, comme en atteste les dernières prévisions revues à la hausse de la croissance de l’économie mondiale par le FMI et la Banque mondiale. Une croissance qui sera tirée par les premières puissances économiques mondiales, les Etats-Unis et la Chine, qui sont aussi les plus grands consommateurs d’énergie du monde. Et c’est cette demande mondiale vigoureuse qui tire le baril de pétrole vers le haut. Ensuite, il y a l’impact des quotas fixés par les pays de l’OPEP+ qui permettent d’équilibrer l’offre et la demande de pétrole sur le marché en limitant volontairement la production de l’or noir, en exerçant mécaniquement une pression à la hausse du prix de l’or noir.
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Reste que cette hausse demeure fragile. Le retour éventuel de l’Iran sur le marché pourrait freiner la hausse du cours du baril avec l’injection de plus de 1 million de barils supplémentaires. L’élection du nouveau président Ebrahim Raïssi va-t-elle faciliter les discussions avec les Etats-Unis sur le nucléaire iranien et entrainer le retour du pétrole iranien sur le marché? Ensuite, le niveau actuel des prix pourrait pousser certains producteurs de l’OPEP+ à ouvrir davantage les vannes. Les producteurs de l’Organisation des pays exportateurs de pétrole (OPEP) et leurs alliés dont la Russie, formant l’OPEP+, vont se retrouver le 1er juillet prochain pour statuer sur leurs quotas de production à compter du mois d’août.
En outre, le cours du baril de pétrole restera élevé, si et seulement si, la demande mondiale demeure vigoureuse. Ce qui dépend fortement de l’évolution de la pandémie du Covid-19. Les campagnes de vaccination devraient contribuer à freiner la propagation de la pandémie, notamment dans les pays développés et ce, en dépit de l’apparition des variants plus contagieux.