Algérie-Niger-Mali: des ONG accusent les autorités de jeter des centaines de migrants dans le désert

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Le 24/09/2016 à 09h13, mis à jour le 24/09/2016 à 13h11

Des Maliens sont expulsés vers le Niger. D'autres migrants sont jetés dans le désert. Pour les autorités algériennes, les expulsions sont justifiées par le climat d’insécurité. Les ONG trouvent cet argument léger et la presse dénonce un agenda opaque et des méthodes qui desservent.

Kiosque Le360 Afrique. Des Maliens vivant en Algérie peuvent se retrouver du jour au lendemain dans une ville nigérienne. Ça c'est pour les plus chanceux, car d'autres ont droit au désert. Durant les deux dernières années, le nombre de migrants nigériens expulsés vers leur pays d’origine est en croissance constante et se fait dans les conditions très critiquées par les ONG et la presse algérienne. En effet, l’Algérie est accusée de jeter des centaines de migrants dans le désert à la limite des frontières entre les deux pays.

"Des migrants jetés dans le désert"

"Notre pays ne doit pas expulser des centaines de personnes dans le désert et les abandonner à la famine, aux contrebandiers, aux dangers», assène Salim Hirèche, militant des droits de l’homme. Mais ce dernier s’en prend à la société algérienne tout entière, qui aurait du mal à accepter ces étrangers venus du Sud et qui ont toujours constitué une migration saisonnière. Cette situation est le résultat du "rapport qu’a la société avec eux", s’indigne ce militant qui a passé une dizaine d’années dans l’association, selon El Watan

"Pour les militants des droits de l’homme et les experts, ces expulsions abusives desservent la coopération et le développement régional", prévient d’emblée le quotidien algérien.

Mais l’accusation est balayée d’un revers de main par les officiels algériens. "Non!", s’insurge un représentant du ministère des Affaires étrangères, ajoutant que "l’Algérie ne jette pas des migrants et des réfugiés dans le Sahara algérien ni au travers du désert". Selon lui, "l’expulsion n’est pas automatique. Et le contexte sécuritaire régional en est le principal" facteur qui oriente la décision du ministère de l’Intérieur d’expulser ou non des migrants. Sauf que "pour beaucoup d’associations et d’ONG, l’argument du sécuritaire est léger, car un migrant ne cherche pas les problèmes, il veut juste une carte de séjour et un travail", explique à son tour le confrère de la presse algérienne.

Des Maliens qui se trouvent à Agadez

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Salim Hirèche revient à la charge en précisant que "si on se braque en appliquant les mêmes méthodes qu’en Europe, nous servirons au renforcement des politiques répressives instaurées comme en France".

En réalité, l’Algérie profite de l’accord signé avec le Niger en 2014 pour vider ses grandes villes des migrants subsahariens. C’est du moins l’avis de plusieurs avocats et autres défenseurs des droits des migrants ou des droits de l’Homme. "Les autorités algériennes remplissent des bus sans avoir la confirmation que certains migrants sont bien des Nigériens", affirme toujours Hirèche. C’est le cas notamment d’Awa que des agents de sécurité ont "obligée à prendre le bus avec son enfant de deux ans, alors qu’elle était dans les rues d’Alger".

400 Maliens rapatriés en bus

Sauf qu'Awa est malienne et elle affirme ne connaître personne à Agadez où on l’a amenée. Jointe au téléphone par El Watan, elle dit espérer rentrer "dans son village au Mali. Même si personne ne l’y attend, au moins elle sera dans son pays".

Toujours selon le journal, "en août dernier, plus de 400 Maliens ont été expulsés de Tamanrasset par bus, après des heurts avec les habitants. Ces événements ne sont pas les premiers, car les mêmes épisodes se sont produits à Ouargla et à Béchar, dont les bilans sont toujours lourds" . Et Hirèche de conclure : "L’Algérie peut mieux faire dans le domaine des droits de l’homme, des réfugiés et des migrants. Les lois doivent être reconsidérées, elles ne sont pas figées".

Par Mar Bassine Ndiaye
Le 24/09/2016 à 09h13, mis à jour le 24/09/2016 à 13h11