La présentation tant attendue ce dimanche du Plan d’action du nouveau gouvernement d’Ahmed Ouyahia a été loin de répondre aux attentes des Algériens. Malgré la durée de son discours, aucun plan d’action de sortie de crise n’a été effloré.
Les seules choses auxquelles les Algériens ont eu droit sont relatives aux explications sur les origines de la crise et aux bienfaits du recours à la planche à billets, la découverte d’un mode de financement miraculeux.
Pour la crise, la faute revient uniquement de la chute des cours du baril de pétrole à partir de 2014. Donc, le gouvernement algérien n’y est pour rien car c’est un phénomène exogène. Toutefois, grâce aux bonnes directives du président la mise à sec du Fonds de régulation des recettes (FRR) pour répondre aux aspirations des Algériens a permis de limiter les effets négatifs de cette crise. Ouyahya aurait été plus juste s’il avait souligné que ce fonds a servi a acheté la paix sociale face à l’échec des gouvernement successifs à mener des transformations structurelles à même de sortir l’Algérie de la dépendance de la rente pétrolière.
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En clair, si les Algériens souhaitent voir le bout du tunnel, ils doivent tout simplement prier pour que le cours du baril de pétrole retrouve le seuil des 100 dollars.
Par ailleurs, Ouyahia s’est lancé dans l’explication des bienfaits de la planche à billets. Des explications aux antipodes de toutes les théories économiques. Il justifie le recours à la planche à billets aux algériens comme une panacée. Et pour illustrer que c’est la meilleure option, Ouyahya donne en exemple les pays qui ont eu recourt à ce remède en comparant son pays aux Etats-Unis et au Japon. Seulement, le dollar et le yen en sont des devises auxquels les investisseurs et les Etats ont confiance alors que le dinar n’est utile que dans les frontières algériennes.
Pire, avant même l’annonce du recours à la place à billets pour financer les déficits budgétaires du pays, le dinar algérien ne cessait de perdre de sa valeur par rapport au dollar et à l’euro. Et cette dépréciation va encore croître avec le recours de la planche à billets. Les exemples de pays ayant recouru à la planche à billets et qui ont vu leurs monnaies devenir des monnaies de singe sont légions : Zimbabwe, Venezuela, RD Congo, etc… Ainsi, quand Ouyahya avance que ce remède n’aura aucun impact sur les ménages algériens, il ne trompe personne. La dépréciation continue du dinar algérien entrainera inéluctablement une inflation galopante qui ruinera le pouvoir d’achat des ménages.
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Toutefois, dans son message on comprend bien les raisons qui sous-tendent le recours à la planche à billets. Outre la résorption des déficits budgétaires qui se creusent au cours de ces dernières années, la planche à billets permettra à l’Etat de rembourser ses dettes vis-à-vis des opérateurs économiques algériens. Ainsi, selon le Premier ministre, «sans le financement non conventionne l’Algérie sera obligée d’emprunter auprès du FMI 20 milliards de dollars annuellement».
En outre, avec ce moyen de financement non conventionnel, l’Etat algérien peut éviter toute hausse des impôts dans la loi de finances 2018 et éviter ainsi des troubles sociaux.
Toutefois, en insistant sur le fait que la planche à billets n’aura que des «effets bénéfiques» sur les citoyens, Ouyahya trompe lourdement les algériens. La planche à billets entrainera inéluctablement une dépréciation du dinar algérien vis-à-vis des devises étrangères et une perte de valeur au niveau du marché local. L’exemple du Venezuela est à craindre.
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Bref, sans véritablement proposer un plan d’action de sortie de crise, Ouyahya annonce que les reformes seront poursuivies et que son gouvernement va agir dans 12 directions dont la stabilisation du cadre juridique et réglementation des affaires, élaboration d’une carte d’opportunités d’affaires, le maintient des avantages fiscaux et parafiscaux, la mise à niveau des entreprises publiques, la satisfaction de la demande du foncier industriel, la réactivation des aides agricoles, la préférence à la production nationale, la promotion des exportations hors hydrocarbures, etc.
Que des généralités. Dans ces conditions, on voit mal le gouvernement Ouyahya sortir l’Algérie de la crise. L’échec des gouvernements passés s’explique essentiellement par leur incapacité à diversifier l’économie algérienne. Malheureusement, à entendre Ouyahya, qui n’a avancé aucun objectif chiffré à atteindre, ni des reformes structurelles, on peut affirmer que l’Algérie n’est pas prête de sortir de la crise. Toutefois, à deux ans des élections présidentielles, le gouvernement algérien, face à la montée des tensions sociales, préfère faire semblant d’agir et ne pas méconteter le peuple en espérant que la planche à billets fasse le reste... L'horizon n'est pas la reprise économique qui dépendra de l'évolution du cours du baril mais de l'écheance présidentielle dde 2019.