Algérie. Affaire Sovac, une lourde peine requise à l’encontre de l’ancien Premier ministre Ouyahyia

De gauche à droite: Ahmed Ouyahia, ancien Premier ministre, Mourad Oulmi, PDG de Sovac, et Abdeslam Bouchouareb, ex-ministre de l’Industrie.

De gauche à droite: Ahmed Ouyahia, ancien Premier ministre, Mourad Oulmi, PDG de Sovac, et Abdeslam Bouchouareb, ex-ministre de l’Industrie.. DR

Le 19/06/2020 à 13h22, mis à jour le 19/06/2020 à 13h57

Le procureur du tribunal de Sidi M’Hamed a requis de lourdes peines contre l’ancien Premier ministre Ouyahia, l’ancien ministre de l’Industrie Abdeslam Bouchouareb, le PDG du groupe Sovac Mourad Oulmi et d’autres personnes impliquées dans le fiasco de l'industrie automobile algérienne. Les détails.

Les procès du fiasco de l’industrie de montage automobile algérienne se poursuivent avec les auditions des principaux protagonistes politiques et industriels. Le mercredi 17 juin, c’est le procès de la famille Oulmi qui s’est ouvert, avec à la barre les frères Mourad Oulmi, PDG du groupe Sovac qui assurait le montage des voitures pour les marques Volkswagen, et son frère Khider Eulmi l’ancien Premier ministre d’Abdelaziz Bouteflika Ahmed Ouyahia et l’ancien ministre de l’Industrie Youcef Yousfi.

Au terme des auditions des accusés dans l’affaire «Sovac», on peut dire que le procureur du tribunal de Sidi M’Hamed n’a pas été tendre envers les accusés.

Il a ainsi requis 15 ans de prison ferme à l’encontre du principal accusé, l’oligarque Mourad Oulmi et une amende de 8 millions de dinars algériens. Pour son petit frère, Khider Eulmi, le procureur a requis 12 ans de prison assortis d'une amende de 8 millions de dinars.

Les membres de la famille Oulmi sont accusés de «blanchiment d’argent, transfert de biens issus de revenus criminels et usages de crédits financiers bancaires de façon contraire aux intérêts de la banque». Ils sont également accusés de trafic d’influence et de pression sur des fonctionnaires publics pour l’obtention d’indus privilèges.

De même, une peine de 15 ans et une amende de 2 millions de dinars ont été requises à l’encontre de l’ancien Premier ministre Ahmed Ouyahia.

L’ancien Premier ministre est accusé d’«octroi d’indus avantages lors de la passation de marché en violation des dispositions législatives et règlementaires», «abus de fonction», «conflit d’intérêts en matière de passation de marchés» et «dilapidation de deniers publics».

Rappelons que l’ancien Premier ministre Ahmed Ouyahia a été condamné à 12 ans de prison dans une autre affaire de corruption du secteur automobile et de financement de la campagne électorale de Abdelaziz Bouteflika pour un cinquième mandat.

La même peine a été requise contre l’ancien ministre de l’Industrie Youssef Yousfi.

La main du procureur a été plus lourde à l’encontre des accusés qui ont fui à l’étranger. Ainsi, le procureur a requis, à l’encontre de l’ancien ministre de l’Industrie Abdesalam Bouchouareb et de l’épouse de Mourad Eulmi, 20 ans de prison et 8 millions de dinars d’amende pour chacun.

Cette procédure s'inscrit dans une série de procès qui touchent les oligarques à la fois présents dans le secteur du montage automobile et proches du clan Bouteflika, et qui sont actuellement en prison, dont Mahieddine Tahkout du groupe Tahkout. Mohamed Bairo, PDG de Iveco Algérie, Ahmed Mazouz, du groupe Mazouz, Hassan Larbaoui, PDG de Kia Algérie, etc.

Ces procès du secteur automobile montrent combien les politiques et les oligarques impliqués ont tiré profit du système pour s’enrichir en faisant semblant de développer une industrie automobile en Algérie.

Suite à ce fiasco qui a fait perdre au pays plusieurs milliards de dollars, toutes les chaînes de montage automobile en Algérie sont aujourd’hui à l’arrêt. Selon le ministre de l’Industrie, Ferhat Aït Ali, «toute cette industrie (...), tout ce qui est CKD, de la téléphonie jusqu’aux véhicules, ne faisait qu’importer tous les composants de produits finaux qui arrivaient déjà assemblés. Parfois même emballés». Ainsi, en 20 ans, ce sont 50 milliards de dollars qui se sont évaporés dans le fiasco d’une «industrie automobile».

Les peines requises sont à l’image de la déception procurée par le secteur automobile algérien aujourd'hui complètement à l'arrêt. Il est certain que les peines seront lourdes.

Par Karim Zeidane
Le 19/06/2020 à 13h22, mis à jour le 19/06/2020 à 13h57