Les gouvernements Sellal, Tebboune et Ouyahia qui se sont succédé durant les dernières années de l’ère Bouteflika avaient tous échoué à donner une vision stratégique au développement industriel du secteur automobile algérien.
Le gouvernement de transition de Bédoui avait reconnu l’échec de cette politique, avant de bloquer les importations de kits automobiles (CKD/SKD) entraînant de facto l’arrêt du secteur du montage.
Alors que l’on pouvait croire que le nouveau gouvernement algérien avait tiré les conclusions du fiasco et pourrait relancer le secteur automobile sur des bases saines et solides, la sortie du ministre de la Communication et porte-parole du gouvernement, Ammar Belhimer, est venue doucher les espoirs.
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Ainsi, selon le ministre, l’Algérie va exiger des opérateurs qui vont s’implanter un taux d’intégration de 50% au bout de la 5e année dans l’industrie d’assemblage. Plus explicitement, «le projet de décret présenté par le ministre de l’Industrie vise à développer un réseau de sous-traitance dense pour arriver à un taux d’intégration locale de 50% au bout de la 5e année».
Or, on ne peut pas développer un secteur comme celui de l’automobile simplement à coup de décrets. Exiger un tel taux d’intégration en un délai si court, alors qu’on note la quasi-absence de sous-traitants et de fournisseurs d’équipements locaux, est irréaliste. Construire un écosystème automobile prendra du temps.
L’exemple marocain devrait constituer une boussole pour les dirigeants algériens. En effet, pendant plusieurs décennies de montage automobile, le Maroc n’a pas exigé un tel taux d’intégration, ce qui aurait risqué de décourager les constructeurs mondiaux à s’implanter au Royaume. La Société marocaine de construction automobile (SOMACA) a été créée en 1959 à l’initiative du gouvernement, avec l’assistance technique de l’italienne Fiat et de la société franco-italienne Simca. La présence de fournisseurs automobiles au Maroc remonte donc à bien avant l’implantation de Renault à Tanger.
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Il a fallu plusieurs années d’incitations aux fournisseurs mondiaux, pour les faire s’implanter au Maroc et créer un véritable écosystème automobile. Celui-ci a permis petit à petit d'améliorer le taux d’intégration locale qui se situe actuellement autour de 55% avec un objectif de le porter à 65% à l’horizon 2023. Renault avait déjà trouvé des fournisseurs au Maroc avant de contribuer à densifier ce réseau qui dépasse actuellement plus de 300 sous-traitants et équipementiers.
Et c’est fort de cette expérience, et de la présence de nombreux fournisseurs, que PSA s’est engagé à démarrer son unité de Kénitra avec un taux d’intégration de 60%.
En outre, le contexte actuel n’est pas des plus favorables pour attirer des constructeurs très marqués par la conjoncture défavorable liée aux conséquences du Covid-19. Partant, vouloir leur imposer un taux d’intégration de 50% en l’espace de 5 ans risque d’en décourager plus d’un, et ce en dépit de la levée de l’obstacle de la règle des 51/49% qui obligeait les étrangers à ne pas détenir plus de 49% du capital des entreprises dans lesquelles ils investissent.
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Par ailleurs, pour un taux d’intégration élevé, il faut disposer d’un écosystème automobile formé de fournisseurs et d’équipementiers à même de répondre à la demande des constructeurs. Or, l’Algérie n’en dispose pas actuellement, contrairement au Maroc et dans une moindre mesure mesure la Tunisie.
En outre, si l’Algérie, qui est le second marché automobile du continent après l’Afrique du Sud, n’arrive pas à attirer les constructeurs automobiles, c’est que l’environnement des affaires n’y est pas favorable. Du coup, avec les autorisations d’importation de véhicules, les constructeurs risquent de ne pas se précipiter du fait de cette exigence.
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En conséquence, il faudra surveiller les constructeurs qui s’engageront à atteindre 50% d’intégration en 5 ans et qui devront partir d’un taux de 0% pour les nouveaux arrivants, ou d’un taux proche, pour ceux qui sont déjà implantés, comme celui de Renault qui reste inférieur à 10%, selon les autorités.
Mais, à l’instar des précédents gouvernements, les dirigeants actuels n’ont pas de vision stratégique pour le secteur automobile algérien en particulier et pour l’industrie en général. Il faudrait revoir tout l’environnement des affaires pour espérer attirer les constructeurs mondiaux en ces périodes de crises multiples.