La Banque mondiale vient de rendre public son rapport intitulé «Rapport de suivi de la situation économique: redresser l’économie algérienne après la pandémie». D’emblée, les rédacteurs du rapport annoncent la couleur en soulignant que «l’Algérie profite d’un répit temporaire alors que les prix des hydrocarbures atteignent de nouveaux sommets et que la pression de la pandémie de Covid-19 se relâche».
Le ton est ainsi donnée pour signifier clairement que l’évolution de l’économie algérienne, que les autorités essaient d’embellir en se basant sur un soi-disant «excédent commercial» à fin novembre et un niveau des réserves en devises à 44 milliards de dollars, n'est que l'effet d’une conjoncture favorable marquée par la flambée des cours des hydrocarbures, particulièrement du gaz.
En effet, au niveau macroéconomique, la flambée des cours du baril de pétrole et du gaz et l’augmentation de la production gazière en 2021 ont permis à l’Algérie d’afficher au premier semestre 2021 un PIB de 3,1% et un PIB hors-hydrocarbures de 3,9%. Des taux cependant inférieurs à ceux enregistrés avant la pandémie et ce, malgré une politique monétaire accommodante.
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Seulement, «en l’absence d’une mise en œuvre rapide de l’agenda de réforme, la reprise sera fragile et les soldes budgétaires et extérieur se détérioreront à moyen terme», souligne la Banque mondiale. Ainsi, l’institution, qui prévoit une croissance du PIB réel de 4,1% en 2021, dit s’attendre à une baisse progressive de celle-ci à moyen terme.
Concernant le déficit budgétaire, là aussi, la hausse des recettes tirées des hydrocarbures devrait améliorer la situation, comparativement à l’année précédente, et permettre de compenser la faiblesse des recettes des impôts en recul à cause de la situation des entreprises et de l'interdiction des importations qui ont réduit les droits de douane engrangés par l’Etat.
De plus, le budget de l’Etat bénéficiera de l’effet de la dépréciation du dinar algérien vis-à-vis du dollar, principale monnaie de facturation des exportations algériennes. Elle va ainsi gonfler artificiellement les recettes budgétaires et contribuer à réduire le déficit budgétaire. Toutefois, la relance de l’investissement public et la croissance soutenue des dépenses courantes font que le déficit budgétaire demeurera important en 2021. Et selon les projections, «le déficit budgétaire global devrait s’améliorer en 2021, mais il devrait se dégrader lentement par la suite dans un contexte de diminution attendue des recettes pétrolières et de rebond des dépenses publiques».
Parallèlement, «la dette publique explose en 2021», selon la Banque mondiale, à cause d’«un vaste programme de rachat de créances d’une valeur excédant les 15,3 milliards de dollars» par le Trésor. Il s’agit de rachat de dettes des entreprises publiques en difficulté envers les banques publiques, en échange d’obligation du Trésor. Cette politique a augmenté la dette publique qui représentait 49,8% du PIB en 2020, de 12,9% entre fin 2020 et fin juillet 2021.
En ce qui concerne le déficit du compte courant, celui-ci s’est résorbé au premier semestre de 2021 grâce à la forte hausse des exportations et des recettes tirées des hydrocarbures (hausse des exportations de gaz de 138%) et hors-hydrocarbures (+118%), mais aussi à cause d’une facture des importations qui est restée contenue du fait des interdictions des importations visant à réduire les sorties de devises. Là aussi, tout dépendra de l’évolution future des cours des hydrocarbures. «Le solde du compte courant devrait s’améliorer nettement en 2021 et 2022 avec le pic des exportations d’hydrocarbures, mais se détériorer ensuite», pronostiquent les experts de l’institution de Breton Woods.
Et pour tous ces indicateurs, les experts de la Banque mondiale avancent qu’«en l’absence d’une mise en œuvre rapide de l’agenda de réforme, la reprise sera fragile et les soldes budgétaire et extérieur se détérioreront à moyen terme», avec «la diminution anticipée des recettes pétrolières».
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Du côté des perspectives économiques, «La dépendance intacte de l’Algérie à l’égard des revenus des hydrocarbures, l’apparition de nouveaux variants de la Covid-19 et le rythme des efforts de réformes annoncés restent les principales sources de risques pour les perspectives économiques», expliquent les analystes de l’institution, qui ajoutent aussi qu’«en l’absence d’une mise en œuvre rapide de l’agenda de réforme, la reprise sera fragile et les soldes budgétaire et extérieur se détérioreront à moyen terme».
En somme, la diversification que les autorités n'ont cessé de mettre en avant au cours de ces derniers mois comme une avancée réelle de l'économie algérienne est loin de correspondre à la réalité d'une économie rentière, rythmée uniquement par l'évolution du cours des hydrocarbures.
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Par ailleurs, au niveau de l’inflation, le rapport de la Banque mondiale souligne qu’«en octobre 2021, l’indice des prix à la consommation avait augmenté de 9,2% en glissement annuel, un sommet depuis 2012», rejoignant l’annonce récente du gouverneur de la Banque d’Algérie, tout en expliquant qu’«en raison de la forte hausse de l’inflation alimentaire, le pouvoir d’achat du segment le plus vulnérable de la population a été disproportionnellement affecté en 2021, compte tenu du poids majeur des produits alimentaires dans son panier de consommation».
Et d’autant plus que la hausse des prix est encore plus perceptible au niveau des produits alimentaires avec un indice en hausse de 16,5% en glissement annuel, sous l’effet d’«une récolte décevante, les efforts de rationalisation des subventions et la dépréciation de la monnaie nationale», mais aussi de l’évolution des prix des matières premières importées et des effets des politiques d’interdiction d’importation qui ont entrainé des pénuries en Algérie avec à la clé un déséquilibre entre l’offre et la demande de nombreux produits amenant logiquement à des hausses de prix.
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Une situation inflationniste qui se confirme depuis plusieurs mois en Algérie et qui s’est traduite par des mouvements de grèves de deux des plus importants syndicats du pays, ceux de l’enseignement et de la santé, qui réclament des augmentations de salaires pour compenser les pertes de pouvoir d’achat.
Malheureusement, les prévisions de la Banque mondiale ne sont pas rassurantes. «L’inflation restera élevée sur la période de prévision, dégradant davantage le pouvoir d’achat des ménages», soulignent les rédacteurs du rapport. Cette situation de perte de pouvoir d’achat est aujourd’hui perceptible en Algérie. La hausse des cours de nombreux produits et les pénuries ont réduit très fortement le pouvoir d’achat des ménages.
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En somme, rien de nouveau dans ce rapport de la Banque mondiale qui ne fait que confirmer les réalités économiques que les autorités algériennes elles-mêmes connaissent, mais essaient de masquer en enjolivant des chiffres manipulés. D’où l’incompréhension de cette sortie hystérique de l’APS.