Importations de véhicules neufs en Algérie: le cauchemar s'éternise malgré les promesses des autorités

DR

Le 09/02/2022 à 15h55, mis à jour le 09/02/2022 à 15h56

Les autorités algériennes avaient promu de mettre fin à l’interdiction d’importation de véhicules neufs, en vigueur depuis plusieurs années. Toutefois, la dernière sortie du ministre de l’Industrie prouve que les autorités ont d'autres priorités.

Chacun pensait imminente le retour de l'autorisation d’importation de véhicules neufs par les concessionnaires, mais l'espoir des Algériens d'acquérir enfin des voitures neuves en 2022 s’écroule, avec la dernière sortie du ministre de l’Industrie, Ahmed Zeghdar. Alors que les citoyens algériens attendaient l’annonce précise du début des importations, le ministre de tutelle s'est contenté de dire que le nouveau cahier des charges était prêt et qu’il serait publié prochainement.

En clair, ceux qui avaient cru aux promesses des autorités doivent encore garder leur mal en patience. Il leur faudra attendre la publication du nouveau cahier des charges par les autorités afin que les concessionnaires puissent s’adapter aux nouveaux critères concoctés. La seule certitude est que le président Abdelmadjid Tebboune avait exigé que les futurs concessionnaires agréés puissent disposer, au niveau régional et dans les grandes villes, d'un réseau de services après-vente.

C’est dire que ce retard de la publication du cahier des charges va se traduire inéluctablement par un nouvel ajournement de l'octroi des autorisations d’importation de véhicules neufs aux concessionnaires automobiles qui seront agréés.

Une situation qui décourage aussi bien les citoyens, qui espéraient pouvoir acquérir des véhicules neufs, que les concessionnaires qui pensaient redémarrer leurs activités après plusieurs années d’arrêt.

Les annonces du chef de l’Etat, Abdelmadjid Tebboune, et des ministres, qui se sont succédé à la tête de ce département, sont donc restés lettres mortes. Pourtant, après la saisie du Président par les concessionnaires en décembre 2021, il avait instruit le ministre de tutelle afin d’accélérer la procédure pour autoriser les importations de véhicules. Suite à cette demande, le ministre de l’Industrie avait annoncé que le cahier des charges serait prêt avant fin janvier 2022.

Seulement, comme les précédentes promesses, celles faites en décembre n’ont pas été respectées. Et lors de sa dernière sortie du 7 février 2022, Ahmed Zeghdar a, une nouvelle fois, promis que le dossier serait clos prochainement. Sans beaucoup plus de détails. «Nous avons reçu des instructions du Président pour réviser le cahier des charges. Nous avons apporté quelques ajustements. Il sera publié prochainement. Il y a quelques nouveautés et nous avons levé quelques obstacles», a juste informé le ministre.

Il a, en outre, expliqué que 73 concessionnaires ont déposé leurs dossiers dans l’espoir d’obtenir l'agrément. Il a aussi fait état de 46 recours déposés au bureau des services de son ministère.

Toutefois, concernant la date du début des importations de véhicules neufs, le ministre est resté incapable de donner une réponse précise.

En conséquence, les plus optimistes pensent que les véhicules neufs ne seront pas disponibles avant le second semestre de 2022, alors que les sceptiques tablent sur 2023.

Une chose est sûre, cette sortie, qui repousse encore les autorisations d’importation, ne surprennent. En dépit de l’évolution favorable du cours du baril de pétrole et donc des réserves en devises du pays, les autorités souhaitent préserver les avoirs extérieurs dont le niveau dépend fortement de l’évolution du cours de l’or noir. Or, avec une demande de véhicules neufs pouvant atteindre 350.000 unités par an, surtout après plusieurs années de carence, les autorités craignent que les autorisations d’importation n’entraînent une ruée vers le véhicule neuf, ce qui ferait exploser la facture des importations automobiles.

Cela d’autant que toutes les unités de montage automobiles du pays sont aujourd’hui à l’arrêt et que le pays ne propose donc plus de véhicules neufs depuis plusieurs années.

Or, s’il y a un indicateur que les autorités algériennes surveillent comme le lait sur le feu, c’est celui des réserves de change qui, selon les données avancées par les autorités, se sont reconstituées pour atteindre les 44 milliards de dollars à fin 2021.

Conséquence de cette politique d’interdiction d’importation de véhicules neufs, combinée à l’arrêt des unités de montage automobile, les prix des véhicules d’occasion, qui ont pourtant roulé plusieurs années, ont explosé, coûtant beaucoup plus cher que les voitures neuves, de mêmes marques, qui étaient importées et vendues par les concessionnaires. La voiture n’étant pas un produit de luxe, en l’absence de véhicules neufs, les citoyens algériens n’avaient pas d’autres choix que de recourir aux occasion.

En outre, le non--renouvellement du parc et l’absence de pièces de rechange chez les concessionnaires, dont beaucoup ont été obligés de mettre la clé sous le porte, ont accéléré la vieillissement du parc automobile algérien et contribué à la survenance d’accidents de la route et de morts.

Enfin, les concessionnaires automobiles qui se préparent à l’ouverture du marché aux importations de véhicules neufs ne savent pas si les autorisations d’importation seront soumises à des quotas, comme annoncé en 2021, avec un plafonnement de la facture à 2 milliards de dollars. De même, les autorités n’ont pas précisé les droits de douane et la TVA qui seront appliqués aux voitures importées. En 2021, il était prévu un droit de douane de 35% et une TVA de 19%. Des taxes qui vont alourdir le prix des voitures importées, sachant qu’au niveau mondial, les prix des véhicules ont beaucoup augmenté sous l’effet de la pénurie des puces électroniques et du coût du fret.

Bref, les Algériens doivent encore garder patience car la volonté des autorités est de retarder autant que possible les autorisations d’importation de véhicules neufs dans le seul but de préserver les réserves en devises du pays qui se reconstituent actuellement, mais de manière lente, du fait que la quasi-dépendance de celles-ci des exportations des hydrocarbures qui représentent plus de 95% des recettes en devises du pays.

Par Karim Zeidane
Le 09/02/2022 à 15h55, mis à jour le 09/02/2022 à 15h56