Depuis quelques semaines, les côtes espagnoles sont le théâtre d’un afflux inquiétant de migrants clandestins algériens: 500 harraga lundi 27 septembre, 1.000 autres une semaine plutôt, du 19 au 21... Le record de juillet est largement battu et cela ne semble être qu'un début.
Ils seraient en effet plus de 10.000 harraga algériens à avoir rallié les côtes espagnoles durant le seul mois de septembre 2021 et le phénomène va crescendo. Plus que leur nombre, le message qu'ils lancent, à l'unisson, dans les nombreuses vidéos postées sur les réseaux sociaux, exprime le mal-vivre et le désespoir d'une jeunesse qui n'attend plus rien des caciques du régime: "On vous laisse le pays!". Un voyage sans retour pour beaucoup...
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Dans la nuit du lundi 28 au mardi 29 septembre, plus de 500 migrants ont débarqué sur les côtes espagnoles à bord d’une trentaine d’embarcations, selon les décomptes du Centre international d’identification des migrants disparus (CIPIMD) et des gardes-côtes espagnols. Parmi les migrants secourus par les Espagnols au niveau des côtes d’Alicante, d’Almeria, de Murcie et des îles Baléares, après avoir parcourus plus de 270 km à partir de la côte algérienne, figurent une femme enceinte et ses 5 enfants.
Du 19 au 21 septembre dernier, ce sont plus de 1.000 harraga, à bord de 80 embarcations, qui ont débarqué sur les côtes espagnoles, selon Francisco Jose Clemente Martin, du Centre international d’identification des migrants disparus (CIPIMD) et membre de l’ONG Heroes del Mar.
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Si en juillet dernier, 2.217 migrants clandestins algériens sont arrivés à bord d’embarcations sur les côtes d’Almeria et les Baléares, au sud de l’Espagne, à bord de 120 barques, selon les données du CIPIMD, sur le seul mois de septembre, ce sont plus de 10.000 migrants algériens qui ont gagné les côtes espagnoles, attestant clairement de l’ampleur du phénomène.
Pour avoir une idée de la forte augmentation des arrivées d’Algériens sur les côtes espagnoles, il faut souligner que durant toute l’année 2020, ils ont été 11.200.
Et, malheureusement, ces chiffres sont loin de refléter la réalité sur le nombre réel d'arrivées d’Algériens en Espagne. En effet, de nombreux candidats à la migration, fortunés, empruntent les «go-fast» et passent souvent inaperçus.
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De plus, les données rapportées ne tiennent pas compte des nombreux décès lors de la traversée de la Méditerranée sachant que certains candidats parcourent environ 300 km pour rejoindre les côtes espagnoles. Ces trajets étant risqués, nombre de harraga périssent lors de la traversée. Des drames qui n’émeuvent pas la junte et le régime de Tebboune.
Ces vagues de départ de migrants clandestins s’expliquent par plusieurs facteurs. D’abord, il y a la crise économique aiguë que traverse le pays et son lot de chômeurs et de pénuries en tout genre qui désenchantent les Algériens. Ainsi, la paupérisation des ménages encourage-t-elle leurs enfants à tenter l’aventure face au désespoir et à l’absence de perspectives dans le pays.
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Ensuite, il y a la crise politique avec les répressions du régime contre le mouvement populaire (Hirak) et la terreur envers les jeunes des régions kabyles qui poussent de plus en plus de jeunes et moins jeunes à quitter le pays. C’est le cas de nombreux migrants venus de Béjaïa et des environs qui fuient. Et pour casser le mouvement de contestation populaire (Hirak) en Kabylie, le régime n’a trouvé mieux que d’accuser les jeunes des régions kabyles de «terroristes» en les désignant presque tous comme sympathisants du Mouvement pour l’autodétermination en Kabylie (MAK).
En outre, il y a l’illusion d’un eldorado à quelques kilomètres des côtes algériennes qui motive les candidats à entreprendre le voyage périlleux pour espérer sortir de la misère.
Enfin, s’il y a autant de migrants clandestins, c’est que les autorités algériennes ont décidé d’ouvrir les vannes. Si autant d’embarcations et de citoyens algériens quittent le pays quotidiennement, c’est que les autorités ont décidé de ne pas les en empêcher. Ce sont pour eux moins de contestataires sur le territoire.
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Le journal El Watan résume bien le malaise des Algériens, «depuis que le drapeau du Hirak ne flotte plus dans le ciel trouble de l’Algérie», la «Harga» (migration clandestine) serait devenue une réaction à «l’accentuation de la fracture sociale, aux injustices et à l’absence totale de perspectives économiques et politiques», en Algérie, explique le quotidien. Ces départs sont le «signe d’un profond désespoir, de mal-vie, de mal-être pesant, de rompre les amarres avec le pays qui les a vu naître», souligne El Watan, dans son édito du 29 septembre 2021.
Preuve de ce désamour entre le régime et sa jeunesse, les migrants n’hésitent pas à afficher clairement leur intention de ne plus revenir en Algérie en adressant aux dirigeants: «On vous laisse le pays!», devenu le chant des harraga quittant le pays.
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Une chose est sûre, ces arrivées d’Algériens sur les côtes espagnoles n’émeuvent pas les dirigeants algériens pour qui ces départs constituent plutôt un bon débarras de partisans du Hirak. Toutefois, elles ne laissent pas indifférents les médias algériens, y compris ceux qui sont pourtant proches du régime.
Ainsi, El Watan parle d’un phénomène qui aurait pris des proportions «alarmantes», ces dernières semaines, expliquant que la migration clandestine est d’autant plus préoccupante qu’elle ne concerne plus seulement les jeunes chômeurs, mais touche désormais toutes les couches de la société algérienne: jeunes, personnes âgées, femmes enceintes, enfants, handicapés, chômeurs, médecins, universitaires… Pis, parfois, ce sont des familles entières qui prennent le large espérant un avenir meilleur pour leurs enfants. C’est le cas de cette femme enceinte et de ses 5 enfants sauvés par les gardes-côtes espagnols.
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Le fait d’être enceinte et quitter son pays avec ses 5 enfants, en prenant autant de risques, prouve l’état dans lequel se retrouvent de plus en plus d’Algériens face aux manques. Si les autorités algériennes sont de marbre face à ces départs massifs, la situation inquiète les autorités espagnoles désarmées face à cette déferlante.
Les Espagnols ne sont pas les seuls à s’inquiéter de ces arrivées massives de migrants algériens sur leurs côtes. La France aussi s’en préoccupe. Et pour cause, la plupart des migrants algériens qui débarquent sur les côtes espagnoles et italiennes ont pour destination finale la France, pays où le nombre de migrants clandestins algériens ne cesse de croître.