Les Algériens vivant à l’étranger, très nombreux à vouloir rentrer dans leur pays pour les vacances d'été, font les frais de la mauvaise gouvernance qui y règne. Malheureusement pour eux, comme ce fut le cas pour tous ceux qui voulaient prendre les ferries pour rentrer en Algérie au cours de l’année, c’est le chaos.
Après le port de Marseille, c’est désormais dans celui d’Alicante que la diaspora algérienne établie en Europe vit l'enfer. Depuis plus d’un mois, des expatriés algériens bloqués au niveau de ce port espagnol multiplient les appels au secours, comme le montrent de nombreuses vidéos postées sur les réseaux sociaux. Parmi eux, des personnes âgées, des femmes et des enfants.
«Cela fait un mois et demi que je suis venu de Paris. Je détiens un billet ouvert et je suis bloqué», souligne un passager bloqué à Alicante dont le témoignage a été repris par Visa-Algérie, ajoutant qu’«il y a des femmes qui n’ont pas pris de douche depuis 20 jours». Une autre passagère renchérit en soulignant que «ça fait 20 jours qu’on est abandonnés ici. On a épuisé tout notre argent.»
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Face à la pagaille indescriptible enregistrée au niveau du port d'Alicante, la police anti-émeute espagnole, appelée à la rescousse, est obligée d’utiliser la manière forte pour calmer des Algériens désespérés. Et ces derniers subissent ce sort dans la totale indifférence des dirigeants algériens, et ce, malgré les souffrances et même des décès enregistrés parmi les personnes bloquées. Selon l’ancien député de l’émigration, Nourredine Belmeddah, dans un post partagé sur Facebook, «c’est un enfer que notre diaspora a vécu dans le port d’Alicante».
Certains ont quitté Alicante pour d’autres ports espagnols dans l’espoir de pouvoir faire la traversée et rentrer en Algérie. En vain. Partout, c’est le chaos. Au port de Marseille, les Algériens dénoncent une «organisation catastrophique» et des «bagarres avec le personnel d’Algérie Ferries». Les bateaux de cette compagnie affichent complet, alors qu'en réalité, ce n'est pas le cas.
D'après les Espagnols, ce sont les autorités algériennes qui bloquent le transfert de leurs ressortissants à partir des ports espagnols. «Le système est fermé depuis l’Algérie, le bateau part vide d’ici», expliquent-ils. Serait-ce à cause des relations tendues entre les deux pays, surtout depuis le soutien de Madrid au plan marocain d'autonomie pour le Sahara?
Pas du tout. Pour preuve, les 1er et 2 juin dernier, le navire «Tassili 2» de la compagnie Algérie Ferries avait effectué un aller vide vers Marseille puis un retour à Skikda avec seulement 39 passagers et 21 véhicules, alors qu’il est doté d’une capacité de 1.300 passagers et plus de 3.000 voitures, laissant en rade des centaines de passagers. Ce qui prouve la volonté délibérée de maltraiter ces Algériens.
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A cela s’ajoute la carence des navires, dont l'offre est très en deçà de la demande en cette période de vacances où les ports français et espagnols sont pris d’assaut par les voyageurs désireux de retrouver leurs proches. Et au lieu d’investir et d’entretenir ses navires, le régime politico-militaire d'Alger préfère investir dans des armes dont l’efficience est aujourd’hui mise à rude épreuve. Il faut savoir que ces contrats d’armement offrent au passage d’importantes commissions aux généraux qui ne se soucient point du calvaire de la diaspora du pays.
Ces membres de la diaspora algérienne bloqués dans les ports sont ainsi livrés à eux-mêmes. Et les réseaux sociaux sont devenus le seul canal pour faire entendre leurs voix, raconter leur calvaire et faire passer des messages à l’adresse du régime.
Et les chanceux qui arrivent à monter à bord des navires de la compagnie algérienne voyagent dans des conditions indignes, comme en témoignent des images filmées à bord: saleté, incivilités, passagers assis et/ou couchés à même le sol… Le laisser-aller à bord des navires est indescriptible. «Payer 1.300 euros un billet et voilà le résultat!», commente un internaute ayant publié une vidéo sur la traversée.
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Cette situation est due à la fois au mépris des Algériens et à l'incompétence de l'appareil politico-militaire qui dirige le pays. Pourtant, il y a quelques semaines, pour faire semblant d’avoir reçu le message de la diaspora, Alger avait, à coup de renfort publicitaire, limogé le patron d’Algérie Ferries. Une manière de lui faire porter le chapeau de déconvenues que rencontrent les Algériens de l’étranger qui souhaitent rentrer chez eux, et cacher ainsi l’incompétence et la mauvaise gouvernance des dirigeants du pays qui sont les premiers responsables de ce chaos.
Le problème est malheureusement plus profond. Le limogeage du patron de l’entreprise et son emprisonnement ne pouvaient cacher la mauvaise gestion de l’entreprise qui est à l’image de la gouvernance du pays. Pour preuve, cela fait plus d’un mois que l’ancien PDG a été débarqué et la situation ne fait qu’empirer. Pourtant, on est en pleine période estivale...