Pétrole: La forte baisse des cours prédit la fin des tensions pour les importateurs

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Le 02/11/2018 à 10h32, mis à jour le 02/11/2018 à 10h43

Les cours du pétrole ont connu une forte correction durant le mois d'octobre, ce qui réjouit les importateurs, mais ne fait guère l'affaire des pays africains producteurs d'or noir. Analyse.

Alors que le cours du Brent, ce fameux pétrole léger de la Mer du Nord, avait commencé octobre à son plus haut niveau depuis quatre ans, l'heure a été à la correction tout au long de ce mois.

En effet, le 4 octobre dernier, le Brent clôturait à Londres au cours de 85,95 dollars, ce qui permettait aux pays producteurs comme l'Algérie, le Nigéria, l'Angola ou encore le Congo, voire le Ghana et la Côte d'Ivoire de jubiler. Le pétrole venait alors d'enchaîner une période haussière de 45 jours, ayant débuté vers le 20 août dernier et se terminant le 4 octobre. Mais depuis, l'heure est à la correction.

Hier, jeudi 1er novembre, le Brent était coté à 72,89 dollars le baril à Londres, à la clôture du marché, soit un recul de 15,43% par rapport au pic du début du mois précédent. Il est rare d'observer une telle baisse sur une période aussi courte. Mais rien d'étonnant puisque cette correction était prévisible pour des raisons purement financières, mais aussi compte tenu des stocks américains. 

Car, d'une part, faut-il le rappeler, les commodities sont devenus des actifs financiers comme les autres qui attirent autant les spéculateurs que les vrais consommateurs.

D'ailleurs, les volumes financiers injectés par les spéculateurs ou les arbitragistes sont nettement plus importants que ceux des négociants.

La phase de hausse qui a permis de franchir la barre psychologique de 80, puis de 85 dollars, a naturellement exposé le pétrole à une correction due aux prises de bénéfices. 

D'autre part, les réserves américaines ne font qu'augmenter depuis 6 semaines, ce qui laisse penser que l'heure n'est plus réellement à la crainte des sanctions contre l'Iran. Ainsi, lors de la semaine achevée le 26 octobre dernier, les réserves commerciales américaines ont augmenté de 3,2 millions de barils, s'établissant à 426 millions de barils. Par rapport à la mi-août, il s'agit d'une progression de 32 millions de barils, de quoi montrer aux producteurs comme aux consommateurs que la tendance s'inscrit sur le long terme. 

Cette nouvelle tendance baissière semble bien donner raison à Donald Trump, qui a plusieurs fois appelé les pays producteurs de pétrole à faire baisser les cours qu'il jugeait artificiellement élevés.

Mais pour ces derniers, qui commençaient à retrouver des niveaux de recettes correctes, cela risque d'être un sérieux revers.

L'Algérie, par exemple, compte tenu de ses dépenses actuelles, a besoin d'un baril autour de 90 voire 100 dollars pour sortir de son cycle de déficit budgétaire et de déficit de sa balance commerciale. C'est également le cas de l'Angola qui s'est outrancièrement endetté, ces dernières années, notamment auprès de la Chine. Des pays comme le Nigeria ou le Ghana pourraient tirer leur épingle du jeu si les prix se stabilisent autour de 75 dollars pour le Brent de la Mer du Nord. En revanche, si la tendance baissière s'accentue, ce serait le retour des jours difficiles sur le plan budgétaire. 

Pour des pays importateurs comme le Maroc, le Sénégal, le Mali, la RDC ou encore le Kenya, les gouvernements continuent évidemment d'appeler de leurs voeux la poursuite de la baisse des prix. Au Sénégal, par exemple, la Société africaine de raffinage (SAR) a récemment fait face à des difficultés d'approvisionnement du fait de la hausse régulière des cours lors des mois précédents. Au Maroc, ce sont les transporteurs qui donnent aujourd'hui de la voix pour réclamer une baisse des prix à la pompe. Bref, la poursuite de cette baisse permettra d'apaiser bien des tensions... 

Par Mar Bassine Ndiaye
Le 02/11/2018 à 10h32, mis à jour le 02/11/2018 à 10h43