Afrique: 89 milliards de dollars de sorties illicites de capitaux par an

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Le 29/09/2020 à 17h15, mis à jour le 30/09/2020 à 15h20

L’Afrique perd annuellement l’équivalent de 3,7% de son Produit intérieur brut (PIB) à cause des transferts illicites de capitaux, selon la Cnuced. En freinant ces flux, l’Afrique pourrait réduire considérablement son déficit de financement pour atteindre les objectifs du développement durable.

La fuite illicite de capitaux cause une énorme perte au continent africain. Selon le rapport de la Conférence des Nations unies sur le commerce et le développement (Cnuced), intitulé «Lutte contre les flux financiers illicites (FFI) pour le développement durable en Afrique», ces transferts font perdre chaque année 88,6 milliards de dollars au continent africain, soit l’équivalent de 3,7% du PIB africain.

Les flux financiers illicites sont des mouvements transfrontaliers d’argent et d’actifs dont la source, le transfert ou l’utilisation sont illégaux. Il s’agit, entre autres, de fuite illicite de capitaux, de flux résultant de pratiques fiscales et commerciales illégales comme la fausse facturation d'échanges commerciaux et les activités criminelles provenant des marchés illégaux, de la corruption ou du vol. Ainsi, en 2014, l’Afrique a perdu 9,6 milliards de dollars au profit des paradis fiscaux, soit l’équivalent de 2,5% du total de ses recettes fiscales.

Ce montant se rapproche des flux entrants sur le continent sous forme d’aide publique au développement, évaluée à 48 milliards de dollars, combinés aux flux d’investissements directs étrangers (IDE), estimés à 54 milliards de dollars, reçus par les pays africains.

Mieux, sur la période 2000-2015, les flux financiers illicites ont totalisé un montant de 836 milliards de dollars, dépassant le stock total de la dette extérieure de l’Afrique qui s’élevait à 770 milliards de dollars en 2018.

Concernant les différents canaux qu’empruntent les flux financiers illicites, ce sont ceux liés aux secteurs extractifs africains qui sont les premiers responsables de la fuite illicite des capitaux du continent avec l’équivalent de 40 milliards de dollars en 2015. Sur ce montant, 77% étaient concentrés dans la chaîne d’approvisionnement de l’or, suivie de celle des diamants (12%) et du platine (6%).

Ces flux financiers illicites constituent une ponction importante sur les capitaux et les revenus des pays africains. Ainsi, selon Mukhisa Kituyi, secrétaire général de la Cnuced, «les flux financiers illicites privent l’Afrique et ses habitants de perspectives d’avenir, compromettent la transparence et la responsabilité et sapent la confiance dans les institutions africaines».

Sachant que le déficit de financement pour atteindre les Objectifs de développement durable (ODD) sont estimés à 200 milliards de dollars par an, ce montant pourrait être réduit d’environ de moitié en réduisant ces flux financiers illicites.

Face à cette situation alarmante de fuite illicite des capitaux, la Cnuced souhaite aider les pays africains à se doter des connaissances et des moyens propres à identifier et à évaluer les risques associés aux flux financiers illicites.

A ce titre, elle demande aux pays africains d’améliorer leur base de données sur les statistiques du commerce international et de conclure des accords d’échange automatique d’informations fiscales pour s’attaquer efficacement aux flux illicites de capitaux.

Par Moussa Diop
Le 29/09/2020 à 17h15, mis à jour le 30/09/2020 à 15h20