A N'Djamena, les troupes françaises réveillonnent avec leur Premier ministre

Le Premier ministre français, Jean Castex à N'Djamena.

Le Premier ministre français, Jean Castex à N'Djamena.. Jérémy MAROT / AFP

Le 01/01/2021 à 10h48, mis à jour le 01/01/2021 à 11h18

"Je viens vous souhaiter la bonne année": minuit est déjà passé quand le Premier ministre français Jean Castex se présente à l'un des postes de garde du siège de la force antiterroriste Barkhane à N'Djaména, afin de marquer son soutien à des troupes endeuillées par la mort de trois soldats.

"Est-ce que vous avez eu le dîner de gala tout de même", lance le Premier ministre aux quatre hommes désignés volontaires pour surveiller la grille de l'entrée des civils en ce soir de Saint-Sylvestre.

La bascule de 2020 à 2021 s'effectue dans une atmosphère particulière pour les 5.100 soldats français de la force Barkhane, qui ont perdu lundi trois des leurs dans l'explosion d'une mine artisanale au Mali.

Si Castex avait décidé d'honorer la tradition des fêtes de fin d'année avec les troupes avant cet évènement, sa venue a pris un tour symbolique, à l'image de l'hommage rendu jeudi soir sous la pleine lune et les drapeaux en berne. Exprimant sa "profonde tristesse", il a insisté sur "la volonté intacte" de la France de combattre le terrorisme islamiste au Sahel, malgré les 47 morts déplorés depuis 2013.

"Cette tristesse ne doit jamais nous abattre, bien au contraire. Notre détermination ne doit en être que plus forte", a-t-il martelé.

Multipliant les messages de reconnaissance aux quelque 800 soldats stationnés au camp Kosseï, Castex a aussi échangé de manière informelle avec certains d'entre eux, comme cet adjudant qui témoignait du "sacrifice" personnel consenti. "Les armées sont très sollicitées humainement et techniquement", a-t-il notamment relevé.

Quelques bulles de champagne dans des coupes en plastique, éclairage néon et sono défaillante, le Premier ministre a dans le décor hétéroclite du "Hard rock café" - une sorte de guinguette avec des fauteuils en wax et des logos route 66 - délivré en retour des mots de motivation. "Nous essayons d'être comme vous: plus l'adversité est forte, plus nous sommes déterminés", a-t-il ainsi lancé.

- Incertitudes -

Attablé avec 5 soldats, dont le commandant de la force Barkhane, Marc Conruyt, mais aussi ce lieutenant mère de deux enfants qui a vécu son cinquième Noël en opération extérieure, le Premier ministre n'a cependant guère apporté de réponses au lot de questions que charrie la nouvelle année.

Et il ne faut pas en attendre davantage vendredi, alors que Castex ira à la rencontre des contingents positionnés à Faya-Largeau (nord), une oasis dans le désert tournée vers la Libye, puis à Abéché (est), un important verrou militaire près du Soudan.

Barkhane arrive pourtant à un nouveau tournant stratégique et l'avenir de la présence militaire française au Sahel est nimbée d'incertitude, même si Paris prend soin d'écarter le terme de "désengagement".

Ce dossier s'est évidemment invité lors d'un entretien au coin du feu entre Castex et Idriss Déby, jeudi après-midi, à Amdjarass (est), le fief du président tchadien à un jet de pierre de la frontière soudanaise.

"Nous avons évoqué des pistes de renforcement de cette coopération" entre la France et le Tchad "avec un objectif commun qui est la lutte contre le terrorisme, que ce soit au Sahel", contre le groupe Etat islamique (EI) ou la nébuleuse d'Al-Qaida, "ou dans la zone du lac Tchad" face à Boko Haram, a simplement déclaré le Premier ministre français.

Car les décisions seront prises lors du prochain sommet de N'Djaména, en janvier ou février, réunissant la France et ses partenaires du G5 Sahel (Mali, Niger, Burkina Faso, Mauritanie et Tchad) engagés dans la lutte antiterroriste.

Ce rendez-vous marquera le premier anniversaire du sommet de Pau (janvier 2020) qui avait recentré les objectifs sur la zone dite des "trois frontières" (Mali, Niger, Burkina Faso), avec plusieurs succès tactiques à la clé notamment contre l'Etat islamique au Grand Sahara (EIGS).

Plusieurs sources laissent désormais entendre que la France pourrait réduire la voilure, déjà en rappelant les 600 renforts déployés cette année, mais aussi en misant sur la montée en puissance des forces locales. Et l'arrivée de forces suédoises et tchèques en ce début 2021 fait aussi espérer une plus grande implication européenne.

Par Le360 Afrique (avec AFP)
Le 01/01/2021 à 10h48, mis à jour le 01/01/2021 à 11h18