Cameroun: gare aux escroqueries lors des concours administratifs

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Le 10/08/2019 à 09h28, mis à jour le 10/08/2019 à 09h33

Avec l'ouverture de la saison des concours d'admission aux grandes écoles et dans la Fonction publique, des arnaqueurs extorquent de fortes sommes d'argent aux candidats contre la promesse de places, en se prévalant notamment d'une proximité avec de hauts responsables de l'administration.

Pour les étudiants et les nouveaux bacheliers camerounais, pas le temps de souffler en cette période de vacances scolaires et universitaires. A peine passé le temps des célébrations après la proclamation des résultats, il faut déjà replonger dans les cours afin de préparer les divers concours administratifs et d'admission aux grandes écoles. Et il y a de quoi faire: écoles normales supérieures, d'administration, de commerce, d'études internationales, d’ingénierie, etc.

La plupart des concours d'entrée ont été lancés récemment dans ces différents établissements. Entre la politique d'équilibre régional qui consiste à assurer à chaque région du pays une représentativité équitable et le nombre de places réduites par rapport au nombre très élevé de candidats, les places sont très chères.

Selon le ministère de la Fonction publique et de la Réforme administrative, après une baisse entre 2014 et 2017, les recrutements ont augmenté depuis 2018, année durant laquelle 5179 postes ont été pourvus. Un chiffre qui sera en augmentation cette année avec 5411 postes à pourvoir, à travers l'ouverture notamment de 92 concours.

Certains vendeurs d'illusions y voient un filon considérable pour arnaquer les candidats, en leur promettant des places et en se prévalant d'être des proches de ministres ou de personnalités haut placées, moyennant de fortes sommes d'argent. Notamment pour les écoles les plus prestigieuses comme l’Ecole d'administration et de magistrature (ENAM), l'Institut des relations internationales du Cameroun (IRIC), l’Ecole militaire interarmées (EMIA), etc.

Marchands d’illusions

Ainsi par exemple, des faussaires créent de faux profils au nom du ministre de la Fonction publique et de la réforme administrative, Joseph Le, ou se font passer pour lui ou ses proches collaborateurs au téléphone. Face à la recrudescence des cas d'escroquerie, le ministre a commis un communiqué récemment pour appeler les usagers à la prudence et rappeler que «l'admission à un concours administratif ne doit en aucun cas faire l'objet d'un quelconque marchandage».

«Nous qui avons déjà fait dix concours et rien n'a marché, bientôt la limite d'âge sera atteinte. On fait donc comment ?», commente Sara F. à propos du communiqué. Dans la conscience collective de l'opinion publique, peu de personnes croient en la transparence de ces concours. Aussi, malgré les nombreux avertissements, de nombreuses personnes continuent-elles à se faire escroquer. Certaines familles se trouvent sur la paille, après avoir été délestées de fortes sommes d’argent. Peu de gens portent cependant plainte, par honte notamment.

«Avec deux amis, nous pensions avoir trouvé une piste pour l'Ecole normale supérieure il y a trois ans. Il nous a été demandé de payer 500.000 francs CFA chacun. Au final, un seul d'entre nous a réussi. Nous continuons à nous demander si c'est grâce à cette "piste" ou alors grâce à ses connaissances intellectuelles», se souvient Andy G, 28 ans et toujours sans emploi. Heureusement, parfois certains filous sont pris à leur propre piège.

Il y a quelques jours, six escrocs du genre ont été interpellés par les forces de l'ordre. Ces derniers, après avoir pris de l'argent à des candidats, ont introduit 74 noms fictifs dans la liste des résultats définitifs au concours de recrutement de mille instituteurs de l'enseignement primaire et maternel, pour le compte du ministère de l'Education de base.

Le subterfuge a été découvert lorsqu'une candidate est venue prendre service avec cette liste tronquée. «Nous ne sommes pas là pour prendre de l’argent aux candidats. Je voudrais une fois de plus prier nos jeunes compatriotes de ne plus du tout se laisser berner par ces marchands d’illusion. Il est bon de cultiver le goût de l’effort», déclare le ministre Joseph Le.

Par Patricia Ngo Ngouem (Yaounde, correspondance)
Le 10/08/2019 à 09h28, mis à jour le 10/08/2019 à 09h33