Le Cameroun a un taux moyen de suicide de 12,2 pour 100.000 habitants en 2016, contre 4,9 en 2012. Le taux de suicide chez les hommes est de 17,1 sur 100.000, soit deux fois le taux pour les femmes qui est, lui, à 7,4 pour 100.000, révèle le «Rapport de suivi des 100 indicateurs clés de santé au Cameroun en 2019 et focus sur les ODD» que vient de publier le ministère de la Santé publique.
Ce rapport, fruit d’un travail entre ce département ministériel et l’Organisation mondiale de la santé (OMS), ne donne toutefois pas les raisons de cette hausse inquiétante du taux de suicide dans le pays.
«L’inflation de la mortalité par suicide s’inscrit dans la dynamique d’un ensemble de facteurs principalement liés à l’environnement social et aux modes de gestion des incertitudes, déployés au quotidien par les individus. Face à la difficulté à apporter des solutions à des problèmes de survie ou d’affirmation de soi, dans une société où l’individualisme, la malhonnêteté et le matérialisme trônent au sommet de la hiérarchie des valeurs depuis quelques décennies, le suicide apparaît comme une solution pour certains», affirme le sociologue Henri Teko.
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Selon ce dernier, pour d’autres, «mourir par suicide est une manière d’attirer l’attention de la société sur son inhumanité et son indifférence grandissantes».
Et pour quoi les hommes sont-ils plus affectés par la mortalité que les femmes au Cameroun? «Des considérations socioculturelles qui accordent des rôles plus stressants à l’homme qu’à la femme constituent des facteurs à prendre à compte. À cela s’ajoute l’orgueil socialement construit qui amène l’homme à enfermer sa souffrance dans le secret du silence, de peur d’être vu comme un être faible et par conséquent, comme une "femme". Ces réalités contribuent à exposer les hommes à la mortalité par suicide et à en faire des victimes privilégiées», explique le sociologue.
Malgré cet état des choses, le rapport note que l’espérance de vie a augmenté, passant de 53 ans en 2009 à 58 ans en 2016, tandis que la mortalité a diminué chez les moins de 5 ans de 151 en 1998 à 79 en 2018 pour 1.000 naissances vivantes.
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Idem pour le VIH-Sida, dont le nombre de morts est passé de 210 décès en 2007 contre 112 décès pour 100.000 habitants en 2015, ainsi que le paludisme qui est de 13 décès pour 100.000 habitants en 2018, contre 20 décès pour 100.000 habitants en 2014 (selon les données du Programme national de lutte contre le paludisme). A contrario, la prévalence de l’obésité a connu une inflation, passant de 8,2 % en 2004 à 10,7% en 2011, et de 20,6% (2004) à 21,5% (2011) en ce qui concerne le surpoids chez les femmes.
Ce rapport a été réalisé en s’appuyant principalement sur les sources de données nationales à savoir les enquêtes nationales, les rapports et documents officiels du secteur santé et des secteurs apparentés à la santé, élaborés en collaboration ou non avec les partenaires techniques et financiers du pays.
Son principal objectif est de fournir un cadre d’analyse de la situation sanitaire du pays en mettant à la disposition des décideurs des informations fiables regroupées en quatre groupes d’indicateurs. «Il s’agit donc d’une photographie qui nous permet de mieux nous projeter au moment où le pays travaille à définir sa stratégie de développement pour la prochaine décennie», indique-t-on à l’OMS.