Cameroun: quand le secret médical des patients est violé et publié sur les réseaux sociaux

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Le 26/01/2020 à 12h39, mis à jour le 26/01/2020 à 13h49

Des photos et des vidéos de patients soignés dans des hôpitaux, postées sur Internet par des infirmiers, choquent l’opinion publique. Un «manquement grave à l’éthique et à la déontologie» qui a poussé le ministre de la Santé à prendre des sanctions envers les contrevenants.

Deux infirmiers de l’hôpital de district d’Obala, une commune située à une quarantaine de kilomètres de Yaoundé, la capitale, ont été suspendus de toute activité au sein de cet établissement sanitaire pour trois mois. La sanction date du 17 janvier dernier et elle émane du ministre de la Santé publique, Manaouda Malachie.

Leur faute: avoir publié sur les réseaux sociaux, des photos et une vidéo d’un élève du lycée bilingue d’Obala à qui ils administraient des soins, après que celui-ci ait eu le pouce sectionné à la machette par son camarade lors d’une dispute.

Début avril 2019, trois infirmières de l’hôpital de district de Deïdo à Douala, la métropole économique, avaient également écopé d’une sanction pour avoir filmé et publié sur Internet des photos d’un élève grièvement blessé à l’arme blanche par son camarade qui recevait des soins dans cet établissement sanitaire, et qui est décédé peu de temps après.

L’affaire avait fait grand bruit dans le pays. Dans l’opinion publique, beaucoup ont décrié le comportement de ces professionnels de la santé reconvertis en reporters d’images.

Un «manquement grave à l’éthique et à la déontologie professionnelle» qui a poussé le ministre de la Santé publique à prendre des sanctions contre les contrevenants.

Surtout que les infirmiers sont soumis au secret professionnel, au même titre notamment que les médecins, les étudiants en médecine, les aides-soignants et les psychologues.

«Le secret médical est une variété du secret professionnel, c’est-à-dire une obligation pour les personnes qui ont eu connaissance des faits confidentiels dans l’exercice de leurs fonctions, de ne pas les divulguer hors des cas prévus par la loi. Lorsque le professionnel est un médecin, on parle de secret médical», explique un médecin sous le couvert de l’anonymat.

«Exposer le cas d’un patient avec une photo sur Internet, sans avoir au préalable demandé son autorisation, constitue bel et bien un risque de rupture du secret professionnel et de non respect de sa vie privée», affirme-t-il.

Les réseaux sociaux n’échappent donc pas à la règle. Outre les sanctions administratives, la violation du secret professionnel est également réprimée par la loi au Cameroun.

L’article 310 du Code pénal dispose qu’est puni d’un emprisonnement de 3 mois à 3 ans, et d’une amende de 20.000 à 100.000 francs CFA, «celui qui révèle, sans l’autorisation de celui à qui il appartient, un fait confidentiel qu’il n’a connu ou qui ne lui a été confié qu’en raison de sa profession ou de sa fonction».

La loi précise également que le contrevenant peut être déchu de sa fonction, la déchéance constituant dans la destitution et l’exclusion de toutes fonctions, emplois ou offices publics. «Les réseaux sociaux ne sont pas une "zone de non droit". Par conséquent, leur utilisation doit toujours se faire dans le respect des obligations déontologiques pour préserver notamment le secret quant aux renseignements de nature confidentielle», conclut notre médecin.

Par Patricia Ngo Ngouem (Yaounde, correspondance)
Le 26/01/2020 à 12h39, mis à jour le 26/01/2020 à 13h49